Pneumologie

BPCO : première évaluation des critères de Rome sur la gravité des exacerbations

Seulement 30% des exacerbations de BPCO hospitalisées classées comme sévères par les critères de Rome discriminent la mortalité à court terme. Une première évaluation sur cohorte de ces critères a permis un positionnement rapide mais d’autres travaux sont nécessaires. D’après un entretien avec Gaétan DESLEE.

  • 27 Jul 2023
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    Une étude, dont les résultats sont parus en mai 2023 dans l’European Respiratory Journal Open Research, a évalué les critères de Rome permettant la classification des exacerbations des patients atteints de BPCO en légères, modérées ou sévères. Il s’agit d’une étude monocentrique, menée aux Pays-Bas. Les auteurs ont réalisé un travail rétrospectif, sur analyse des données. Au total, 364 sujets ont été inclus. Les patients inclus avaient un âge moyen de 70 ans, étaient majoritairement des femmes et 44% d’entre eux avaient été hospitalisés au moins une fois dans les deux années précédentes. Tous les patients retenus étaient hospitalisés pour une exacerbations et avaient au moins un critère retenu sur les cinq critères de la classification de Rome. Les auteurs n’ont pas retrouvé d’évaluation de leur dyspnée initiale et ont donc considéré qu’ils avaient tous une dyspnée supérieure à 5.

     

    Une première évaluation des critères de Rome

    Le professeur Gaétan DESLEE, chef du service de pneumologie du Centre Hospitalier Universitaire de Reims, rappelle que les critères de Rome permettent une classification des exacerbations de BPOC en léger, modérées et sévères, fondée sur des avis d’experts, jusque-là non validés. En 2023, le GOLD a proposé d’utiliser ces critères. Ainsi, ce travail représente une première évaluation de ces critères dans le cadre d’une cohorte de patients BPCO  hospitalisés pour exacerbation, associée à la mortalité à 30 et 90 jours. Gaétan DESLEE explique que cette classification repose sur cinq critères : la dyspnée, la fréquence respiratoire supérieure à 24/min, la fréquence cardiaque supérieure à 95/ min, la saturation inférieure à 92% et la CRP inférieure à 10. Une exacerbation légère est définie par la présence de moins de 3 de ces critères, un exacerbation modérée par la présence de 3 de ces critères et l’exacerbation sévère par au moins 3 de ces critères, associés des anomalies gazométriques (acidose, hypercapnie). Il rappelle, qu’antérieurement, la classification reposait sur le traitement puisqu’une exacerbation était considérée comme légère lorsque des simples bronchodilatateurs suffisaient, comme modérée lorsqu’on avait recours aux corticoïdes et/ou aux antibiotiques et sévère lorsque l’hospitalisation était nécessaire. Gaétan DESLEE souligne que l’impression donnée par les résultats de cette étude sont intéressants car ces critères sont associés à une mortalité  significative dans les formes modérées à sévères d’exacerbations.

     

    Un besoin de travaux complémentaires pour affiner les résultats

    Gaétan DESLEE précise que les résultats de cette étude ont montré que lorsque les exacerbations étai classées selon les critères de Rome, 29,7% d’entre elles étaient sévères, 57% étaient modérées et 14% étaient légères. Comme attendu, la mortalité à 90 jours était à 1% en cas d’exacerbation légère et à près de 8% en cas d’exacerbation modérée à sévère. Dans le cas des exacerbations légères, le taux de mortalité était plus bas avec cette nouvelle définition. Gaétan DESLEE relève qu’il faut tenir compte du fait que tous ces patients étaient hospitalisés, souvent en raison de comorbidités, d’isolement ou de grand âge. Ces paramètres, très fréquents, ont donc forcément un impact sur les résultats. De plus , cette étude est limitée par son caractère monocentrique et l’absence d’évaluation initiale de la dyspnée D’autres travaux, réalisés avec des cohortes prospectives doivent donc être menés pour valider et affiner ces résultats qui représentent un premier pas pour différencier les degrés de sévérité des exacerbations, en ne les fondant pas seulement sur des critères thérapeutiques ou d’hospitalisation.  Gaétan DESLEE souligne que cette classification ressemble à ce qui est fait dans les cas de pneumonies et que des travaux complémentaires permettraient de connaitre l’impact de ces critères sur la prise en charge et la stratégie thérapeutique de ces exacerbations. Il émet une critique sur le fait que, dans cette étude, tous les patients étaient hospitalisés et qu’aucune évaluation n’est réalisée sur des patients pris en charge à domicile Les résultats ne sont donc transposables qu’à une population de patients BPCO prédéterminée.

     

    En conclusion, cette première évaluation des critères de Rome montre que leur utilisation aura un impact non négligeable sur  la stratégie thérapeutique et de prise en charge des exacerbations des patients BPCO mais les résultats nécessitent d’être affinés par d’autres travaux, prospectifs et prenant en compte les patients traités à domicile.

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    JDF