Onco-sein
Cancers du sein localisés HER2+ : quand limiter la chimiothérapie ?
L’avènement des thérapies ciblées a été une révolution pour les tumeurs HER2+ mais ne dispenserait pas de l’utilisation d’une chimiothérapie en fonction des réponses.
- thomasandreas/istock
Depuis l’arrivée des thérapies ciblées anti-HER2 puis des anticorps conjugués, les stratégies de prise en charge des cancers du sein localisé HER2+ ont fortement évolué avec une nette amélioration du pronostic, en particulier chez les patientes en réponse complète après chimiothérapie néoadjuvante + anti HER2.
Ainsi, les nouvelles stratégies d’optimisation thérapeutique visent en une escalade thérapeutique, pour les patientes en absence de réponse histologique complète, comme le montre les résultats récents de l’étude Katherin, validant le TDM-1 en adjuvant. Ou en une désescalade, pour les patientes de bon pronostic dont on pourrait prédire précocement l’obtention d’une réponse histologique complète (essai PHERGain avec TEP scanner, essai PAMELA en fonction des sous-types moléculaires).
WSG-ADAPT HER2+ RH-, un essai de désescalade en fonction de la réponse précoce :
WSG-ADAPT est un essai de phase II/III, qui a pour objectif d’identifier des facteurs de substitution précoce, prédictifs de la réponse thérapeutique, afin d’optimiser la stratégie thérapeutique ultérieure, dans différents sous-types de cancer du sein localisé.
Publié dans The Lancet Oncology, l’essai s’intéresse aux données de survie à 5 ans de la sous-population RH- HER2+ traitée par pertuzumab + trastuzumab (92 patientes) +/- paclitaxel (42 patientes) en néo-adjuvant et évalue l'effet de la réponse histologique complète, de la réponse thérapeutique précoce (par biopsie après 1 cycle) et du sous-type moléculaire.
Le traitement adjuvant comprenait radiothérapie, trastuzumab pour un total de 14 cycles et chimiothérapie par 4 cycles EC (+/- 12 cures de paclitaxel hebdomadaire dans le bras trastuzumab plus pertuzumab). La chimiothérapie pouvait être omise en cas de réponse complète, soit pour 57% (39/69) des patientes (29 % dans le groupe trastuzumab plus pertuzumab et 79 % avec paclitaxel).
Un traitement par thérapies ciblées seules ?
Les 1ers résultats publiés en 2017, montrent un taux de réponse complète plus important dans le groupe avec chimiothérapie que sans (90,5% versus 34,4%), témoignant d’une haute chimio sensibilité de ces tumeurs. Cette réponse histologique complète est associée à une amélioration de la survie sans maladie invasive (HR 0,14, 0,03–0,64 ; p=0·011).
Même si les données de survie à 5 ans (survie sans maladie invasive, sans récidive, sans récidive locorégionnale, sans maladie à distance ou globale) sont identiques dans les 2 groupes, on note 10 récidives invasives chez les patientes du bras pertuzumab-trastuzumab sans réponse complète versus 1 dans le bras paclitaxel. Le manque de puissance de cette étude pouvant expliquer l’absence de significativité de cette différence.
Persistance de l’indication de la chimiothérapie ?
L’omission complète de la chimiothérapie ne semble donc pas indiquée dans cette population d’étude, non sélectionnée.
Un double blocage seul pourrait s’envisager chez les patients dont on pourrait prédire une réponse complète soit pour les tumeurs de sous-type enrichi en HER2, HER2 3+ ou en réponse précoce, comme le montre les résultats exploratoires de cette étude, avec un taux de réponse complète élevé avec double blocage seul pour ces sous-groupes.
Ou plutôt, de la polychimiothérapie ?
Les résultats ne montrent pas de différence de survie sans maladie invasive entre les patientes traitées ou non avec une chimiothérapie adjuvante complémentaire (HR 1,84, IC à 95 % 0,11–30,42 ; p=0·67). Ces données de survie sont comparables à ceux de précédents essais utilisant un double blocage HER2 associé à la chimiothérapie.
Compte tenu du haut taux de réponse complète pathologique et des résultats de survie, individualiser le traitement selon la réponse histologique après 12 semaines de double blocage associé au paclitaxel a le potentiel de devenir un nouveau standard pour les patientes atteintes d'un cancer du sein à risque intermédiaire, HER2+, RH-.
Une stratégie qui limiterait ainsi, chez une proportion importante de patientes, les toxicités aigus et tardives d’une polychimiothérapie. D’autres essais sont en cours pour valider cette stratégie et l’élargir au patiente RH+/HER2+ (CompassHER2-pCR et DECRESCENDO).











