Bouffée délirante aiguë : l’hospitalisation est nécessaire en urgence

Publié le 22.02.2017
Mise à jour 17.02.2023
Bouffée délirante aiguë : l’hospitalisation est nécessaire en urgence
MarinaZg/iStock

A mi-chemin entre les troubles anxieux et les psychoses, la bouffée délirante aiguë est une urgence thérapeutique qui doit conduire à une hospitalisation. Dans plus de 30 % des cas, elle ne se reproduira plus jamais.

Bouffée délirante : COMPRENDRE

Des mots pour les maux
La « bouffée délirante aiguë » est également appelée « trouble psychotique bref » ou « trouble psychotique aigu et transitoire ».
Les « neuroleptiques », également appelés « antipsychotiques » sont des médicaments utilisés pour soigner les psychoses et d’autres maladies comme les troubles bipolaires, la schizophrénie, les troubles dépressifs.
Les neuroleptiques agissent sur la synthèse des molécules, les « neuromédiateurs », chargées de transmettre l’information entre les cellules nerveuses comme la dopamine ou la sérotonine.

Qu’est qu’une bouffée délirante aiguë ?

La « bouffée délirante aiguë » est caractérisée par l’apparition brutale d’un épisode de délire, résolutif en moins d’un mois. Cette bouffée peut durer quelques heures, quelques jours ou quelques semaines.
Il s’agit donc d’un épisode de délire qui survient brusquement chez une personne n’ayant jamais manifesté auparavant de problème psychique de ce type. La personne atteinte n’a pas conscience qu’elle délire et elle ne manifeste aucun recul par rapport à ses pensées et à son discours décousus. Les hallucinations sensorielles sont fréquentes. Sa perception de la réalité est modifiée, le fonctionnement de son esprit est profondément bouleversé et ses relations avec le monde extérieur sont très perturbées.
Touchant plus particulièrement les adolescents et les adultes jeunes, la bouffée délirante aigu est souvent spectaculaire et doit absolument prise en charge en urgence dans un service hospitalier de psychiatrie.

Quels sont les facteurs déclenchants d’une bouffée délirante aiguë ?

La bouffée délirante aiguë arrive dans la plupart du temps chez des personnes fragiles psychologiquement et mal adaptées sur le plan social et/ou professionnel, qui vont décompenser de façon brutale par un « délire hallucinatoire ».
Dans la plupart des cas, il existe un facteur déclenchant identifiable dont la survenue apparaît comme « la goutte d’eau qui fait déborder le vase ».
Parmi ces facteurs, on trouve des chocs émotionnels : deuil, échec professionnel ou scolaire, séparation conjugale, accident, accouchement, surmenage. Mais également la prise de toxiques comme l’alcool, les drogues (LSD, cocaïne, amphétamines..) ou de médicaments (antidépresseurs, corticoïdes, antituberculeux..).

Quels sont les signes de bouffée délirante aiguë ?

Avant de se déclencher, la bouffée délirante aigue est précédée de signes annonciateurs que l’on appelle des « prodromes ». Souvent anodins, ces prodromes apparaissent 3 à 4 jours avant la crise mais passent souvent inaperçus : troubles du sommeil, anxiété ou bizarreries du comportement.
Le début de la bouffée délirante est généralement très brutal et caractérisé par une rupture franche avec l’état antérieur de la personne que l’on compare à « un coup de tonnerre dans un ciel serein ».
Le signe majeur est la survenue d’idées délirantes soutenues par des « hallucinations psychosensorielles », riches et multiples. La personne va se mettre à voir, entendre ou ressentir des choses qui n’existent pas et avoir des idées totalement désorganisées, incohérentes et récurrentes sur plusieurs thèmes : mystique, messianique, onirique, sexuel, mégalomaniaque, paranoïaque ou de persécution.
Ces situations sont vécues comme si elles existaient vraiment avec parfois une totale dépersonnalisation avec une impression de n’être plus soi-même, ce qui rend la personne difficilement raisonnable et contrôlable. Des voix intérieures dictent à la personne ce qu’elle doit faire conduisant parfois à des évènements médico-légaux comme une fugue, une agression ou même un viol.
Le sujet se sent épié et est persuadé qu’on lit dans ses pensées. Le discours est confus, souvent rapide avec un débit impressionnant de mots et un niveau d’excitation élevé.
Spontanément, cet état peut durer plusieurs semaines mais moins d’un mois.

Bouffée délirante : DIAGNOSTIC

Quand faut-il évoquer une bouffée délirante aiguë ?

Toute personne dont l’état se modifie du jour au lendemain, et qui exprime une excitation et un délire hallucinatoire, doit faire suspecter une bouffée délirante aiguë.
Aucun examen paraclinique ne permet de affirmer le diagnostic, qui sera posé par le psychiatre des urgences sur l’interrogatoire du sujet et de ses proches.

Faut-il consulter en urgence ?

La bouffée délirante est une urgence absolue qui doit être prise en charge rapidement car il y a un risque non négligeable que la personne représente un danger pour elle-même et pour autrui.
De plus, il est indispensable d’éliminer un autre diagnostic qui pourrait mimer la bouffée aigue délirante.
Il faut ainsi réaliser une glycémie pour éliminer une hypoglycémie, un scanner cérébral pour éliminer une tumeur du cerveau ou un électroencéphalogramme pour éliminer une crise d’épilepsie.
Sur le plan toxicologique, il est nécessaire de pratiquer une recherche de drogues dans le sang et les urines mais également de médicaments qui auraient pu déclencher la crise.
Sur le plan psychiatrique, il faut éliminer un accès maniaque d’un trouble bipolaire, un état mélancolique ou encore un trouble de la personnalité.
Enfin, l’urgence vient également de la nécessité de traiter la crise le plus rapidement possible.

Bouffée délirante : TRAITEMENT

Quelles sont les mesures à prendre lors d’une bouffée délirante aiguë ?

Lorsqu’une personne présente une bouffée délirante aiguë, il faut essayer de la rassurer, de la calmer et aller dans le sens de sa pensée sans pour autant valider ou rentrer dans son jeu. Il faut aussi absolument sécuriser son environnement pour éviter tout débordement (ex : fermer les fenêtres).
Il faut ensuite immédiatement amener la personne aux urgences psychiatriques ou appeler le 15.
Même si le malade refuse de se faire hospitaliser, la loi permet à une tierce personne de demander une hospitalisation sous contrainte, mais permet également aux forces de l’ordre de demander une hospitalisation d’office en cas de troubles sur la voie publique.

En quoi consiste le traitement de la bouffée délirante aiguë ?

Le traitement de la bouffée délirante aiguë nécessite une hospitalisation dans un service de psychiatrie afin d’administrer au plus vite les médicaments nécessaires à l’arrêt de l’épisode aigu.
En cas de forte agitation, les médecins pourront prescrire un sédatif ou un anxiolytique en intraveineux ou intramusculaire, utiles pour calmer le malade mais inactifs sur les hallucinations. Afin de diminuer la production hallucinatoire, les seuls médicaments efficaces sont les neuroleptiques à doses progressives en fonction de l’état du malade. Ce traitement sera maintenu et adapté pendant un minimum de 6 mois jusqu’à un an après l’amélioration des signes.
La psychothérapie n’a que très peu d’intérêt dans cette situation aiguë, elle sera envisagée à distance de l’épisode et n’aura qu’un rôle de soutien pour comprendre et revenir sur les raisons qui ont déclenché la bouffée délirante. Le retour à domicile sera prononcé par le psychiatre une fois la situation maitrisée.

Bouffée délirante : VIVRE AVEC

Comment évolue une bouffée délirante aiguë ?

Dans un tiers des cas, après traitement, l’épisode de bouffée délirante ne laissera aucune séquelle et restera un épisode unique dans la vie de la personne.
Dans 40 % des cas, les épisodes deviendront récurrents avec des périodes de calme et des périodes de délire aigu souvent identiques à la première. A long terme, il y a un risque chronicisation avec un basculement vers un trouble bipolaire.
Enfin dans les 20 % des cas restants, l’épisode évoluera vers une maladie psychiatrique type schizophrénie, dont le diagnostic devra être fait rapidement afin de proposer au malade la prise en charge thérapeutique adéquate. Quelques caractéristiques de la première bouffée sont prédictifs de la conversion en psychose schizophrénique : un délire pauvre en hallucinations, une évolution lente, une mauvaise réponse au traitement, des antécédents familiaux psychiatriques ou une absence de recul et de critique a posteriori de l’épisode.

Comment prévenir la survenue d’une bouffée délirante aiguë ?

Il est difficile de prévenir la survenue d’une bouffée délirante aiguë en raison de son caractère brutal et imprévisible. Même en présence de signes annonciateurs, le premier épisode de bouffée délirante ne peut être difficilement stoppé ou évité.
L’idéal serait d’agir sur les facteurs favorisants et d’améliorer la qualité de vie professionnelle et personnelle du sujet à risque. Concernant les personnes susceptibles de récidiver, il est conseillé de se faire suivre par un psychiatre, et de continuer à prendre un traitement antipsychotique.
Dans tous les cas, il faut mettre au courant l’entourage pour qu’il puisse réagir rapidement et de façon adéquat en cas de déclenchement d’une nouvelle crise.

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JDF