Syphilis : une infection qui simule de nombreuses maladies

Publié le 09.08.2020
Mise à jour 02.01.2023
Syphilis : une infection qui simule de nombreuses maladies
Mukhina1/iStock

La syphilis est une infection sexuellement transmissible (IST) secondaire à une bactérie très particulière. Elle diffuse dans le corps, peut y rester quiescente et se réactiver. Elle peut donc ressembler à de très nombreuses maladies : ceci lui a valu le surnom de « grande simulatrice ».

Syphilis : COMPRENDRE

Des mots pour les maux
La syphilis est une infection sexuellement transmissible (IST) appelée aussi « vérole » ou grande vérole (par opposition à la variole qui est la « petite vérole ») ou « mal de Naples ».

Qu'est-ce la syphilis ?

La syphilis est une infection sexuellement transmissible (IST) d’origine bactérienne, qui était très grave avant la découverte des antibiotiques.
Elle est encore très présente dans les pays en voie de développement et une recrudescence est apparue depuis les années 1990, essentiellement dans la communauté homosexuelle (80 % des cas), mais il existe une légère tendance à une augmentation chez les hétérosexuels, en particulier les femmes.
La syphilis est une maladie infectieuse due à une bactérie, Treponema pallidum, le « tréponème pâle », qui se transmet surtout par voie sexuelle. Il existe des transmissions de la mère vers l’enfant (transmissions « materno-fœtales »).
Les signes sont essentiellement des ulcérations indolores sur les organes génitaux (« chancres ») et une éruption sur la peau et les muqueuses de petites tâches rouges (« macules ») ou de petits boutons rouges (« papules ») qui sont contagieuses (les « syphilides papuleuses »).
Ces lésions évoluent au fil du temps, ce qui permet de distinguer la « syphilis précoce », durant la première année d'évolution de la maladie, et la « syphilis tardive », définie par une évolution de plus d'un an.

Comment attrape-t-on la syphilis ?

• La contamination par la syphilis se fait principalement par contact direct avec un chancre de la syphilis primaire chez le partenaire, pendant un rapport sexuel non protégé, oral ou génital, ou par contact direct avec des syphilides érosives, qui sont les lésions de la peau ou des muqueuses présentes lors de la syphilis secondaire.
La période d'incubation est très variable, de l'ordre de 3 semaines à 1 mois. Les germes, qui sont les tréponèmes pâles, diffusent très rapidement dans tout l'organisme. Il même possible d'en trouver dans le liquide qui entoure le cerveau et la moelle épinière (« liquide céphalo-rachidien ») dès la phase initiale de la maladie, alors même qu'il n'existe aucun signe neurologique.
Une personne infectée peut transmettre la syphilis même si elle n’a pas de signes de la maladie. Ainsi, le risque de transmettre la syphilis est plus élevé pendant l’année qui suit le début de l’infection car les tréponèmes sont alors présents à la surface des lésions de la peau et surtout des muqueuses. La transmission par voie sexuelle peut avoir lieu même sans qu’il y ait pénétration, orgasme ou éjaculation.
• La syphilis peut aussi se transmettre par contact avec du sang lors du partage de matériel de préparation, d’injection ou d’inhalation de drogues. Ce mode de transmission est toutefois beaucoup plus rare que la transmission par voie sexuelle.
• Une mère infectée peut également transmettre la syphilis à son bébé pendant sa grossesse ou au moment de l’accouchement.

Quels sont les signes de la syphilis ?

Les signes de la syphilis sont très variables d’une personne à l’autre et surtout selon le stade de l’infection non traitée. Non traitée, la syphilis peut évoluer à bas bruit pendant des dizaines d’années en provoquant de graves complications.
Souvent, les personnes qui ont la syphilis ne se rendent pas compte qu’elles ont des signes de l’infection. Une personne peut donc être infectée sans le savoir et transmettre l’infection.
Classiquement, si elle n’est pas traitée, la syphilis peut évoluer en 4 stades : primaire (« chancre »), secondaire (infection de la peau et des muqueuses), de latence et tertiaire (complications tardives, en particulier neurologiques). Désormais, on parle plutôt de phase précoce (moins d’un an d’évolution non traitée) et de phase tardive (plus d’un an d’évolution non traitée).
Au cours de la phase précoce qui correspond donc à la première année d'évolution de la maladie, on distingue :
• La syphilis « primaire » qui se manifeste par le « chancre syphilitique », ulcération unique, indurée, superficielle, propre, indolore et contagieuse. Chez l'homme, le chancre siège sur le gland ou au niveau du sillon entre le gland et le prépuce (« sillon balano-préputial »).
Son diagnostic peut toutefois être difficile en cas de localisation « cachée », en particulier chez la femme au niveau du col de l'utérus, ou chez les hommes et les femmes au niveau du rectum ou de la gorge.
Le diagnostic peut aussi être difficile si son aspect est atypique. Le chancre guérit spontanément en 2 à 6 semaines sans laisser aucune cicatrice.
• La syphilis secondaire, qui survient si la syphilis primaire n'a pas été traitée, se caractérise par des lésions très contagieuses au niveau de la peau et des muqueuses. Ce sont les « syphilides papuleuses » qui peuvent siéger aussi bien au niveau du visage, que du tronc et des membres.
Ces lésions sont très variées et trompeuses et peuvent prendre l'aspect d'une « roséole » banale, d'une acné, d’une varicelle, d’un psoriasis en goutte… ce qui rend le diagnostic difficile.
• La syphilis sérologique précoce au cours de laquelle il n'existe plus aucun signe mais simplement une « cicatrice sanguine » décelable lors d'une prise de sang et qui témoigne de la présence de la bactérie dans l'organisme.
Lorsque la syphilis n'a pas été diagnostiquée et traitée au cours de la première année d'évolution, elle peut évoluer vers une phase tardive où on distingue :
• La syphilis tertiaire qui a aujourd'hui pratiquement totalement disparu en France puisqu'on considère que moins de 10 % des syphilis récentes non traitées évolueront vers cette forme. Cette phase de l’infection est dominée par des manifestations sur la peau, les muqueuses, des problèmes cardiaques et surtout neurologiques (« paralysie générale » et « tabès syphilitique »).
• Une syphilis sérologique tardive, qui peut être détectée lors d’une prise de sang et qui représente la majorité des patients dont la syphilis précoce n'a pas été traitée.

Quelles sont les complications de la syphilis ?

Si elle n’est pas traitée, la syphilis peut durer des années. Même chez une personne qui n’a pas de signes apparents, elle peut entraîner des lésions d’organes importantes. Grâce aux antibiotiques, de telles évolutions sont devenues rares dans les pays occidentaux.
Sans traitement, 8 % à 10 % des personnes infectées souffrent de troubles neurologiques importants dix à vingt ans après le début de la maladie : c’est la « neurosyphilis ».
• Il s’agit le plus souvent d’une inflammation chronique du cerveau et de ses enveloppes ou « méninges ». Cela donne une « méningo-encéphalite » qui peut aboutir, après une phase d’excitation, à la démence. Ce tableau était connu autrefois sous le nom de « paralysie générale ».
• Les malades peuvent aussi souffrir de trouble de la coordination des membres, associés à des douleurs lancinantes et à des pertes de contrôle de la vessie et des intestins : c’est le « tabès syphilitique » qui est une dégénérescence secondaire des racines nerveuses postérieures et d’une partie de la moelle épinière (« cordons postérieurs de la moelle »).
Des atteintes du cœur, des os, du foie, des yeux sont aussi décrites.
Une femme enceinte qui a la syphilis a un risque d’accouchement prématuré, d’avortement spontané (« fausse couche ») ou d’accoucher d’un enfant mort-né.
L’enfant d’une mère infectée risque de naître avec des malformations congénitales, comme une cécité partielle, une surdité, ou des malformations des os et des dents.
La syphilis augmente aussi le risque d’attraper ou de transmettre le VIH.

Syphilis : DIAGNOSTIC

Quand faut-il évoquer une syphilis ?

Il faut bien sûr consulter en cas d’ulcération du gland ou d’éruption atypique sur la peau.
Une personne qui a eu des relations sexuelles non protégées doit consulter son médecin traitant qui évaluera la nécessité de passer un test de dépistage, ainsi une personne qui a une syphilis débutante ou inapparente pourra ainsi éviter de la transmettre à d’autres personnes et prévenir les complications.
Du fait de la difficulté diagnostique, la syphilis se dépiste par une prise de sang. Il existe des centres de dépistage anonyme et gratuit pour la syphilis.
Le dépistage sérologique est obligatoire chez la femme enceinte au cours du premier trimestre de la grossesse et en cas de don du sang. Il est conseillé annuellement chez les homosexuels. Il peut être proposé aussi chez les personnes à risque, ayant eu un rapport sexuel non protégé ou présentant une autre infection sexuellement transmissible ou ayant été en contact avec un sujet syphilitique.

Comment diagnostique-t-on la syphilis ?

La confrontation entre l'examen clinique et la sérologie oriente généralement le diagnostic, la visualisation directe du tréponème au microscope à partir d’un prélèvement, qui était la technique de référence, n’est plus aujourd’hui réalisée. Le traitement étant simple, il est souvent administré en cas de doute et par prudence avant même la réception des résultats.
• Du fait de la variabilité des lésions, le diagnostic clinique des lésions n'est pas toujours facile. Le « chancre syphilitique » est transitoire et la personne infectée ne consulte pas toujours à ce stade.
• Alors que c'est pourtant à ce moment que l'on peut mettre en évidence le tréponème, par prélèvement réalisé au niveau du chancre : l'étalement sur une lame du prélèvement génital permet de voir les tréponèmes avec un microscope spécial, dit « à fond noir ». Il s'agit d'un examen long à faire et il n’est pas spécifique : on ne peut pas affirmer que le tréponème que l’on voit est Treponema pallidum, en cause dans la syphilis, ou un autre type de tréponème.
• Le diagnostic sérologique se fait par une prise de sang qui permet de doser des anticorps signant la présence de tréponèmes dans l'organisme. Il en existe deux types : le VDRL, qui signe une syphilis précoce, et le TPHA, qui au contraire est le stigmate d'une syphilis ancienne. Le VDRL n’est pas spécifique d’une tréponématose et peut être augmenté dans d’autres maladies (anticoagulant circulant). Le VDRL s’estompe avec le temps et peut se négativer.
Il faut réaliser à la fois un test qualitatif et quantitatif : on regarde dans un premier temps si le test est positif ou négatif et, s’il est positif, on dose la quantité d'anticorps dans un deuxième temps. La sérologie peut mettre un certain temps à se positiver et il faut donc parfois refaire une prise de sang, après un délai de quelques jours, si la première sérologie est négative.
Ces sérologies ne sont cependant pas spécifiques de la syphilis : elles peuvent en effet être positives au cours d’autres infections dues à un tréponème différent (pian, pinta, bejel) et qui sévissent dans d’autres régions du monde, notamment en Afrique. Ainsi, une sérologie VDRL ou TPHA positive chez une personne ayant vécu en Afrique doit être interprétée avec prudence car elle peut signer une infection par un autre type de tréponème.
• La pratique de nouvelles sérologies réalisées à distance du traitement permet également de surveiller l'efficacité de ce dernier : les sérologies VDRL deviennent négatives si le traitement a été efficace.
• La biopsie cutanée n'est pratiquée qu'en cas de doute diagnostique, mais son aspect n’est pas très spécifique.
D'autres examens peuvent être demandés par les médecins : prises de sang, radiographies, examen de l’œil (« ophtalmologique ») ou ponction lombaire, en fonction des signes présentés par la personne infectée.
• Par ailleurs, avoir contracté une syphilis doit faire évoquer la possibilité d'une contamination par une autre infection sexuellement transmissible comme le VIH, l’hépatite B, une chlamydiose… Des prélèvements sanguins ou gynécologiques peuvent donc être nécessaires.
Enfin, il est indispensable de dépister le partenaire afin de le traiter éventuellement.

Syphilis : TRAITEMENT

Que peut-on faire en cas de syphilis ?

Les personnes qui ont la syphilis doivent prévenir leurs partenaires le plus vite possible. Ceci permettra d’éviter la diffusion de la syphilis à partir de leur partenaires infectés et non traités.
Leurs partenaires pourront passer rapidement un test de dépistage et recevoir éventuellement les traitements appropriés afin d’éviter de transmettre l’infection à d’autres personnes et des complications.

Quel est le traitement de la syphilis ?

La découverte de la pénicilline a révolutionné le pronostic de la syphilis et a expliqué son éradication au cours du siècle dernier. La recrudescence des cas actuellement observés se traite facilement par des injections de pénicilline retard avec une efficacité de 100 %.
• Le traitement de la syphilis précoce repose en effet sur la prescription d'un antibiotique, la pénicilline, et plus précisément d'une forme retard de pénicilline, la benzathine pénicilline G retard : il s’agit d'une seule injection intramusculaire unique de 2,4 millions d'unités.
• En cas de syphilis secondaire avec de nombreuses lésions, il peut se produire une réaction paradoxale, ou « réaction d'Herxheimer », qui survient quelques heures (4 à 6 heures) après l'injection et se traduit par une aggravation transitoire des syphilides, ce qui peut nécessiter un traitement spécifique.
• En cas de syphilis tertiaire non neurologique ou de syphilis latente tardive, il est nécessaire de pratiquer une injection de pénicilline retard par semaine pendant 3 semaines.
• En cas de neurosyphilis, une hospitalisation est nécessaire avec une perfusion intraveineuse de 20 millions d'unités par jour de pénicilline G pendant 14 jours. L'efficacité de ce traitement est de 100 %.
• En cas d'allergie à la pénicilline, on peut administrer un autre antibiotique de la famille des tétracyclines, la doxycycline, 200 mg/jour par voie orale, pendant 15 jours s'il s'agit d'une syphilis précoce et pendant 28 jours s'il s'agit d'une syphilis tardive non neurologique.
Face à une neurosyphilis, il n'y a pas d'alternative thérapeutique à la pénicilline. Il est alors possible d'induire une tolérance à la pénicilline en administrant de petites doses de pénicilline quelques jours avant le traitement.
Il est conseillé de revoir le médecin 10 à 15 jours après l'injection, puis 6 mois et 1 an plus tard afin de faire une sérologie VDRL de contrôle qui doit se négativer, témoignant ainsi de la guérison. Il faut compter environ 1 an pour la négativation de la sérologie VDRL en cas de syphilis primaire et environ 2 ans en cas de syphilis secondaire.

Quelles sont les précautions à prendre durant le traitement ?

Le traitement prend un certain temps à agir pour guérir l’infection et pendant ce temps, la personne demeure contagieuse.
Pour ne pas transmettre la syphilis ou l’attraper de nouveau, la personne infectée et ses partenaires doivent donc éviter d’avoir des relations sexuelles tant qu’ils ne sont pas guéris.
Avant d’avoir des relations sexuelles, la personne infectée et ses partenaires doivent donc attendre 7 jours après leur traitement, s’ils ont de la pénicilline à dose unique sous forme d’injection, et jusqu’à la fin de leur traitement s’ils doivent prendre des comprimés de tétracyclines pendant plusieurs jours.
De plus, si la personne infectée a des signes cliniques, ils doivent attendre jusqu’à ce que ceux-ci aient complètement disparu.
S’ils ne peuvent attendre, la personne infectée et ses partenaires peuvent se protéger avec un préservatif. Ils peuvent aussi utiliser un carré de latex pour couvrir la vulve ou l’anus pendant les relations orales. Ainsi, la bouche n’entre pas en contact direct avec les organes génitaux. Il est possible de fabriquer un carré de latex en le découpant dans un gant de latex ou dans un préservatif en latex non lubrifié.

Syphilis : PREVENIR

Comment prévenir la syphilis ?

Aucun vaccin ne protège contre la syphilis.
Une première infection ne confère par ailleurs aucune immunité, c'est-à-dire aucune protection pour l'avenir. On peut donc se contaminer à nouveau, et il faut donc se protéger efficacement et systématiquement.
La syphilis est une infection qui se transmet facilement au contact d'un chancre. L'utilisation du préservatif est le seul moyen de prévention efficace. Pour offrir la meilleure protection possible contre la syphilis, le préservatif doit être utilisé lors de chaque relation sexuelle et pendant toute la durée de la relation sexuelle orale, vaginale ou anale.
Les personnes qui partagent des jouets sexuels peuvent diminuer le risque de transmission de la syphilis en les recouvrant avec un préservatif et elles doivent changer de préservatif entre chaque partenaire.

Syphilis : PLUS D’INFOS

La syphilis en France

On estime que plus de 500 cas surviennent chaque année en France, avec des foyers épidémiques locaux. La syphilis touche actuellement surtout les homosexuels masculins (environ 80 % des cas de syphilis, dont près de 50 % de séropositifs pour le VIH), mais il existe une légère tendance à une augmentation chez les hétérosexuels, en particulier les femmes.

Les liens de la syphilis

Le site du Ministère de la santé sur les Infections Sexuellement Transmissibles
http://www.info-ist.fr/tout-savoir-sur-les-ist/syphilis.html

Les liens Pourquoi Docteur

Une flambée de syphilis inquiète les médecins corréziens
Infections sexuellement transmissibles : explosion des contaminations dans le monde
Des ados inventent un préservatif qui change de couleur en cas d'infection
Hépatite B : une infection du foie liée au sexe ou au travail
Gonorrhée : la blennorragie ne brûle pas toujours quand on urine
Infection génitale à chlamydia : contagieuse mais pas toujours apparente
Hépatite B : une infection du foie liée au sexe ou au travail

Pour laisser un commentaire, Connectez-vous par ici.