Onco-sein

Cancer du sein triple négatif : quelles chimiothérapies en adjuvant ?

Dans les tumeurs du sein triple négatives, sans réponse histologique complète après chimiothérapie néoadjuvante, l’étude de non infériorité ECOG-ACRIN EA1131, comparant une chimiothérapie adjuvante par sels de platine vs capecitabine est négative avec une toxicité majorée.

  • 25 Juin 2021
  • A A

    La prise en charge des cancers du sein triple négatif en phase précoce, représentant environ 15% des tumeurs invasives, repose sur approche néoadjuvante dans l’objectif d’obtention d’une réponse histologique complète, critère avéré d’augmentation de survie, ce qui va concerner environ 40-45% des patientes. Sur les données récentes de l’étude CREATE-X, les patientes qui ont un résidu tumoral post chirurgical bénéficient d’un traitement adjuvant par Capecitabine, avec un bénéfice en survie sans maladie invasive et survie globale prouvé.

    Pour autant, la spécificité des tumeurs triple négative via une instabilité génomique accrue, une déficience des mécanismes de réparation de l’ADN, leur confèrent une sensibilité majorée aux sels de platine. C’est cette hypothèse que les auteurs tentent de valider en adjuvant, quand de plus en plus de praticiens ajoutent un sel de platine en association à une chimiothérapie par taxanes et anthracyclines en néoadjuvant dans cette population.

    Absence de réponse histologique complète : patientes à haut risque de récidive.

    Récemment publiée dans le JCO par Mayer, l’étude de phase III de non infériorité, évaluant chez les cancers du sein triple négatif précoce, avec résidu tumoral invasif après chimiothérapie néoadjuvante, une chimiothérapie adjuvante par sels de platine vs capecitabine est négative concernant son critère de jugement principal à savoir la survie sans maladie invasive, surajoutée d’une toxicité majorée.

    En pratique, 410 patientes ont été randomisées entre juin 2016 et Mars 2021, selon un schéma 1-1. Les patientes éligibles avaient une tumeur du sein triple négative, de stade II-III, bénéficiant d’une chimiothérapie néoadjuvante à base d’anthracyclines et taxanes, suivie d’une chirurgie et d’une radiothérapie, pouvant être réalisée en post opératoire immédiat ou après chimiothérapie adjuvante, avec un résidu tumoral invasif d’au moins 1 cm. Un test PAM50 était effectué sur la maladie résiduelle pour le typage (basal like ou non).

    Elles ont reçu une chimiothérapie adjuvante par 4 cycles de sels de platine (Carboplatine AUC 6 ou Cisplatine 75 mg/m2, toutes les 3 semaines) vs 6 cycles de Capecitabine (1000 mg/m2 matin et soir 2sem/3). Les patientes étaient stratifiées selon le stade tumoral initial, la taille du résidu tumoral (1-3 cm vs >3 cm), le type de sel de platine (cisplatine vs carboplatine), le type de chimiothérapie néoadjuvante et la nécessité ou non d’une radiothérapie. Le critère de jugement principal était la survie sans maladie invasive pour les tumeurs basales.

    Pas de non infériorité en survie sans maladie invasive des sels de platine.

    La population, homogène dans les 2 groupes, avait un âge médian de 52 ans. Toutes les patientes avaient reçu une chimiothérapie néoadjuvante par taxanes et 85% dans le bras capecitabine et 86.5% dans le bras sels de platine par anthracyclines, 76.3% et 73.6% respectivement une radiothérapie préalable, un délai médian de 115 et 118 jours respectivement en post opératoire, 78.1% et 77.6% de grade 3, 63.1% et 56.5% de tumeur T2 initiale, 46.2% et 35.8% de statut ganglionnaire initial N1, un résidu tumoral moyen de 2.4 cm vs 2.5 cm respectivement.

    Avec un suivi médian de 20 mois, l’étude est négative concernant son critère de jugement principal : le taux de survie sans maladie invasive à 3 ans est de 42% dans le bras sel de platine, vs 49 % dans le bras capecitabine (HR=1.06-95% RCI, 0.62-1.81). Aucun sous-groupe ne bénéficie des sels de platine. Le taux de survie sans récidive à 3 ans est respectivement de 46% vs 49% (HR= 0.99; 95% CI, 0.67-1.45), et le taux de survie globale à 3 ans de 58% vs 66% respectivement (HR=1.13, 95% CI, 0.71-1.79). Cette tendance est également retrouvée dans le sous-groupe de tumeurs triple négative non basal-like.

    Plus de toxicité.

    Il s’agissait de toxicités connues et habituelles pour ce type de traitement (hématologique, digestives, syndrome main pied, neurodysesthésie….) avec une propension de grade 3-4, principalement hématologique (anémie, leuco neutropénie) majorée dans le groupe sels de platine (26% vs 15%). Les réductions de posologie ont été plus fréquentes dans le bras sels de platine, et 82% des patientes ont réalisées leurs 4 cycles vs 79% des patientes du groupe Capecitabine.

    Au vu de ces résultats, les sels de platines en adjuvant ne semblent pas être leur meilleur positionnement dans cette population et l’utilisation de la Capecitabine reste le standard, avec néanmoins tout dernièrement le positionnement de l’Olaparib qui risque de bien changer les choses…

    Pour pouvoir accéder à cette page, vous devez vous connecter.