Cardiologie

L'intervention valvulaire doit être réalisée chez les patients atteints de cancer

Les patients porteurs d'une valvulopathie et traités pour cancer seraient-ils moins égaux que d'autres? Une étude présentée à l'EACVI 2025 démontrent pourtant qu'une intervention valvulaire réduit de manière spectaculaire la mortalité.

  • mr.suphachai praserdumrongchai ratburana/iStock
  • 17 Décembre 2025
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    L’allongement de l’espérance de vie des patients atteints de cancer, lié aux progrès thérapeutiques récents, s’accompagne d’une augmentation des complications cardiovasculaires, parmi lesquelles les valvulopathies occupent une place croissante. Certaines thérapeutiques anticancéreuses, en particulier les anthracyclines et la radiothérapie thoracique, sont connues pour induire des lésions
    myocardiques et valvulaires tardives. En dépit du phénomène, « Les données probantes sont limitées pour orienter la prise en charge optimale des patients atteints de cancer et présentant une valvulopathie concomitante, a rappelé l’auteur de l’étude, le Dr Maximilian Autherith, de l’Université de médecine de Vienne (Autriche). Par exemple, on ignore si ces patients bénéficient des interventions valvulaires de la même manière que les patients non atteints de cancer ».

    L’étude présentée à l’European Association of Cardiovascular Imaging 2025(EACVI) visait à combler cette lacune en évaluant l’impact des valvulopathies sévères et de leur prise en charge sur la survie de patients atteints de cancer. Il s’agit d’une étude observationnelle monocentrique incluant 10 353 adultes ayant un diagnostic de cancer confirmé et ayant bénéficié d’une échocardiographie transthoracique dans les douze mois. L’âge moyen de la population était de 66,2 ans et près de la moitié des patients étaient des femmes.

    Une valvulopathie sévère associée à un cancer dans 7,2%  des cas.

    Les chercheurs ont constaté que 7,2 % des patients présentaient une valvulopathie sévère, principalement une insuffisance tricuspidienne (3,7 %), une insuffisance mitrale (2,6 %) et un rétrécissement aortique (2,2 %). Après ajustement pour l'âge, le sexe, les taux de biomarqueurs cardiaques, la fonction rénale et la fonction ventriculaire gauche, une valvulopathie sévère s'est
    avérée être un facteur prédictif indépendant d'une mortalité accrue (risque relatif ajusté [RR] : 1,46 ;intervalle de confiance [IC] à 95 % : 1,25–1,71) et d'une mortalité cardiovasculaire (RR ajusté : 2,62 ;IC à 95 % : 2,00–3,43). Parmi les patients atteints d'une valvulopathie sévère, 21,5 % ont bénéficié d'une intervention chirurgicale ou par cathétérisme.

    Une réduction de la mortalité de 72%

    Résultat majeur, une intervention valvulaire était associée de manière indépendante à une meilleure survie par rapport à l'absence d'intervention valvulaire. Ce qui a entraîné une réduction de la mortalité de 72 % (HR ajusté 0,28 ; IC à 95 % 0,09–0,87) après un suivi médian de 23 mois.  
    Ces données suggèrent que, chez des patients soigneusement sélectionnés, les interventions valvulaires peuvent modifier favorablement le pronostic, y compris dans un contexte oncologique souvent perçu comme limitant.

    Sur le plan clinique, ces résultats renforcent l’idée que les valvulopathies chez les patients atteints de cancer ne doivent ni être sous-diagnostiquées ni considérées comme un simple marqueur de fragilité irréversible. Ils plaident pour une surveillance cardio-oncologique plus systématique, intégrant l’évaluation valvulaire dans le suivi des patients à risque, en particulier ceux exposés à des
    traitements cardiotoxiques ou ayant bénéficié d’une irradiation médiastinale. Ils soulignent également la nécessité d’une réflexion multidisciplinaire associant cardiologues, oncologues et spécialistes des interventions valvulaires afin d’évaluer de manière individualisée le rapport bénéfice-risque d’une prise en charge interventionnelle.

    Cette étude présente néanmoins certaines limites, liées à son caractère observationnel et monocentrique, ainsi qu’à une possible surreprésentation de patients adressés pour suspicion clinique. L’absence de données détaillées sur les types de cancers, leur stade ou les traitements oncologiques spécifiques constitue également une limite à l’interprétation.

    En conclusion, les données présentées à l’EACVI 2025 montrent que les valvulopathies sévères sont fréquentes chez les patients atteints de cancer et qu’elles sont associées à une mortalité accrue. Les interventions valvulaires apparaissent toutefois associées à une amélioration significative de la survie, suggérant qu’elles ne devraient pas être écartées a priori dans cette population. Ces résultats renforcent le rôle central de la cardio-oncologie dans l’optimisation du pronostic global des patients cancéreux.

     

     

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