Glycocalyx
Et si le vieillissement du cerveau était une question de sucre ?
Une chercheuse a découvert que le glycocalyx, des molécules de sucres qui protègent les vaisseaux sanguins du cerveau, se dégrade avec l’âge et contribue à la neurodégénérescence. Mais ce n’est pas forcément irréversible.

- Par Stanislas Deve
- Commenting
- Liliia Bila / istock
La clé du vieillissement cérébral pourrait peut-être bien se cacher... dans le sucre. Longtemps ignoré, le glycocalyx, "une 'forêt' complexe" de molécules de glucides tapissant les vaisseaux sanguins du cerveau, pourrait détenir la clé de la prévention des maladies neurodégénératives. C’est en tout cas le pari de la docteure Sophia Shi, chercheuse à Harvard, qui publie une découverte majeure dans la revue Nature : la restauration du glycocalyx chez des souris âgées permet d’améliorer la barrière hémato-encéphalique (qui protège le cerveau des agents pathogènes et des toxines circulant dans le sang) et donc les fonctions cognitives.
Une "forêt" de sucre protectrice
"Le glycocalyx agit comme un bouclier protecteur pour les vaisseaux sanguins du cerveau", explique Dre Sophia Shi dans une interview à Brain Medicine. Avec l’âge, ce revêtement complexe se dégrade, entraînant une neuro-inflammation et une fragilisation de la barrière hémato-encéphalique, ce qui ouvre la voie à un déclin cognitif et des pathologies comme Alzheimer.Or, en restaurant certaines molécules de sucre chez des souris âgées, Sophia Shi a non seulement consolidé cette barrière, mais aussi réduit les signes de neurodégénérescence. C’est "la première fois que des scientifiques réussissent à inverser le dysfonctionnement de la barrière hémato-encéphalique lié à l'âge par la restauration du glycocalyx", selon un communiqué.
Cette stratégie marque une rupture avec les approches classiques des neurosciences. "Voir la barrière hémato-encéphalique comme une interface dynamique recouverte de sucre représente un changement de paradigme." Plutôt que de cibler les symptômes, cette approche s’attaque à l’origine du problème : "la détérioration progressive de l’interface vasculaire du cerveau". "Ces modifications comme la glycosylation [l’ajout de sucres sur les protéines des cellules] ont été trop longtemps sous-étudiées", affirme la chercheuse.
Un futur traitement contre Alzheimer ?
Cette perspective ouvre une voie thérapeutique novatrice, non plus basée sur le traitement des symptômes, mais sur la préservation d’un équilibre physiologique essentiel. Cette percée suscite encore de nombreuses interrogations : peut-on préserver le glycocalyx pour retarder la neurodégénérescence ? Quels rôles jouent l’environnement et les gènes dans son altération ? Et surtout, peut-on développer des médicaments ciblant directement ces structures sucrées ? "Si on restaure le glycocalyx, on pourrait maintenir le cerveau en bonne santé plus longtemps", espère Dre Shi.