Pneumologie

Tuberculose pulmonaire latente : Qui ? Quand ? Comment ?

Le dépistage et le traitement préventif de la tuberculose latente pour éviter la transformation en tuberculose active est une question encore ouverte pour détermine avec précision à quelle population s’adresser et évaluer le rapport bénéfices/risques des différents protocoles de traitements possibles. Une étude apporte une réponse partielle.  D’après un entretien avec Fatma TRITAR.

  • 10 Aoû 2023
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    Une étude, dont les résultats sont parus en mai 2023 dans le JAMA, a fait le point sur l’avantage et la précision du dépistage de la tuberculose latente et sur le rapport bénéfices/risques des différents protocoles de traitements évitant une transformation en tuberculose active. Pour cela, les auteurs ont réalisé une revue de la littérature avec méta-analyse, s’étalant de janvier 2015 à janvier 2023. Les études ont été sélectionnées par deux enquêteurs qui  les ont indépendamment examinées. Leur objectif était de répondre aux cinq questions suivantes : quel est l’avantage du dépistage de la tuberculose latente ? dans quelle mesure ce dépistage est-il précis et fiable ? quels sont les avantages du traitement de la tuberculose latente ? quels sont les inconvénients associés au dépistage ? quels sont les inconvénients associés au traitement ? Les auteurs ont inclus, au total, 113 publications.

     

    Un travail séduisant mais limité en terme de population à risque

    Le professeur Fatma TRITAR estime que ce travail, réalisé avec une bonne méthodologie,  est attractif et pertinent en raison de son objectif précis de positionnement sur l’intérêt du  dépistage et du traitement des tuberculoses latentes.  Toutefois, elle souligne que les auteurs n’ont sélectionné que les publications concernant un seul type de population à risque, à savoir les patients toxicomanes, en situation précaire ou sans domicile fixe, les détenus et les patients issus d’une zone de forte endémicité. Elle regrette que les patients en contact étroit avec des sujets tuberculeux, les patients infectés par le VIH, atteints d’un cancer ou transplantés n’ait pas été évalués dans cette étude. Fatma TRITAR précise que les auteurs ont tenu compte de l’évolution des tests de dépistage sur la durée de l’étude, qui s’étale sur 7 ans, puisqu’ils ont observé les tests cutané à la tuberculine et les tests de libération d’interféron gamma. De plus, les seuils de positivité de l’IDR ont été considérés comme positifs de manière différentes (3, 10 ou  15 mm) selon les pays, ce qui lui semble très pertinent. La sensibilité et la spécificité des deux types de test est satisfaisante mais aucune étude n’a été éligible pour répondre à la question sur l’avantage du dépistage, ce qui peut laisser sceptique…

     

    Bénéfices /risques du traitement ? Quels protocoles ?

    Fatma TRITAR fait le point sur les protocoles de traitement possibles de la tuberculose latente. Le premier protocole est constitué d’une prise d’isoniazide de 300mg par jour pendant 6 mois. Ce protocole a le meilleur résultat de risque relatif de développer une tuberculose active puisqu’il est de 0,35. Son principal inconvénient réside dans son hépatotoxicité dont le risque relatif de 4,59 est important. Le deuxième protocole comporte la prise de rifampicine seule pendant 4 mois. Deux essais ont montré que ce protocole, aujourd’hui recommandé, est aussi efficace que l’isoniazide seule, avec moins d’hépatotoxicité. Enfin, le troisième protocole comporte une prise hebdomadaire de rifampicine et une prise quotidienne d’isoniazide pendant 3 mois. Le risque de développer une tuberculose active avec ce protocole est le même qu’avec l’isoniazide seul pendant 9 mois. Fatma TRITAR relève également que les auteurs ont montré que l’abandon du traitement en cours de route était plus important plus les durées de traitements étaient longues, ce qui est certainement lié au fait que ces patients sont asymptomatiques. Dans l’ensemble, les taux de mortalité et de morbidité étaient très faibles pour les trois protocoles. Toutefois, Fatma TRITAR remarque, qu’au total, seulement 6 publications relatent le rapport bénéfices/risques du traitement préventif de la tuberculose latente.

     

    En conclusion, cette étude est intéressante car elle démontre la sensibilité et la spécificité des tests de dépistage de la tuberculose latente et la non-infériorité, reconnue par l’OMS, du schéma de traitement par rifampicine par rapport à l’isoniazide, avec moins d’hépatotoxicité. La principale limite de ce travail reste l’absence de conclusion sur les avantages et inconvénients du dépistage de la tuberculose latente….

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    JDF