Diabétologie
Obésité : une nouvelle incrétine en alternative à la chirurgie bariatrique
Des patients obèses prenant une nouvelle incrétine auraient perdu près de 25 kilos en moyenne, selon des données qui n'ont pas encore été évaluées par des pairs ni publiées. Mais ce médicament, et les prochains, pourrait devenir une vraie alternative à la chirurgie bariatrique.
- cesar fernandez dominguez/istock
Le tirzépatide est un nouvel agoniste expérimental des récepteurs du GIP (polypeptide insulinotrope dépendant du glucose) et du GLP-1 (peptide de type glucagon-1) en une prise hebdomadaire. Cette nouvelle incrétine deviendrait le premier médicament expérimental à permettre une perte de poids de plus de 20% en moyenne dans une étude de phase 3 randomisée. Le tirzépatide, en prise hebdomadaire, ne serait que le premier représentant une nouvelle classe de médicaments qui risquent de rendre la chirurgie bariatrique obsolète dans le traitement de l'obésité. La perte de poids moyenne obtenues serait supérieure à celle obtenue sous semaglutide.
Le régime alimentaire et l'exercice physique, associés aux médicaments précédemment disponibles contre l'obésité, permettent généralement aux patients de perdre 10% environ de leur poids, ce qui est suffisant pour améliorer leur santé, mais pas assez pour faire une grande différence dans leur vie. Le seul traitement disponible qui change la vie des obèses est la chirurgie bariatrique, avec une perte de poids substantielle (une trentaine de kilos), mais de nombreuses personnes ne sont pas éligibles ou ne veulent pas de chirurgie, et la perte n’est pas toujours durable.
Une étude multicentrique randomisée versus placebo de 72 semaines
Le tirzépatide a été testé versus placebo à la dose de 5 mg, 10 mg et 15 mg par semaine et a permis une perte de poids supérieure à celle du placebo après 72 semaines de traitement selon les premiers résultats de l'essai clinique SURMOUNT-1 annoncés par Eli Lilly (pas encore de publication revue par les pairs), les participants ayant perdu jusqu'à 22,5% (24 kg) de leur poids corporel lors de l'estimation de l'efficacité.
Cette étude multicentrique de phase 3, randomisée en double-aveugle, versus placebo, a recruté 2 539 participants et c’est le premier essai international d'enregistrement de phase 3 évaluant l'efficacité et la sécurité du tirzépatide chez des adultes souffrant d'obésité, ou de surpoids avec au moins une comorbidité, et ne souffrant pas de diabète. Tous les patients ont reçu des conseils en matière de régime alimentaire afin de réduire leur apport calorique d'environ 500 calories par jour.
Le tirzépatide a atteint les deux critères d'évaluation co-primaires, à savoir un pourcentage moyen supérieur de changement de poids corporel par rapport à la valeur à l’inclusion et un pourcentage plus élevé de participants atteignant une réduction de poids corporel d'au moins 5% par rapport au placebo. L'étude a également atteint tous les principaux critères d'évaluation secondaires à 72 semaines.
Perte de poids du même ordre que la chirurgie bariatrique
Le poids corporel moyen des participants était de 105 kg à l’inclusion. Les participants qui ont pris le tirzépatide auraient obtenu des réductions de poids moyennes de 16,0% (16 kg) à la dose hebdomadaire de 5 mg, 21,4% (22 kg) à 10 mg et 22,5% (24 kg) à 15 mg, comparativement au placebo (2,4% ou 2 kg). De plus, 89% (5 mg) et 96% (10 mg et 15 mg) des personnes prenant le tirzépatide auraient atteint une réduction du poids corporel d'au moins 5%, contre 28% des personnes sous placebo.
Sur un critère d'évaluation secondaire clé, 55% des patients à la dose de 10 mg et 63% de ceux prenant la dose de 15 mg de tirzépatide atteindraient une réduction du poids corporel d'au moins 20%, contre 1,3% des personnes sous placebo. Sur un autre critère d'évaluation secondaire, 32% des participants prenant le tirzépatide à la dose de 5 mg auraient atteint une réduction du poids corporel d'au moins 20%.
Le pourcentage de participants ayant atteint des réductions de poids corporel d’au moins 20% serait de 30% pour la dose de 5 mg, 50% pour la dose de 10 mg et 57% pour la dose de 15 mg, contre 3,1% sous placebo.
Une tolérance habituelle aux incrétines
Le profil global de sécurité et de tolérance du tirzépatide serait similaire à celui des autres traitements par les incrétines approuvées ailleurs pour le traitement de l'obésité. Les effets indésirables les plus fréquemment rapportés seraient gastro-intestinaux et seraient globalement d'intensité légère à modérée, survenant habituellement pendant la période de titration de la dose. Chez les patients traités par le tirzépatide 5, 10 et 15 mg, respectivement, on rapporterait des nausées (24,6%, 33,3%, 31,0%), une diarrhée (18,7%, 21,2%, 23,0%), des vomissements (8,3%, 10,7%, 12,2%) et une constipation (16,8%, 17,1%, 11,7%) plus fréquemment par rapport au placebo (nausées 9,5%, diarrhée 7,3%, vomissements 1,7%, constipation 5,8 %).
Les taux d'interruption du traitement pour effets indésirables seraient de 4,3% à la dose de 5 mg, 7,1% à 10 mg, 6,2% à 15 mg et 2,6% sous placebo. Les taux globaux d'abandon du traitement seraient de 14,3% à 5 mg, 16,4% à 10 mg, 15,1% à 15 mg et 26,4% sous placebo).
La durabilité de l’effet et le prix en question
Les participants qui avaient un pré-diabète au début de l'étude, resteront dans un suivi de l'étude SURMOUNT-1 jusqu’à 104 semaines de traitement supplémentaires (après la date d'achèvement initiale de 72 semaines) afin d'évaluer la durabilité de l’effet du tirzépatide en prise hebdomadaire sur le poids et des différences potentielles de progression vers un diabète de type 2 après trois ans de traitement par le tirzépatide par rapport au placebo.
Les incrétines sont des hormones naturelles qui ralentissent la vidange de l'estomac, régulent l'insuline et diminuent l'appétit. Les effets secondaires comprennent des nausées, des vomissements et des diarrhées, mais la plupart des patients tolèrent ces effets ou n'en sont pas gênés. Les incrétines placent donc la barre plus haut en ce qui concerne le type de perte de poids atteignable avec des médicaments et posent la question de leur place par rapport à la chirurgie bariatrique. De nouvelles versions d’incrétines seraient déjà en cours de développement et pourraient être encore plus puissantes que le tirzepatide. Reste la question du prix de ce traitement et de son coût sur le long terme car le semaglutide est, par exemple, commercialisé à plus de 1000 dollars par mois aux États-Unis…











