Onco-Sein
Cancer de l'ovaire en récidive platine sensible : bénéfice de la CHIP (essai CHIPOR)
Les résultats de l’essai CHIPOR confirment que l’HIPEC, combinée à une chirurgie de cytoréduction, offre un bénéfice significatif en termes de survie globale pour les patientes en récidive péritonéale platine sensible, avec une toxicité maîtrisable.
- Gumpanat/iStock
L'évolution péritonéale est le site le plus fréquent de récidive des cancers de l’ovaire, avec une évolution le plus souvent symptomatique et pouvant impacter le pronostic vital. Des approches de chimiothérapie intraperitonéale ont été développées dans ce contexte. La chimiothérapie intrapéritonéale hyperthermique (HIPEC / CHIP) est une procédure per-opératoire qui délivre la chimiothérapie chauffée directement dans la cavité abdominale après une chirurgie cytoréductive, l'objectif étant de traiter la maladie résiduelle microscopique et d'améliorer la pénétration de la chimiothérapie. Bien que l'HIPEC ait montré des bénéfices dans le traitement du cancer de l'ovaire avancé dans certaines études, son efficacité dans les récidives reste incertaine.
CHIPOR, un essai randomisé de phase III
Cet essai a inclus 517 patientes présentant une récidive péritonéale, platine sensible, d’un cancer de l'ovaire. Les patientes bénéficiaient de 6 cycles d'un doublet de chimiothérapie avec platine. Une chirurgie de cytoréduction, si considérée comme réalisable par le chirurgien, était réalisée dans les suites. Les patientes étaient randomisées, en fin de procédure, dans un bras HIPEC (207 patientes) ou dans un bras sans HIPEC (208 patientes). La majorité des patientes présentait une maladie hautement chimio-sensible (intervalle sans platine supérieur à 18 mois pour presque 50 % des patientes, histologie de type séreux de haut grade pour 3/4 des patientes, mutation BRCA pour 1/4), ceci s'explique probablement par le fait que seules les patientes avec un résidu inférieur à 0,25 cm étaient randomisées. Ces caractéristiques ont contribué à un taux de résection complète (CC0) de 87 %, supérieur à celui observé dans d'autres essais randomisés similaires.
L’HIPEC améliore la survie globale avec une toxicité acceptable
Après un suivi médian de 6,2 ans, l'HIPEC a montré un bénéfice significatif en survie globale, avec une survie médiane de 54,3 mois dans le groupe HIPEC versus 45,8 mois dans le groupe sans HIPEC, HR à 0,73 (IC 95 % 0,56–0,96). La survie sans progression a été améliorée dans le bras HIPEC, en particulier la survie sans progression péritonéale, avec une médiane de 10,2 mois versus 9,5 mois pour le bras sans HIPEC (HR 0,79, IC à 95 % 0,63–0,99).
Ce bénéfice est indépendent du sous-type histologique, de l'âge, du PCI médian, ou de la durée sans sel de platine, et semble d'autant plus important que la chirurgie est CC1. À l'inverse, les patientes mutées BRCA ne semblent pas bénéficier de l’HIPEC, probablement en raison de la petite taille de l’échantillon et de l'arrivée des inhibiteurs de PARP, largement utilisés après 2018.
Les patientes traitées par HIPEC ont présenté davantage d’effets secondaire de grade supérieur ou égal à 3 en particulier au niveau rénal (10 % vs 1 % dans le groupe sans HIPEC) et anémie. L’utilisation du thiosulfate en prophylactique a cependant permis de réduire cette toxicité rénale. On note également une admission en unité de soins intensifs plus fréquente dans le bras HIPEC (69 % versus 44 %), bien que cela puisse être attribué aux pratiques standard de précaution des centres chirurgicaux et un taux de stomie préventive plus important dans le bras HIPEC (32 % versus 19 %), témoin d'une possible attitude plus prudente en regard du risque de fistule en cas de chimiothérapie intrapéritoneale. L'HIPEC n'a cependant pas impacté les scores de qualité de vie ou de douleur.
Quelle place de l'HIPEC dans le paysage actuel ?
L'HIPEC améliore les données de survie chez les patientes en récidive péritonéale platine sensible, est doit ainsi être considérée dans la prise en charge de ces patientes.
L'évolution des pratiques cliniques depuis la mise en place de l'essai CHIPOR, avec les résultats de l'essai DESKTOP3, montrant un bénéfice d'une chirurgie de cytoreduction à la récidive mais avant chimiothérapie, le large développement des PARPi et de la biologie moléculaire, rend néanmoins l'application de ces résultats plus difficiles dans le contexte actuel. Les récents résultats de l’essai HORSE avec chirurgie a la récidive +/- HIPEC puis chimiothérapie n’ont pas montré de bénéfice de l’HIPEC avec néanmoins une population très sélectionnée. Des analyses complémentaires avec l'évaluation du score KELIM et des données de biologie moléculaire chez ces patientes permettront peut-être d'identifier la population tirant le plus grand bénéfice de l'HIPEC.











