cardiologie
HTA, les femmes françaises diabétiques moins bien prises en charge que les hommes.
Le biais sexiste n’épargne pas la médecine, notamment en cardiologie. Une étude française en
apporte une nouvelle preuve en comparant les ordonnances dans le champ de l’HTA.
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Plusieurs études françaises ont depuis longtemps documenté un biais sexiste dans la prise en charge
notamment en cardiologie. Citons Les équipes françaises engagées dans les registres MINAP/FAST-MI
qui ont démontré un retard au diagnostic, à la réalisation de l’ECG, à l’initiation des traitements de
reperfusion. Les femmes jeunes âgés de moins de 55 ans en France ont ainsi une mortalité
hospitalière supérieure dans les SCA ST+, principalement en raison d’un retard de prise en charge.
Une étude française publiée dans le British Medical Journal apporte une nouvelle pierre à l’édifice
(Les femmes hypertendues atteintes de diabète de type 2 sont-elles traitées par inhibiteurs du SRAA
aussi fréquemment que les hommes ? Une étude transversale en France, 7 décembre 2025).
La prise en charge de l’hypertension artérielle chez les personnes vivant avec un diabète de type 2
repose en effet sur des recommandations claires : les inhibiteurs du système
rénine–angiotensine–aldostérone (SRAA), qu’il s’agisse d’IEC ou d’ARA2, doivent être privilégiés en
première intention, en particulier en présence d’une atteinte rénale ou cardiovasculaire. Pourtant,
malgré ce cadre thérapeutique bien établi, plusieurs travaux internationaux et français ont suggéré
l’existence d’écarts de prescription selon le sexe, au détriment des femmes.
LES IEC ET LES ARA 2 MOINS SOUVENT PRESCRITS CHEZ LES FEMMES
L’étude transversale française apporte un éclairage précis sur cette question.
L’analyse a porté sur une large population d’adultes suivis pour diabète de type 2 et présentant une
hypertension avérée ou traitée. Les chercheurs se sont attachés à comparer la fréquence de
prescription d’un inhibiteur du SRAA chez les femmes et chez les hommes, tout en tenant compte
des paramètres cliniques pertinents : âge, comorbidités cardiovasculaires, atteinte rénale, nombre
de médicaments antihypertenseurs, contrôle glycémique et pression artérielle. L’objectif était de
déterminer si, à profil clinique comparable, le recours aux inhibiteurs du SRAA restait équivalent
entre les deux sexes ou s’il existait une différence injustifiée.
Parmi les 2 541 diabétiques, 1 742 (68,6 %) avaient reçu au moins un traitement antihypertenseur au
cours de l’année précédant leur inclusion. Ce pourcentage ne différait pas significativement entre les
hommes et les femmes (p = 0,07). Dans les analyses stratifiées selon le nombre de classes
d’antihypertenseurs, les inhibiteurs du SRAA étaient prescrits significativement moins souvent aux
femmes qu’aux hommes, que ce soit en monothérapie (OR 0,46, IC à 95 % : 0,25 à 0,81 ; p = 0,008)
ou en bithérapie (0,35, IC à 95 % : 0,16 à 0,75 ; p = 0,007), mais pas en trithérapie ou en polythérapie
(0,29, IC à 95 % : 0,05 à 1,56 ; p = 0,15). Dans l’analyse multivariée, les femmes ont reçu des
inhibiteurs du RAS beaucoup moins souvent que les hommes (0,41, IC à 95 % 0,27 à 0,62 ; p < 0,001).
Cet écart persiste même après ajustement sur l’ensemble des facteurs cliniques mesurés. Autrement
dit, à gravité équivalente et en l’absence de contre-indication identifiable, les femmes sont
proportionnellement moins souvent traitées par IEC ou ARA2. Cette différence de traitement
n’apparaît donc pas liée au profil physiologique, mais plutôt à un biais de prise en charge. À noter
que les femmes incluses dans l’étude étaient en moyenne légèrement plus âgées. Mais cette variable
n’expliquait pas l’écart de prescription après ajustement statistique. Les auteurs soulignent également que les paramètres tensionnels et rénaux ne justifiaient pas non plus la moindre utilisation des inhibiteurs du SRAA chez les patientes.
Perception erronée d’un risque moindre chez les femmes.
Les conséquences d’une telle disparité sont potentiellement significatives. Les inhibiteurs du SRAA
constituent en effet un pilier de la prévention des complications cardiovasculaires et rénales chez les
personnes diabétiques. Une sous-prescription chez les femmes peut être à l’origine d’une protection
cardiovasculaire insuffisante, alors même que la mortalité cardiovasculaire chez les femmes
diabétiques rattrape, voire dépasse parfois celle observée chez les hommes. L’étude rappelle qu’en
France, comme dans d’autres pays, les femmes diabétiques présentent souvent un risque
cardiovasculaire sous-estimé. Ce qui peut conduire à des niveaux de traitement moins intensifs, tant
en cardiologie qu’en diabétologie.
L’étude s’interroge également sur les raisons possibles de cette différence. Plusieurs hypothèses sont
avancées : perception clinique erronée d’un risque moindre chez les femmes, préoccupation
disproportionnée autour des effets indésirables hormonaux ou liés à la grossesse même en âge non
fertile, ou encore inertie thérapeutique plus fréquente dans la prise en charge des patientes
diabétiques. Les auteurs insistent sur le fait que rien, dans les recommandations françaises ou
internationales, ne justifie une stratégie thérapeutique différenciée entre hommes et femmes pour
la prescription d’inhibiteurs du SRAA en cas de diabète de type 2 associé à une hypertension.
En conclusion, cette étude française met en lumière un écart de prise en charge persistant et
préoccupant
Ces résultats appellent à une vigilance accrue dans l’évaluation du risque cardiovasculaire chez les
femmes diabétiques, souvent sous-diagnostiqué ou sous-traité. Une action ciblée pourrait permettre
d’améliorer significativement la prévention cardiovasculaire dans cette population à haut risque, en
corrigeant un biais de prescription qui semble encore trop ancré dans la pratique quotidhta











