Cerveau

Consulter son téléphone en mangeant, c’est une mauvaise idée !

La distraction alimentaire peut altérer la mémoire des repas, qui se fait par neurones de l'hippocampe ventral, et contribuer à la surconsommation.

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  • 12 Aoû 2025
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    "La capacité à coder et à récupérer les informations liées aux repas est essentielle pour guider efficacement l'acquisition et la consommation d'énergie, mais les processus neuronaux sous-jacents restent difficiles à cerner", ont indiqué des chercheurs de l’université de Californie du Sud à Los Angeles (États-Unis). Dans une récente étude, ces derniers ont donc voulu se pencher sur le sujet. Ils ont utilisé des techniques de neurosciences avancées pour observer l'activité cérébrale de rats de laboratoire pendant qu'ils mangeaient, "offrant ainsi la première vision en temps réel de la formation des souvenirs de repas."

    Des "engrammes alimentaires" se forment entre les bouchées

    L’équipe a découvert des neurones de la "mémoire des repas" chez les animaux. Lors des repas, les neurones de l'hippocampe ventral s'activent et forment des "engrammes alimentaires", des traces mnésiques, durant de brèves pauses entre les bouchées. Ces moments de conscience permettent aux neurones hippocampiques spécialisés d'intégrer plusieurs flux d'informations sur l'expérience de la consommation alimentaire. "Un engramme est la trace physique qu'un souvenir laisse dans le cerveau. Les engrammes alimentaires fonctionnent comme des bases de données biologiques sophistiquées qui stockent de multiples informations, telles que le lieu et l'heure du repas", a expliqué Scott Kanoski, qui a dirigé les travaux.

    Une connexion hippocampe-hypothalamus bloquée provoque la surconsommation alimentaire

    D’après les résultats, publiés dans la revue Nature Communications, les neurones de la mémoire des repas sont différents des cellules cérébrales impliquées dans d'autres types de formation de la mémoire. En effet, lorsque les auteurs les ont ciblés et détruits, les rats ont montré une mémoire altérée pour la localisation des aliments, mais ont conservé une mémoire spatiale normale pour les tâches non liées à l'alimentation. Les scientifiques ont observé que les neurones de la mémoire des repas communiquaient avec l'hypothalamus latéral, une région cérébrale contrôlant la faim et le comportement alimentaire. Quand cette connexion hippocampe-hypothalamus était bloquée, les rongeurs mangeaient trop et ne se souvenaient plus où ils avaient mangé.

    "Se souvenir de ce que l'on a mangé et du moment où on l'a mangé est crucial"

    Les chercheurs supposent que le cerveau humain subirait un phénomène similaire. Lorsque l'attention d'une personne est focalisée ailleurs, par exemple sur un écran de téléphone ou de télévision, les moments d'encodage sont compromis. "Le cerveau ne parvient pas à cataloguer correctement l'expérience du repas, ce qui entraîne des engrammes alimentaires faibles ou incomplets" et incite à manger davantage. "Nous commençons enfin à comprendre que se souvenir de ce que l'on a mangé et du moment où on l'a mangé est tout aussi crucial pour une alimentation saine que les choix alimentaires eux-mêmes", a déclaré Scott Kanoski.

    Dans leurs conclusions, ils précisent que cette découverte est importante pour la compréhension des troubles alimentaires chez l’Homme. "Les patients souffrant de troubles de la mémoire, comme ceux atteints de démence ou de lésions cérébrales affectant la formation de la mémoire, consomment souvent plusieurs repas à la suite, faute de se souvenir d'avoir mangé." En outre, l’équipe estime que ces données pourraient à terme éclairer de nouvelles approches cliniques pour le traitement de l'obésité et la gestion du poids. 

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    JDF