Oncologie
Dépistage du cancer du sein : la polémique est relancée
Une étude parue dans le NEJM basée sur la taille des tumeurs diagnostiquées par la mammographie de dépistage, confirme le surdiagnostic lié à cet examen, mais sa méthodologie laisse à désirer.
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Et dans un contexte d’octobre rose, l’annonce la semaine dernière d’une rénovation du dépistage du cancer sein d’ici la fin de l’année en réjouit beaucoup, ceux-la même qui avaient accueilli la concertation citoyenne et scientifique lancée en octobre dernier par l’Institut national du cancer avec enthousiasme.
Une nouvelle étude
Dernier épisode, la sortie mi-octobre dans le NEJM, d’une vaste étude sur le bénéfice contestable de la mammographie, cette fois-ci basée sur la taille des tumeurs dépistées. Elle conclut que la diminution de mortalité observée dans le cancer du sein depuis une dizaine d’années serait liée essentiellement à l’amélioration de l’efficacité des traitements et pas à la mammographie de dépistage. Cette nouvelle étude apaisera-t-elle la polémique ? Sans doute pas, vu que sa méthodologie n’est pas dénuée de tout reproche. .
Avant d'entrer dans les détails de l'étude, il faut savoir cependant que le premier auteur de cette étude, Gilbert Welch, épidémiologiste américain connu, avait déjà publié dans le JAMA une étude négative sur le dépistage en se focalisant les sur-diagnostic. Elle avait déjà fait beaucoup de bruit et d'oposants; c’était en 2012. Aujourd'hui, ce même auteur présente une nouvelle étude dans le NEJM.
L’étude porte sur le volume tumoral et la recherche d’une taille critique qui conduirait à la survenue de métastases et de décès. La population incluse est la même qu’en 2012 : c'est la population SEER qui permet de recueillir des données épidémiologiques d’une dizaine de centres aux Etats-Unis.
Moins de grosses tumeurs, plus de petites
Les résultats montrent que la proportion des tumeurs de moins de 2 cm qui sont aujourd'hui les tumeurs de meilleur pronostic ou celle des carcinomes in situ, a augmenté : elle est passée de 36% pendant la période 1975-79 à 68% dans la période plus récente. Et à l'inverse le pourcentage de tumeurs plus volumineuses, au-delà de 2 cm, est passé de 64% à 32%. Des résultats qui paraissent positifs, mais les auteurs considèrent que ces petites tumeurs retrouvées en grand nombre ne sont pas de vraies tumeurs agressives, mais des tumeurs de sur-diagnostic.
Donc les auteurs arrivent à la même conclusion que celle de leur précédente étude à savoir que la mammographie avait engendré plus de 30% de surdiagnostic. Le hic, c’est que la méthode employée dans cette nouvelle étude n’est pas dénuée de biais, selon Corine Balleyguier, chef du service de radiologie à l’Institut Gustave Roussy de Villejuif:" Les auteurs se basent sur le fait que l'incidence du cancer est stable dans le temps, alors qu’on sait maintenant qu’il y a une augmentation de son incidence depuis 1940 qui est de 1,3% par an. Ils concluent donc que tous les cancers dépistés en trop par rapport à une incidence normale, sont liés à la mammographie qui les dépiste "en trop".

Une autre critique importante à faire vis-à-vis de cette étude, est que les auteurs considèrent qu’il n’y a pas eu ou très peu de mammographies entre 1975 et 1979. Or le fait que les femmes du président et du vice-président de l'époque aient eu un cancer, a créé une recrudescence des mammographies, recrudescence dont les auteurs n’ont pas tenu compte dans leurs résultats.
Surdiagnostic de 10% ou 30%
Mais il est difficile de le nier, aujourd'hui, la mammographie de dépistage génère du sur-diagnostic qui a été évalué dans différentes études. L'une d'entre elles, anglaise avec Marmott, a montré que la mammographe permettait de baisser la mortalité par cancer du sein d'au moins 20 % et que le surdiagnostic était chiffré à 10%. Mais pour avoir une idée réelle de ce surdiagnostic, il faut faire des études sur au moins 30 ans. Un essai suédois, actualisé en 2015 sur des patientes dépistées dans les années 1980 et toujours suivies aujourd'hui, avait obtenu ce taux de surdiagnostic de 10%.
Alors 10 ou 30% de surdiagnostic lié à la mammographie de dépistage? Difficile de le dire après cette étude qui ne fait pas vraiment avancer le débat, puisqu'elle n'a pas permis d’obtenir le consensus scientifique dont on avait besoin, sa méthodologie se basant sur des données qui sonrt fausses, ...même si elle est publiée dans une revue prestigieuse!









