Onco-Sein
Cancer du sein à haut risque ER+/HER2- : identification des patientes avec un faible taux de rechute
Un nouvel outil clinicopathologique permet d’identifier chez des patientes avec un cancer du sein ER+ / HER2− à haut risque, un sous-groupe qui conserve un excellent pronostic ouvrant la voie à une désescalade thérapeutique personnalisée.
-1761035855.jpg)
- Mohammed Haneefa Nizamudeen/iStock
Depuis les essais monarchE et NATALEE, il est recommandé d’ajouter un inhibiteur de CDK4/6 à l’hormonothérapie, après chimiothérapie adjuvante, chez les patientes atteintes d’un cancer du sein précoce à haut risque ER+ / HER2−. Cependant, une proportion importante de ces patientes ne tire probablement pas de bénéfice de cette intensification, puisque 60 % d’entre elles restaient exemptes de métastases à distance à 20 ans, avant l’arrivée des inhibiteurs de CDK4/6.
L’objectif de cette étude est donc de développer et valider un test pronostique clinicopathologique permettant d’identifier, parmi les patientes à haut risque, celles qui conservent un bon pronostic sous chimiothérapie et hormonothérapie seules, afin d’éviter un surtraitement.
Développement et validation de l’outil
Les chercheurs ont conçu, à partir des données rétrospectives de 6 164 patientes ER+ / HER2− issues de plusieurs cohortes internationales (SCAN-B, METABRIC, TCGA et deux cohortes Gustave Roussy), un outil pronostique combinant 4 variables clinicopathologiques et 10 caractéristiques morphologiques dérivées de l’analyse de lames histologiques de pièce opératoire.
Ce modèle a permis de classer chaque patiente soit dans le groupe « faible risque » (taux de récidive à distance < 5 % à 8 ans), soit dans le groupe « non faible risque ». L’outil a ensuite été validé de manière indépendante et en aveugle chez des patientes à haut risque (selon les critères de l’essai monarchE), issues des cohortes CANTO et UNIRAD (n = 633).
Près de 20 % de patientes avec un excellent pronostic
L’outil a identifié 21,1 % de patientes à faible risque dans la cohorte CANTO et 16,5 % dans la cohorte UNIRAD, soit 19,4 % dans l’analyse combinée. Dans la cohorte CANTO, à 9 ans, 94,7 % des patientes à faible risque étaient indemnes de récidive ou de décès liés au cancer du sein, contre 77,4 % dans le groupe non faible risque (HR pour la DRFI : 0,24 (IC 95 %, 0,09–0,64) ; HR pour l’IDFS : 0,33 (IC 95 %, 0,16–0,68)). Dans la Cohorte UNIRAD, on retrouve une tendance similaire, avec 97,3 % d’événements évités dans le groupe faible risque contre 74,9 %, significativité atteinte uniquement pour l’IDFS (HR : 0,24 ; IC 95 %, 0,06–0,99).
Dans l’analyse combinée, 95,4 % des patientes faible risque n’ont présenté ni récidive à distance ni décès, contre 76,8 % dans le groupe non faible risque. Les différences étaient statistiquement significatives pour le DRFI (HR, 0,21 ; IC 95 %, 0,09–0,52), l’IDFS (HR, 0,31 ; IC 95 %, 0,16–0,60) et l’OS (HR, 0,35 ; IC 95 %, 0,13–0,97). Les résultats sont restés cohérents dans l’ensemble des sous-groupes, y compris chez les patientes préménopausées et postménopausées.
Vers une désescalade thérapeutique personnalisée
Cet outil permet d’identifier de façon fiable un sous-groupe de patientes atteintes d’un cancer du sein ER+ / HER2− à haut risque, mais présentant néanmoins d’excellentes données de survie à long terme après chimiothérapie et hormonothérapie.
Sous réserve de validations prospectives, il pourrait éviter une escalade thérapeutique inutile chez environ une patiente sur cinq, limitant ainsi coûts et toxicités. Bien que son utilité reste à confirmer pour les tumeurs avancées (N3 ou T3), après traitement néoadjuvant ou à partir de biopsies, cet outil simple, robuste et facilement intégrable en pratique clinique offre une perspective prometteuse.