Prostitution

Stress, dépression, violences sexuelles : les travailleuses du sexe en souffrance

Violences sexuelles, stress post-traumatique, troubles du sommeil... Une étude alerte sur la santé dégradée des personnes prostituées en France. Elle appelle à repenser l’accès aux soins et la prise en charge psychologique.

  • FernandoQuevedo / istock
  • 28 Novembre 2025
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    Derrière les actes tarifés, des travailleuses du sexe invisibilisées. Une nouvelle étude menée par le Mouvement du Nid, en partenariat avec l'Inserm et Sorbonne Université, dresse un constat glaçant de la santé des personnes prostituées en France. Cette enquête, baptisée Aspire (Accès aux soins, Santé et Prostitution), alerte sur la dégradation de leur santé mentale et physique, liée à des violences systémiques souvent invisibilisées.

    Des violences omniprésentes et banalisées

    Sur les 258 personnes interrogées dans 30 villes françaises (dont 238 femmes, 12 personnes transgenres et 8 hommes), 95 % affirment avoir été victimes de violences, dont 85 % sexuelles, selon le Mouvement du Nid, qui milite en faveur de l'abolition de la prostitution. Pire : 85 % disent avoir été contraintes à des actes par des clients, et 65 % par des proxénètes. Ce niveau de violence, décrit comme massif, s’accompagne d’une extrême vulnérabilité.

    Hypertension, diabète, maux d’estomac ou encore infections urinaires : 68 % des personnes prostituées interrogées cumulent entre un et six problèmes de santé physique. Mais c’est sur le plan psychologique que les chiffres sont les plus alarmants : 62,5 % présentent des symptômes de stress post-traumatique, un taux bien supérieur à celui de la population générale. Ce n’est pas tout : la moitié souffre de dépression, et 72 % de troubles du sommeil et du comportement alimentaire.

    "Les personnes prostituées ont vraiment une santé physique et mentale détériorée par rapport à la population globale", alerte Fabienne El Khoury, épidémiologiste à l’Inserm. Et pourtant, la prise en charge reste parcellaire, longtemps réduite à la seule santé sexuelle.

    Un accès aux soins semé d’embûches

    Barrière de la langue (96 % sont d’origine étrangère), précarité, peur du jugement, honte ou traumatisme : les obstacles à la santé sont nombreux. Seules 5,5 % des travailleuses et travailleurs du sexe ont consommé des drogues dures, mais 59 % ont subi au moins une interruption volontaire de grossesse (IVG), soit près de trois fois plus que la moyenne nationale.

    L'étude Aspire appelle à une formation spécifique des soignants aux réalités psychotraumatiques liées à la prostitution. "Il faut que les professionnels soient en capacité de lire la situation dans laquelle se trouve la personne", insiste Pauline Spinazze, coordinatrice des travaux. Dissociation, déni et comportements à risque sont autant de signaux à détecter pour proposer un soin adapté. Parmi les recommandations du rapport : renforcer l’accès à l’aide médicale d’Etat, recruter plus de psychologues et créer davantage de centres régionaux du psychotraumatisme.

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