Onco-sein
Cancer du sein RH+ : quel meilleur traitement hormonal chez les patientes non-ménopausées ?
Dans le cancer du sein RH+, les patientes non ménopausées à haut risque semblent le plus bénéficier de la suppression ovarienne, avec alors un bénéfice en survie globale.
- Kostrikina Myroslava/istock
Avec une réduction d’un tiers du risque de décès par cancer du sein, le tamoxifène est l'hormonothérapie adjuvante de référence chez les patientes non ménopausées présentant un cancer du sein RH + localisé (1). Les anti-aromatases sont inefficaces chez ces patientes du fait de la compensation physiologique ovarienne, justifiant alors d’une suppression ovarienne par analogue ou chirurgical pour permettre l’efficacité d’un tel traitement.
La méta-analyse de l’EBCTCG a permis de montrer la supériorité des anti-aromatases par rapport au tamoxifène avec une diminution absolue du risque de récidive à 10 ans de 3,6 % et du risque de décès par cancer du sein de 2,1 % (2).
Qu’en est-il chez la femme non ménopausée ?
Pour répondre à cette question, une nouvelle méta-analyse a été conduite par l’EBCTCG, reprenant 4 essais avec des nuances importantes entre les études. Elle est publiée dans The Lancet Oncology.
L’essai de l’ABCSG XII, le plus ancien, avaient inclus des patients qui pour 94% n’avaient pas reçu de chimiothérapie, donc population plutôt de bas risque, avec une durée de traitement uniquement de 3 ans. Dans les 3 autres essais (SOFT – TEXT et HOBOE), 60% des patientes avaient reçu de la chimiothérapie, population plus proche de notre pratique actuelle, avec une durée de traitement de 5 ans.
Au total, 7030 patientes pré ménopausées, RE+, opérées d’un cancer du sein localisé et traitées par suppression ovarienne plus AI ou tamoxifène ont été inclus dans cette méta-analyse.
Les anti-aromatase, c’est un peu mieux !
Les anti-aromatases réduisent le risque absolu de récidive de 3% à 5 et 10 ans, par rapport au tamoxifène (RR 0.79, IC à 95% 0.69–0.90 ; p=0.0005), bien que ce bénéfice ne se traduise ni en survie spécifique (RR 1.01, IC à 95% 0.82–1.24 ; p=0.94) ni en survie globale (RR 1.04, IC à 95% 0.86–1.27 ; p=0.68).
Néanmoins, le suivi médian n’étant que de 8 ans, avec un taux annuel globalement stable de récidive jusqu’à 20 ans, il est possible qu’un suivi plus long puisse faire apparaitre un bénéfice en survie.
L’effet de ce bénéfice est observé pendant la période de traitement (RR de 0 à 4 ans de 0.68, IC à 99% 0.55–0.85 ; p<0.0001) mais semble disparaitre à l’arrêt du traitement (RR de 5 à 9 ans 0.98, IC à 99% 0.73–1.33 ; p=0.89).
Curieusement, les analyses en sous-groupe montrent, l’absence de bénéfice des anti-aromatases par rapport au tamoxifène pour les tumeurs HER2+ (mais résultat non significatif avec une faible population de patientes HER2+) et de façon plus surprenante chez les patientes avec 4 ou plus ganglions envahis.
Afin de mieux appréhender ces données, une analyse post-hoc a été réalisée uniquement sur la période de traitement (période où la réduction du risque est la plus importante et donc la plus significative), avec des constations similaires. A l’inverse, la même analyse réalisée chez les patientes ménopausées retrouve un bénéfice quel que soit l’envahissement ganglionnaire. Résultat probablement non fiable statistiquement au vu de la multitude des analyses réalisées en sous-groupe.
Alors que choisir ?
Les données de tolérance retrouvent des données connues avec un risque d’ostéoporose et de fracture osseuse plus important chez les patientes traitées par anti-aromatase que par tamoxifène, et des anomalies endométriales plus importantes chez les patientes traitées par tamoxifène. Avec peu d’événements chez ces jeunes femmes, il n’a pas été observé de différence en terme de décès par autre cause.
Il semble néanmoins essentiel de considérer les effets de ce double blocage sur la qualité de vie en regard du bénéfice attendu. L’observance étant également un véritable enjeu dans ces situations.
Avec un recul de 12 ans, l'actualisation des données de SOFT et TEXT montre que les patientes à haut risque (traitées par chimiothérapie néoadjuvante/important envahissement ganglionnaire) semblent bénéficier le plus de la suppression ovarienne, avec alors un bénéfice en survie globale. Ainsi il semble justifié qu’un double blocage doit être proposé à ces patientes à haut risque, avec alors en 1ère intention une anti-aromatase.
Bibliographie :
(1) Early Breast Cancer Trialists' Collaborative Group (EBCTCG), Davies C, Godwin J, Gray R, Clarke M, Cutter D, Darby S, McGale P, Pan HC, Taylor C, Wang YC, Dowsett M, Ingle J, Peto R. Relevance of breast cancer hormone receptors and other factors to the efficacy of adjuvant tamoxifen: patient-level meta-analysis of randomised trials. Lancet. 2011 Aug 27;378(9793):771-84. doi: 10.1016/S0140-6736(11)60993-8. Epub 2011 Jul 28. PMID: 21802721; PMCID: PMC3163848.
(2) Early Breast Cancer Trialists' Collaborative Group (EBCTCG). Aromatase inhibitors versus tamoxifen in early breast cancer: patient-level meta-analysis of the randomised trials. Lancet. 2015 Oct 3;386(10001):1341-1352. doi: 10.1016/S0140-6736(15)61074-1. Epub 2015 Jul 23. PMID: 26211827.








