Gastro-entérologie
Cancer colorectal : intérêt de l’immunothérapie après échec d’une thérapie ciblée
Dans les cancers colorectaux résistants à une thérapie ciblée, le cétuximab, l'immunothérapie pourrait être plus efficace.
- CreVis2/istock
Les malades souffrant d’un cancer colorectal au stade avancé et qui sont devenus résistants à une thérapie ciblée anti-EGFR largement utilisée, le cétuximab, pourraient ensuite bénéficier d'une immunothérapie. C’est ce que révèle une nouvelle étude, publiée dans la revue Cancer Cell, qui amorce un changement dans la compréhension de ces maladies et ouvre la voie à de nouvelles approches thérapeutiques.
La résistance au cétuximab rendrait les tumeurs digestives plus visibles pour le système immunitaire, ce qui les rendrait potentiellement vulnérables aux immunothérapies. Un essai clinique de phase II a déjà commencé pour évaluer les bénéfices possibles de l'immunothérapie chez les patients qui ont cessé de répondre au cétuximab.
Résistance au cétuximab
Le cétuximab est efficace chez certaines personnes atteintes d'un cancer de l'intestin avancé, mais le traitement ne fonctionne que chez environ la moitié des patients, et la plupart d'entre eux cessent éventuellement de répondre lorsque leur cancer devient résistant. Une fois que les tumeurs intestinales deviennent résistantes au cétuximab, les patients ont très peu d'options thérapeutiques, et de nouveaux traitements sont donc nécessaires.
Les chercheurs ont étudié des échantillons de tumeurs provenant de 35 personnes atteintes d'un cancer de l'intestin avancé qui ont été traitées dans le cadre d'un essai clinique sur le cétuximab.
Plusieurs causes de résistance
L’étude offre un tableau détaillé des nombreuses façons dont les cancers intestinaux peuvent échapper au cétuximab, soit dès le début, soit par l'acquisition de résistances. Étonnamment, les chercheurs n'ont pu objectiver des changements génétiques qui pourraient expliquer le développement de la résistance aux cétuximab que dans 36 % des tumeurs étudiées.
Mais chez cinq patients sur sept, qui avaient cessé de répondre au cétuximab, les tumeurs sont devenues fortement infiltrées par des cellules non cancéreuses provenant de tissus de soutien autour de la tumeur, qui nourrissaient les cellules cancéreuses et les aidaient à croître pendant le traitement, ou de cellules immunitaires.
Fin du « désert immunitaire »
L'équipe de recherche a ensuite étudié les différents types de cellules immunitaires dans les échantillons de tumeurs, avant et après le traitement par le cétuximab. Les chercheurs ont découvert que les cellules immunitaires des tumeurs étaient en moyenne six fois plus actives dans les tumeurs devenues résistantes au cétuximab que dans celles qui n'avaient pas répondu au médicament dès le début.
En détruisant les cellules cancéreuses, le cétuximab aboutirait à l’envoi de signaux attirant les cellules immunitaires vers la tumeur et ces résultats suggèrent que les immunothérapies conçues pour lever les freins du système immunitaire pourraient être efficaces dans ces cancers.
Un essai d’immunothérapie de phase 2
La plupart des cancers intestinaux sont des « déserts immunitaires » et il est donc extrêmement excitant de voir que le cétuximab attire les cellules immunitaires dans ces tumeurs.
Un essai clinique de phase II vient donc d’être débuté dans cette perspective. Il associe une combinaison de deux immunothérapies, le nivolumab et le relatlimab, chez des patients atteints d'un cancer colorectal avancé dont les tumeurs ont cessé de répondre à une combinaison de cétuximab et de chimiothérapie.
Nouveaux gènes de résistance au cétuximab
L’étude a également identifié six nouveaux mécanismes génétiques qui peuvent causer une résistance au cétuximab.
Ces résultats pourraient mener à la mise au point de meilleurs tests pour dépister les patients qui ne répondront pas au cétuximab dès le début ou qui cesseront rapidement d'y répondre, afin qu'ils puissent être identifiés rapidement et, dans la mesure du possible, passer à d'autres traitements.
Des cibles mouvantes
Les cancers sont des cibles mouvantes qui s'adaptent et évoluent constamment dans leur environnement pour survivre, progresser et échapper aux traitements qu’on leur applique.
Comme le montre cette étude, les cancers n'ont pas toujours besoin d'accumuler des mutations génétiques pour devenir résistants aux médicaments. Ils peuvent aussi modifier leur comportement et leur environnement immédiat de façon complexe et subtile afin de rendre les traitements inefficaces.
Le cétuximab transforme les tumeurs
Cette nouvelle étude met en lumière la biologie complexe « Darwinienne » qui se cache derrière la capacité des cancers intestinaux à échapper au traitement par un traitement ciblé, comme le cétuximab. Elle souligne l'importance de comprendre comment le cancer évolue, surtout lorsqu'il s’agit d'un effet direct du traitement.
L'anticorps cétuximab rend les tumeurs colorectales potentiellement sensibles à l'immunothérapie quand elles deviennent résistantes. Cette découverte pourrait avoir des répercussions sur les traitements ultérieurs de cette maladie








