Nicotine
Vapotage : la métatine, nouveau piège de l'industrie du tabac ?
La 6-méthyl-nicotine ou métatine, nouvelle substance de vapotage présentée comme sans nicotine, serait en réalité encore plus addictive, alerte une association anti-tabac.

- Par Stanislas Deve
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- Igor Ilkov / istock
Et si le vapotage "sans nicotine" cachait en réalité une substance encore plus dangereuse ? C'est ce que dénonce le Comité national contre le tabagisme (CNCT), qui attaque en justice la marque Aroma King pour avoir commercialisé des produits contenant une molécule de synthèse : la 6-méthyl-nicotine, aussi appelée métatine. Selon les études précliniques, ce composé présenterait un potentiel addictif jusqu'à 3,3 fois supérieur à celui de la nicotine et pourrait endommager davantage les cellules pulmonaires, alerte l’association dans un communiqué, à quelques jours de la Journée mondiale sans tabac, le 31 mai.
Une molécule trompeuse et mal réglementée
Dérivée de la nicotine mais non présente naturellement dans le tabac, la métatine est proposée dans des produits affichés comme "sans nicotine". Or, cette mention trompeuse est susceptible "d’induire les consommateurs en erreur quant à la sécurité et au contenu", estime le CNCT.
Encore méconnue du grand public, cette molécule permet à l’industrie du tabac de contourner les seuils réglementaires imposés à la nicotine classique. Elle n’a fait l'objet d'aucune évaluation toxicologique approfondie. "Le problème de ces nouveaux produits de synthèse, c'est qu'ils n'ont jamais été étudiés ou très peu chez l’animal, donc le cobaye, c'est l’Homme", s’inquiète Anne Batisse, cheffe du centre d’addictovigilance de Paris, citée par l’AFP.
Cibler un public jeune et vulnérable
Les "vapes" incriminées, comme celles de la gamme "NoNic", misent sur des designs colorés, des arômes sucrés et une présence massive en ligne. "Ces produits visent clairement un public jeune, non initié et très vulnérable", dénonce le CNCT. Sur les réseaux sociaux, des influenceurs vantent leur goût, leur supposée innocuité et même leur effet stimulant comparable à celui du café.
La mention "sans nicotine" renforce l’illusion d’un produit inoffensif, alors que "la nicotine est déjà l’une des substances les plus addictogènes qu’on connaisse. Elle l’est davantage que l’héroïne", rappelle Anne Batisse. La campagne "Le Goût du Mensonge", lancée par le CNCT, vise justement à dévoiler les rouages de ces "nouvelles stratégies insidieuses déployées par l’industrie du tabac pour séduire une nouvelle génération de consommateurs". L’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait déjà averti en 2023 que les réglementations axées uniquement sur la nicotine étaient contournables. Pour le Pr Yves Martinet, président du CNCT, il faudrait tout bonnement "interdire toute substance exerçant un effet pharmacologique sur les récepteurs nicotiniques, qu’elle contienne ou non de la nicotine".