Dermatologie
Tatouages : un lien troublant avec le cancer de la peau
Une étude suédoise révèle une augmentation de près de 30 % du risque de mélanome cutané chez les personnes tatouées. Ce pourrait être lié aux substances chimiques contenues dans les encres.
- Par Stanislas Deve
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Un tatouage peut-il marquer la peau plus qu'on ne le pense ? Une étude menée par des scientifiques suédois, publiée dans l’European Journal of Epidemiology, révèle aujourd'hui un lien potentiel entre l’encre des tatouages et un risque accru de mélanome, une forme grave de cancer cutané.
La recherche, qui n’est pas la première à éveiller les soupçons, a porté sur 2.880 personnes atteintes de mélanome en Suède. Après analyse de leurs habitudes d’exposition au soleil, de leurs antécédents médicaux et de leurs expositions aux tatouages, les chercheurs ont mis en évidence une augmentation de 29 % du risque de mélanome chez les personnes tatouées par rapport aux non tatoués. Ce risque monte même à 38 % lorsque le tatouage combine encre noire et encres colorées.
Des encres aux substances potentiellement toxiques
Pourquoi cet effet ? L'explication résiderait dans la composition chimique des encres. L'encre noire contient souvent des hydrocarbures aromatiques polycycliques, certains classés comme cancérogènes par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). Les encres colorées, elles, reposent sur des pigments azoïques susceptibles de se dégrader en amines aromatiques cancérogènes sous l'effet des ultraviolets (UV) ou du laser. Tous ces types d'encres peuvent aussi contenir des métaux lourds, selon un communiqué des chercheurs.
Plus surprenant encore : seulement 30 % des cancers de la peau apparaissent directement sur la zone du tatouage. Les auteurs de l’étude suggèrent donc un "effet systémique", l'exposition aux substances toxiques pouvant affecter le système immunitaire, à l'image de ce qu'on observe chez les pompiers ou les travailleurs du pétrole.
Un facteur de risque à part entière du mélanome ?
Si le risque de mélanome associé au tatouage reste inférieur à celui induit par la surexposition aux UV, mais il se situe dans la même fourchette que d'autres facteurs bien connus. Les chercheurs appellent donc à des études épidémiologiques supplémentaires, tout en soulignant que "les encres de tatouage pourraient bien représenter un facteur de risque à part entière dans le développement du mélanome". Pour rappel, malgré l'entrée en vigueur en 2022 du règlement REACH, qui encadre l’utilisation d’environ 4.000 substances dans les encres de tatouage, de nombreux produits sur le marché ne respectent pas les seuils fixés. Les contrôles ont même mis au jour des cas d'étiquetage frauduleux. Avis aux futurs tatoués et tatouées, donc : assurez-vous de bien savoir ce que vous vous injectez dans la peau.











