Rhumatologie

PR : la corticothérapie à faible dose est bien tolérée sur le long terme

Dans la polyarthrite rhumatoïde (PR), une corticothérapie à faible dose ne semble pas être associée à des complications sévères sur le long terme, si elle est utilisée pour la durée la plus courte et aux doses les plus faibles possibles.

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  • 06 Mars 2017
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    Une analyse de la cohorte ESPOIR sur 7 ans de suivi de PR précoces ne montre aucune différence significative quand aux effets indésirables majeurs entre les patients avec et sans traitement par de faible dose de corticoïdes.

    Environ 10% des patients ont eu des effets indésirables majeurs dans chaque groupe. Ce sont les résultats d’une étude parue dans Annals of the Rheumatic Diseases.

    Un suivi de PR ultra-précoces

    La cohorte ESPOIR comprend des patients atteints d'arthrite très précoce recrutés de 2002 à 2005, dans 14 centres français de rhumatologie. La base de données a été verrouillée en 2013, c’est-à-dire à 7 ans de suivi.

    Les patients recrutés dans ESPOIR avaient une arthrite inflammatoire touchant au moins deux articulations et évoluant depuis 6 semaines à 6 mois, avec un risque de développer une PR et n'avaient reçu ni DMARD ni corticoïdes.

    Les chercheurs ont classé les 602 patients atteints de PR précoce (79% de femmes, âge moyen de 48 ± 12 ans) de la cohorte ESPOIR en deux groupes : ceux qui ont reçu un traitement par corticoïdes, quel que soit le mode d’administration, au moins une fois après le recrutement (n = 386) et ceux qui n'en ont pas eu (n = 216). Les deux groupes ont été suivis pendant une moyenne de 5,98 ± 1,84 ans (médiane = 7 années (IQR 0,038-7,65).

    Le critère principal comprend tous les évènements indésirables sévères et nouveaux survenus pendant le suivi, y compris la mortalité toutes causes confondues, les maladies cardiovasculaires (infarctus du myocarde, syndrome coronarien aigu, angine de poitrine, accident vasculaire cérébral et insuffisance cardiaque), une infection sévère nécessitant une hospitalisation (ou des antibiotiques intraveineux) et une fracture.

    Ont été exclus de l'étude les malades ayant des antécédents de maladie cardiovasculaire, d'infection sévère ou de fracture, puisqu'ils étaient considérés comme moins susceptibles de recevoir des corticoïdes et plus susceptibles d'être exposés aux effets secondaires des corticoïdes.

    Une corticothérapie précoce et à très faible dose

    La plupart des PR (68,1%) du groupe corticoïdes ont commencé les corticoïdes pendant les 6 premiers mois de l’arthrite.

    Le groupe corticothérapie a reçu principalement de faibles doses de prednisone avec une dose moyenne de 3,1 ± 2,9 mg/jour et une médiane de 2,4 mg/jour (IQR 0,7-5) au cours du suivi. La durée moyenne du traitement corticoïde total était de 1057 ± 876 jours, soit une moyenne de 803 jours (IQR 267-1829).

    Comparativement aux patients sans corticothérapie, ceux qui ont un corticoïde ont une maladie plus active, prennent plus de DMARD, de biothérapie et d'AINS, avec des niveaux significativement plus élevés de DAS28 CRP et de HAQ.

    Pas plus de complications sévères

    Les effets indésirables sévères ne différent pas entre les groupes avec ou sans corticothérapie (HR 0,889; IC à 95%: 0,620-1,273, p = 0,520).

    Parmi les 65 événements indésirables majeurs observés (7 décès, 14 maladies cardiovasculaires, 19 infections sévères et 25 fractures), 44 (11,4%) sont survenus chez des patients avec corticothérapie, et 21 (9,7%) chez des patients sans corticothérapie (p = 0,520).

    Les décès ont été secondaires à un cancer ou à des hémopathies chez quatre patients, une salmonellose et la rupture d’un anévrisme aortique chez un patient pour chacun et une cause inconnue pour le 7e malade.

    Les infections sont plus fréquentes chez les patients sous corticothérapie, mais pas significativement plus (p = 0,09). Dans l'analyse de Cox, avec pondération sur l'âge, le sexe, les antécédents d'hypertension et de traitement par corticoïdes, les résultats ne diffèrent pas entre les groupes avec et sans corticothérapie (p = 0,520; = 0,889; IC 95%: 0,620 à 1,273).

    En pratique

    Bien que les corticoïdes soient largement utilisés dans la PR débutante, avec un consensus général sur l'utilité des corticoïdes à court terme, leur rapport bénéfice-risque sur le long terme est mal étudié, la plupart des données provenant d'études observationnelles et d'essais cliniques randomisés sur de petits effectifs et de courtes durées. Les résultats du suivi des PR de la cohorte ESPOIR confirment que les corticoïdes à faible dose sur une durée prolongée (près de 3 ans) n’entraînent pas plus de complications sévères après mise en route chez des PR débutantes.

    Il s’agit bien sûr d’un suivi de cohorte, ce qui ne permet donc pas d’exclure l’influence de biais potentiels inhérents aux données auto-déclaratives. Le nombre relativement faible d'événements indésirables pourrait également avoir limité la puissance de l'étude.

    Bien que ces résultats aient donc besoin d’être confirmés sur une autre cohorte, ils appuient fortement les recommandations actuelles selon lesquelles les corticoïdes devraient être utilisés dans la PR débutante afin de protéger les articulation et d’améliorer le contrôle de la maladie, pendant la période la plus courte possible et à la dose la plus faible possible.

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