Médecine générale

Avalanches : un dispositif permet de prolonger la fenêtre de survie sous la neige

Lors d’un ensevelissement critique sous une avalanche, l’asphyxie survient en quelque minutes. Un dispositif dorsal qui achemine l’air contenu dans le manteau neigeux vers les voies aériennes retarde de 25 minutes l’hypoxémie et l’hypercapnie léthales.

Mots-clés :
  • 10 Octobre 2025
  • A A

    L’ensevelissement critique (tête et thorax sous la neige) dans une avalanche tue environ 50 % des victimes, majoritairement par asphyxie dans les 35 premières minutes, avec une chute de la probabilité de survie dès la 10ème minute. L’hypothèse testée est qu’un flux d’air puisé par un dispositif dans la neige et dirigé vers la face pourrait différer l’installation de l’hypoxie et de l’hypercapnie léthales, gagnant le temps nécessaire au dégagement.

    Dans une simulation randomisée, en double insu, mené sur site (Italie, janvier–mars 2023), des adultes sains en décubitus ventral ont été enfouis sous au moins 50 cm de neige. Le groupe intervention utilisait un dispositif dorsal (Safeback SBX) aspirant l’air ambiant du dépôt neigeux ; le groupe contrôle un dispositif factice et le critère principal était le délai jusqu’à SpO₂ < 80 % sur 35 minutes.

    Selon les résultats de cette simulation randomisée, publiée dans le JAMA, aucun participant équipé du dispositif n’a atteint SpO₂ <80 % à 35 min, contre 7 hypoxies dans le groupe témoin : la médiane d’ensevelissement est de 35,0 min sans événement dans le groupe équipé versus 6,4 min (IQR 4,8–13,5) et 7 événements dans le groupe témoin (p < 0,001, tests de log-rank et de Breslow).

    Une atmosphère inspirée « normalisée » et des réponses physiologiques contenues

    Les mesures des gaz du sang montrent, au niveau de la poche d’air, un CO₂ à 1,3 % (IC à 95 % 1,0–1,6) avec le dispositif contre 6,1 % (5,1–7,1) dans le groupe témoin, et un O₂ à 19,8 % (19,5–20,1) contre 12,4 % (11,2–13,5).

    En condition témoin, on observe classiquement une chute rapide de la FiO₂ (~–13 % en 5 min) et une hausse de la FiCO₂ (> 5 %), induisant une hyperventilation compensatrice (hausse FR, VT, V̇E) et une réponse hémodynamique (tachycardie, index cardiaque). Avec le dispositif, ces dérives sont abolies : l’oxygénation est maintenue, les paramètres ventilatoires et cardiovasculaires restent stables jusqu’à 35 minutes.

    Une phase « contrôle non aveugle » chez les participants restés 35 minutes ensevelis, après extinction du dispositif, n’a pas mis en évidence d’artéfact lié au montage. Aucun signal défavorable rapporté chez les 24 volontaires analysés (âge médian 27 ans, 54 % d’hommes).

    De l’asphyxie précoce à une stratégie d’oxygénation passive : un essai de terrain pragmatique

    Quatre institutions ont conduit cet essai randomisé, en conditions hivernales réelles, avec un monitoring continu des gaz du sang et un arrêt immédiat en cas de SpO₂ < 80 %. Les points forts sont le design contrôlé, l’insu, des critères physiologiques pertinents et la quantification spatiale des gaz dans la neige, y compris à forte densité (500 kg/m³). Les limites sont des simulations d’ensevelissement (et non des avalanches traumatiques), avec une profondeur unique (50 cm, alors que 80 cm sont fréquents), un critère substitutif d’asphyxie (SpO₂ et FiO₂/FiCO₂), et un effectif restreint (24 analysés sur 36 randomisés), ce qui impose prudence pour la généralisabilité des résultats.

    Selon les auteurs, ce dispositif respiratoire s’inscrit comme complément des outils existants dans une stratégie globale : airbag (réduction du risque d’ensevelissement critique), DVA/sonde/pelle (raccourcissement du temps d’ensevelissement), et formation à la gestion du risque. Chez les pratiquants équipés et entraînés, il pourrait étendre la « fenêtre d’or » jusqu’à 35 minutes en limitant hypoxémie/hypercapnie, une situation potentiellement déterminante lorsque l’auto-secours ou l’équipe progresse lentement. Il ne remplace ni la prévention (lecture du bulletin météo, choix d’itinéraire, facteur humain) ni l’équipement de recherche.

    Sous réserve de la pertinence du dispositif lors de vraies avalanches avec mesures de survie « dures », à différentes profondeurs/densités de neige et avec charges thoraciques, en interaction avec les airbags et les masques « air pocket », ce dispositif semble retarder l’hypoxémie et l’hypercapnie sans apport d’oxygène, le flux d’air étant « pris dans la neige », et transforme une course contre la montre en temps clinique gagné.

    Pour laisser un commentaire, Connectez-vous par ici.