Dépistage

Cancer colorectal : quand la détection passe par le microbiote

Des chercheurs suisses ont développé un dépistage du cancer colorectal qui se concentre sur la recherche dans les selles des sous-espèces du microbiote intestinal liées à la maladie.

  • Carolina Rudah/istock
  • 02 Septembre 2025
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    Le dépistage de cancer colorectal se fait en plusieurs étapes. Tout d’abord, une analyse de selle est réalisée à la recherche de traces de sang non visibles à l'œil nu. Si elles sont présentes, une coloscopie est réalisée pour trouver l’origine des saignements et si ces lésions sont cancéreuses.

    Une équipe de l’Université de Genève (UNIGE) a développé un dépistage pouvant éviter tout ce cheminement coûteux (et inconfortable). Au lieu de chercher du sang, il dresse l’inventaire des sous-espèces microbiennes présentes dans les selles pour repérer celles associées au cancer colorectal. Les résultats sont publiés dans Cell Host & Microbe, le 13 aout 2025.

    Cancer colorectal : une analyse qui se concentre sur les sous-espèces du microbiote

    Le rôle du microbiote intestinal dans le développement du cancer colorectal est connu depuis longtemps. Toutefois, les bactéries d’une même famille peuvent avoir des effets différents. Ce qui rend le développement d’outils de dépistage fiables complexes. Mais, les chercheurs suisses ont eu une idée : se concentrer sur les sous-espèces.

    "Au lieu de nous baser sur l'analyse des différentes espèces composant le microbiote, qui n’est pas assez détaillée pour saisir toutes les différences, ou sur celle des souches bactériennes, qui varient beaucoup d'un individu à l'autre, nous avons concentré notre recherche sur un échelon intermédiaire du microbiote, les sous-espèces, explique Mirko Trajkovski, professeur ordinaire au Département de physiologie cellulaire et métabolisme et au Centre du diabète de la Faculté de médecine de l'UNIGE, qui a dirigé cette recherche. L’échelle des sous-espèces est spécifique et permet d’appréhender les différences de fonctionnement des bactéries et comment elles contribuent à des maladies comme le cancer, tout en restant suffisamment générale pour détecter ces changements parmi différents groupes d’individus, populations ou pays."

    Avec l’aide de l’intelligence artificielle, les scientifiques sont parvenus à établir un catalogue complet des sous-espèces du microbiote intestinal humain. En le combinant avec des données cliniques sur le cancer colorectal, ils ont mis au point un test capable de prédire la présence d’une tumeur maligne uniquement à partir des bactéries présentes dans des échantillons de selles.

    "Même si nous avions confiance en notre stratégie, les résultats étaient étonnants, souligne Matija Trickovic dans un communiqué présentant la découverte. Notre méthode a détecté 90 % des cancers, un résultat très proche du taux de détection de 94 % obtenu par coloscopie et supérieur à toutes les méthodes de détection non invasives actuelles."

    L’équipe assure que la précision du test pourra être améliorée et égaler la coloscopie grâce à l’ajout de données supplémentaires. "Il pourrait devenir un outil de dépistage de routine et faciliter la détection précoce du cancer colorectal, qui serait ensuite confirmé par coloscopie, mais uniquement chez un nombre restreint de patients et patientes", estiment les auteurs.

    Détection des sous-espèces du microbiote : d’autres maladies pourraient être dépistées

    Après ces premiers résultats encourageants, les chercheurs vont maintenant lancer un premier essai clinique en collaboration avec les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). L’objectif est de déterminer plus précisément les stades et les lésions cancéreuses que le nouvel outil parvient à détecter.

    Et l’équipe voit encore plus loin. Elle assure qu’en étudiant les différences entre les sous-espèces d'une même espèce bactérienne, d’autres maladies pourraient être détectés avec leur méthode de dépistage "La même méthode pourra en effet permettre de développer des outils de diagnostic non invasifs pour de très nombreuses maladies à partir d'une seule analyse du microbiote", conclut Mirko Trajkovski.

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