Pneumologie

Maladies pulmonaires associées à la prématurité : ce n’est pas vraiment de l'asthme…

Les maladies respiratoires associées à la prématurité n’ont pas de lien réel avec les marqueurs de l’asthme et seraient davantage dues à un faible calibre des voies aériennes et à des altérations fonctionnelles spécifiques, essentiellement en présence d’antécédent de dysplasie bronchopulmonaire. D’après un entretien avec Christophe DELACOURT.

  • 18 Avr 2024
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    Une étude, dont les résultats sont parus en février 2024, dans l’European Respiratory Journal Open Research, a cherché à déterminer la concordance entre le diagnostic d’asthme et les altérations fonctionnelles chez les enfants nés grands prématurés. Il s’agit d’une étude rétrospective, australienne, ayant inclus des enfants tous nés avant 32 semaines d’aménorrhée, âgés de 5 à 17 ans, entre 1997 et 2015. Ces enfants avaient tous le même VEMS, le même rapport VEMS /CV, la même FeNO et le même pourcentage de spirométrie anormale. Les auteurs ont observé la présence ou non de symptômes respiratoires dans les trois premiers mois  et ont constaté que les altérations fonctionnelles n’étaient pas liées au fait de présenter ou non des symptômes.

     

    Des bronches de plus faible  calibre

    Le professeur Christophe DELACOURT, chef du service de pneumologie et allergologie pédiatriques de l’hôpital Necker-Enfants malades , à Paris, rappelle que cette problématique n’est pas nouvelle en soulignant que la grande prématurité a un impact sur le développement pulmonaire d’autant plus lorsqu’elle est compliquée de dysplasie broncho-pulmonaire, qui constitue la principale complication respiratoire de la prématurité. En effet, la prématurité a un impact sur le VEMS avec une baisse de 7% qui passe à 16% de perte en cas de dysplasie broncho-pulmonaire. Des études réalisées sur des cohortes d’adolescents et de jeunes adultes ont déjà montré que cet  impact est définitif. Selon Christophe DELACOURT, il s’agit de la racine développementale des syndromes obstructifs précoces du jeune adulte, qui devient alors plus susceptible de développer une BPCO.  Il explique que  ces sujets ont plus de symptômes de gêne respiratoire sifflante de la naissance jusqu’à l’adolescence mais qu’à l’adolescence, ils se comportent comme des jeunes nés à terme sur le plan respiratoire malgré la persistance d’altérations fonctionnelles importantes. Il existe donc une discordance entre les symptômes  initialement très fréquents mais qui diminuent et la persistance des altérations fonctionnelles. Christophe DELACOURT estime qu’il s’agit plus d’une hyperréactivité bronchique que d’un asthme car il n’existe aucun lien avec les marqueurs de l’asthme atopique comme l’hyperéosinophilie ou encore les antécédents familiaux. Il souligne également que la FeNo n’est pas élevée chez ces enfants. L’hypothèse est qu’il existe un mécanisme d’hyperactivité lié au fait d’avoir des bronches de plus petit calibre, ce qui provoque une hétérogénéité de ventilation, sans phénomène inflammatoire, ce qui avait déjà été démontré il y a plusieurs décennies.

     

    Une discordance entre les symptômes et les altérations fonctionnelles

    Christophe DELACOURT évoque l’intérêt de cette étude mais également son manque d’originalité, car, en effet, il rappelle l’existence de la cohorte française Epipage, qui avait déjà été utilisée pour démontrer la présence d’altérations fonctionnelles chez des adolescents de 15 ans, nés prématurément. Cette étude australienne vient confirmer ces données. Christophe DELACOURT précise que plus les cohortes ont importantes, plus le classement des sujets est optimal et qu’il existe deux profils fonctionnels chez ces grands prématurés : ceux qui ont un VEMS altéré par syndrome restrictif et ceux qui ont un VEMS altéré par syndrome obstructif. Les syndromes restrictifs sont beaucoup plus fréquents dans cette population. Il souligne également que, dans cette étude, aucune information n’est donnée sur la dysplasie broncho-pulmonaire qui représente pourtant un facteur d’aggravation considérable. De plus, la population observée est âgée de 5 à 17 ans, ce qui représente un grande variété de fréquence des symptômes.

     

    En conclusion, cette étude ne fait pas avancer la réflexion sur la thématique intéressante de la fonction respiratoire des grands prématurés mais la confirme en se présentant comme une publication de plus sur la discordance ente les symptômes et les altérations fonctionnelles respiratoires, le problème majeur demeurant lié aux anomalies développementales.

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    JDF