Oncologie

Cancer : une nouvelle thérapie ciblée IgA contre les mutations profondes

Une nouvelle thérapie ciblée repose sur l’utilisation d’anticorps IgA dimériques (digA), capablez de pénétrer dans les cellules pour cibler des mutations oncogéniques cytoplasmiques spécifiques à différents types de cellules cancéreuses, même en l'absence de marqueurs de membranes. 

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  • 03 Nov 2023
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    Comment éliminer les cellules cancéreuses sans nuire aux cellules saines et comment atteindre les cellules cancéreuses dépourvues de marqueur spécifique de surface ? C’est le défi de la science depuis de nombreuses années, car les chimiothérapies peuvent avoir des effets délétères sur toutes les cellules de l’organisme.

    Dans la revue spécialisée Immunity, des scientifiques présentent une thérapie ciblée innovante, basée sur les anticorps IgA diémriques, capable de cibler les oncodrivers cytoplasmiques dans les cellules tumorales, y compris sans récepteur de surface.

    Selon les auteurs, des scientifiques de l’université américaine de Duke, cette technique ciblant les drivers oncogéniques cytoplasmiques par des IgA dimériques spécifiques est plus précise, et permet de cibler des cellules tumorales qui n'expriment pas de récepteurs membranaires, avec des effets plus durables. 

    Une technique innovante pour cibler les cellules cancéreuses 

    "Il s'agit d'une étude de validation de principe, mais les résultats sont très prometteurs", estime Jose Ramon Conejo-Garcia, chercheur en sciences et technologies au Département d'immunobiologie intégrative de la Duke University School of Medicine et directeur de cette étude.

    Le principe validé par ces travaux est celui de l’utilisation d’anticorps appelé IGA dimériques (digA), capables de pénétrer dans les cellules tumorales et de cibler les drivers oncogéniques favorisant le développement de ces tumeurs. Elles se trouvent au plus profond des cellules cancéreuses et ont longtemps échappé aux molécules de traitement existantes qui ciblent les protéines membranaires. Les IgA dimériques (dIgA) peuvent se déplacer dans les cellules par l'intermédiaire du récepteur polymérique d'immunoglobuline IgA/IgM (PIGR), qui est exprimé principalement sur les épithéliums des muqueuses.

    Des anticorps capables de réduire la croissance des tumeurs 

    L’une de ces mutations, KRAS G12D, est connue pour être à l’origine des cancers les plus mortels. "L’étude a révélé que digA se lie à des protéines mutées et indésirables, puis les fait sortir de la cellule dans un processus appelé transcytose, arrêtant ainsi la croissance tumorale", observent les auteurs.

    Les premières expériences sur des souris atteintes d'un cancer du poumon et du côlon ont révélé des réductions notables de la croissance tumorale et des effets secondaires minimes. In vivo, le dIgA1 spécifique de KRASG12D a limité la croissance des carcinomes ovariens et pulmonaires mutés KRASG12D d'une manière qui dépend des cellules T CD8+. Le dIgA spécifique de IDH1R132H a réduit la croissance du cancer du côlon, démontrant le ciblage efficace d'un oncodriver cytoplasmique qui n'est pas associé à des récepteurs de surface.

    L’anticorps spécifique de KRAS G12D s’est révélé plus efficace pour réduire les tumeurs cancéreuses que les traitements actuels lors des tests cliniques.

    Anticorps : un espoir pour le traitement du cancer 

    "Nous pensons que ce traitement pourrait être utilisé pour cibler un large éventail de mutations cancéreuses", suppose Jose Ramon Conejo-Garcia. Selon eux, ces anticorps pourraient être utilisés comme thérapie ciblée contre les mutations tenaces à l’origine de cancers courants et agressifs, en particulier les cancers épithéliaux : cancer de l’ovaire, de la peau, du côlon, du col de l’utérus, de la prostate, du sein et du poumon.

    Pour les scientifiques américains, ces anticorps ne constituent qu’une partie des innovations liées à l’immunothérapie. Ils rappellent que des traitements comme les inhibiteurs de PD-1 et les cellules CAR T ont montré des rémissions durables sans précédent du cancer. "Le système immunitaire est le seul système du corps qui possède deux propriétés clés qui le rendent idéal pour le traitement du cancer : la spécificité et la mémoire, souligne Jose Ramon Conejo-Garcia. Le système immunitaire peut cibler spécifiquement les cellules tumorales et peut également se souvenir de ces cellules pour lancer une attaque plus efficace en cas de réapparition du cancer."

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    JDF