Infectiologie
Covid-19 : le nitazoxanide réduit-il le passage vers les formes graves ?
Un antiparasitaire, le nitazoxanide, confirmerait son efficacité anti-SARS-CoV-2 dans un essai clinique randomisé de phase 3 versus placebo et pourrait montrer une réduction des formes graves de la Covid-19 en cas de traitement précoce. L'étude n'est disponible qu'en pre-print et en communiqué de presse avec des discordances entre les 2.
- Jian Fan/iStock
Le premier traitement préventif des formes graves de la Covid-19 va-t-il voir le jour ? Dans un essai clinique de phase 3, le nitazoxanide, administré à la phase précoce, montrerait son efficacité pour éviter que l’infection au SARS-CoV-2 ne dégénère et aboutisse à une forme grave de la Covid-19. Cette étude confirmerait une étude antérieure de novembre 2020 qui montrait un effet sur la résolution des symptômes cliniques.
Mené aux États-Unis, l’essai randomisé montrerait que ce traitement antiparasitaire aux propriétés antivirales et anti-inflammatoires serait bien toléré par les patients et efficace sur pour les populations naïves, c’est-à-dire qui n’ont pas été précédemment infectées. L'étude n'a pour le moment fait l'objet que d'un communiqué de presse et la réduction des hospitalisations et des formes graves est seulement un critère secondaire.
Une réduction de 85% du taux de progression vers une forme grave
L’essai de phase 3 a porté sur 1 092 patients, entre août 2020 et février 2021, aux États-Unis et a comparé un comprimé à 300 mg de nitazoxanide à libération prolongé, versus placebo, matin et soir sur la durée de résolution des symptômes (critère principal). Pour étudier les effets de ce traitement sur les patients récemment infectés, ils devaient avoir un minimum de symptômes, tels que des difficultés respiratoires, de la fatigue ou encore une perte du goût ou de l’odorat, depuis moins de 72 heures.
Parmi eux, environ les deux tiers étaient porteurs d’au moins un facteur de risque pouvant favoriser l’évolution vers une forme grave. Les malades ont été suivis pendant 28 jours, à la fois cliniquement mais aussi biologiquement puisque les chercheurs ont régulièrement mesuré la présence d’anticorps. Le nitazoxanide a été administré à la dose de 500 mg X 3 par jour pendant 5 jours versus placebo.
Les chercheurs ont regardé avec attention l’évaluation du temps de réponse au traitement, l’évolution des signes cliniques quantifiés par des échelles de score et de la charge du virale. Ils ont également examiné le taux de réduction des hospitalisations et le taux d’évolution vers les formes graves. Le nitazoxanide a été donné aux patients sous forme d’un comprimé oral à libération prolongée qui assure une action continue du traitement qui a été testé avec deux prises quotidiennes pendant cinq jours.
Un environnement défavorable à la progression du virus
Concernant la durée de résolution des symptômes, dans le sous-groupe prédéfini de patients avec une maladie légère, le temps médian de durée de résolution serait réduit de 3,1 jours avec le nitazoxanide (10,3 jours, n=116) par rapport au placebo (13,4 jours, n=129) (discordance par rapport au pre-print qui indique13,3 jours et 12,3 jours respectivement !).
Parmi les critères secondaires, le traitement par nitazoxanide serait associé à une réduction de 85% de la progression vers une maladie sévère (essoufflement au repos avec SpO2 ≤93% à l'air ambiant ou PaO2/FiO2<300). Une seule personne traitée par nitazoxanide a progressé vers une forme sévère de la Covid-19.
Ces résultats seraient confirmés que les patients aient ou non un facteur de risque. Dans le sous-groupe prédéfini à haut risque de maladie sévère selon les critères des CDC, 5,6% des sujets traités par placebo auraient eu une maladie sévère contre 0,9% des malades traités par nitazoxanide. Par ailleurs, le médicament a été bien toléré par les participants.
Un repositionnement comme antiviral
Le nitazoxanide agirait de différentes manières pour empêcher le SARS-CoV-2 de provoquer des dégâts chez l’hôte au travers de plusieurs mécanismes immuno-modulateurs. Ce traitement n’attaquerait pas de front le virus mais crée un environnement défavorable à sa progression. Ce médicament aurait un effet inhibiteur sur les principales protéines virales produit par le virus.
Il réduirait également la charge énergétique des cellules infectées par le virus, diminuant sa capacité à se multiplier. Il inhiberait aussi les cytokines qui sont à l’origine de la sur-inflammation et des formes graves de Covid-19. Il serait capable de bloquer un site de la protéine Spike, qui permet au virus de s’accrocher aux cellules hôtes, qui est une source fréquente de mutants. Le nitazoxanide a été testé dans d'autres infections virales respiratoires.
Ces résultats sont très préliminaires et n'ont pas encore été validés par un comité de lecture indépendant. Nous recommandons la prudence car il y a des discordances entre le pre-print et le communiqué de presse, le critère principal n'est pas significatif et les pourcentages d'hospitalisation et de formes sévères sont des critères secondaires.








