Pneumologie
Anti-agrégants plaquettaires et gestes pleuraux : enfin un chiffrage du risque hémorragique !
L’impact des anti-agrégants plaquettaires sur les risques de saignement en cas de geste pleural est loin d’être négligeable mais il était nécessaire d’y mettre un cadre après avoir mené une enquête d’opinion qui donnait un sentiment de dangerosité. D’après un entretien avec Cécile CHENIVESSE.
Une étude française nationale, dont les réusltats sont parus en décembre 2020 dans Chest, a fait le point sur les risques hémorragiques liés à la prise d’anti-agrégants plaquettaires lors d’un geste pleural. Au total, 19 centres ont participé à l’étude, avec plus de 1000 patients inclus, pris en charge dans des services de pneumologie ou de réanimation. Les complications hémorragiques dans 2 groupes de patients ayant eu un geste pleural ont été comparées, 24 heures après le geste. Un groupe comportait 182 patients qui recevainet des anti-agrégants plaquettaires le jour du geste pleural et l’autre groupe comportait des patients qui n’avaient pas eu d’anti-agrégants plaquettaires dans les cinq jours précédant le geste pleural. Les principaux gestes effectués étaient des drainages, des ponctions et des biopsies à l’aveugle. Les complications hémorragiques ayant été prises en compte étaient essentiellment des hémoptysies, des pneumothorax et des hématomes de paroi. Ils étaient considérés comme graves lorsqu’un passage en réanimation, une transfusion ou un geste chirurgical se sont avérés nécessaires.
Des recommandations d’abord élaborées sur un sentiment
Le docteur Cécile Chenivesse, pneumologue au Centre Hospitalier Universitaire de Lille et auteure de ce travail, explique que la Haute Autorité de Santé a souhaité élaborer une conduite à tenir lors des gestes pleuraux chez les patients sous anti-agrégants plaquettaires et de mieux préciser la balance risque hémorragique/risque thrombotique. Une revue de la littérature a donc eu lieu dans cet objectif et aucune donnée sur la fréquence des complications hémorragiques n’a été relevée. Une enquête d’opinion auprès des membres de la SPLF a donc été réalisée et un sentiment de réticence avec le clopidogrel plus important qu’avec l’apsirine en est ressorti. Toutefois, il ne s’agissait que d’un sentiment et la nécessité de cette étude s’est donc imposée.
Un nouveau cadre sur la gestion des anti-grégants au cours des gestes pleuraux
Cécile CHENIVESSE précise que les résultats ont été ajustés avec les autres facteurs de risque hémorragiques. Les résultats ont montré que le taux de complications hémorragiques en population totale était faibele avec une incidence de 1,33% à 24 heures, et aucun décès n’est survenu. Toutefois, le taux de complications hémorragiques était plus élevé chez les sujets sous anti-agrégants plaquettaires au moment du geste avec une augmentation de 4,13 de l’odds ratio .Les comlications hémorragiques graves ont eu une incidence de 2,62% chez les patients sous anti-agrégants palquettaires versus 0,32% dans le groupe contrôle, soit un odds ratio de 7,27. Cécile CHENIVESSE relève que tous les accidents hémorragiques ont eu lieu sous aspirine, en précisant la limite que c’est l’anti-agrégant le plus prescrit. Elle souligne que, face à ces chiffres, une démarche systématique d’arrêt ou de baisse des anti-agrégants plaquettaires doit être réalisée si un geste pleural doit être effectué, et que, dans le cas de risque thrombotique trop élevé, il est nécessaire de mettre en place des modalités de réduction du risque hémorragique en utilisant du matériel de petit calibre, en réalisant un repérage sous échographie, par un médecin expérimenté.
En conclusion, le risque d’accident hémorragique chez les patients sous anti-agrégants plaquettaires nécessitant un geste pleural ne doit pas être minimisé et la maîtrise de ce risque doit être le primum movens, avant la réalisation du geste.