Gastro-entérologie
Cancer colorectal : augmentation chez les adultes jeunes
La forte augmentation de l’incidence des cancers du côlon, et surtout du rectum, chez les adultes de moins de 50 ans, devrait amener à modifier les modalités de prévention et de dépistage.
- Mohammed Haneefa Nizamudeen/Istock
L'incidence des cancers du côlon et en particulier du rectum a considérablement augmenté chez les adultes de moins de 50 ans dans les pays développés au cours de la dernière décennie.
Cette augmentation s’inscrit à l'encontre d'une tendance à la baisse ou à la stabilisation de l'incidence des cancers colorectaux dans la population globale de ces mêmes pays, qui pourrait être en rapport avec la mise en place du dépistage du cancer colorectal. C'est ce paradoxe qui ressort d'une étude observationnelle publiée dans la revue The Lancet Gastroenterology & Hepatology. Une étude qui amène à réfléchir sur une modification des modalités de dépistage du cancer colorectal ou du cancer du rectum.
Augmentation du cancer colorectal
Au cours des 10 années précédant 2014, l'incidence du cancer du côlon chez les personnes âgées de 0 à 49 ans a considérablement augmenté chaque année au Danemark (de 3,1 %), en Nouvelle-Zélande (2,9 %), en Australie (2,9 %) et au Royaume-Uni (1,8 %). Des augmentations significatives de l'incidence du cancer du rectum sont également observées dans ce groupe d'âge au Canada (de 3,4 %), en Australie (2,6 %) et au Royaume-Uni (1,4 %).
Les augmentations de l'incidence chez les adultes de moins de 50 ans sont les plus prononcées pour le cancer du rectum, en particulier dans le groupe des 20 à 29 ans, où l'incidence du cancer du rectum a augmenté de 18,1% par an au Danemark et de 10,6% en Norvège au cours de cette dernière décennie.
Sur la même période, des diminutions significatives de l'incidence du cancer du côlon ont été observées chaque année chez les personnes de plus de 50 ans en Australie (de 1,6 %), au Canada (1,9 %) et en Nouvelle-Zélande (3,4 %), et de cancer rectal en Australie (2,4 %), au Canada (1,2 %) et au Royaume-Uni (1,2 %).
Une étude observationnelle
Cette étude est la première du genre à examiner et à comparer de façon exhaustive les évolutions annuelles de l'incidence du cancer colorectal selon l'âge, et ses conclusions permettent de dégager des tendances divergentes pour différents groupes d'âge.
Elle a analysé les données à long terme sur l'incidence du cancer du côlon et du rectum dans 21 registres de population en Australie (1983-2012), au Canada (1995-2014), au Danemark (1978-2012), en Irlande (1995-2013), en Nouvelle-Zélande (1995-2014), en Norvège (1953-2014) et au Royaume-Uni (1995-2014).
Les chercheurs n'avaient pas accès aux données individuelles sur les facteurs de risque et le dépistage, de sorte qu'ils ne pouvaient pas examiner précisément comment les changements à ces facteurs interagissaient avec les tendances du cancer colorectal au fil du temps.
Intérêt manifeste du dépistage
Les auteurs de l'étude suggèrent que la diminution de l'incidence du cancer colorectal dans la plupart des pays chez les personnes de plus de 50 ans pourrait être attribuée à l'introduction de programmes de dépistage systématique des polypes. En Australie, au Canada et au Royaume-Uni, où le dépistage fondé sur l'âge a commencé en 2006, les diminutions globales de l'incidence sont plus prononcées. Dans les pays où les programmes de dépistage ont commencé plus tard, comme en Irlande (2012), au Danemark (2014), en Norvège (2012, programme pilote uniquement) et en Nouvelle-Zélande (2017), les taux globaux sont restés relativement stables.
Bien que l'incidence du cancer colorectal chez les adultes de moins de 50 ans demeure beaucoup plus faible que dans les groupes plus âgés, ces résultats sont préoccupants et soulignent la nécessité de prendre des mesures pour lutter contre cette augmentation dans les jeunes générations, augmentation qui peut être en partie liée à l'évolution de la prévalence des facteurs de risque, tels que l'obésité et une mauvaise alimentation.
Modifier le dépistage en fonction des risques
Bien que le dépistage en population chez les personnes de moins de 50 ans ne soit pas considéré comme rentable en raison de son incidence relativement faible, les antécédents familiaux pourraient aider à identifier les jeunes à haut risque de susceptibilité génétique au cancer colorectal, qui eux pourraient bénéficier de ce dépistage élargi.
Cependant, des études supplémentaires sont nécessaires pour établir les causes profondes de cette augmentation de l'incidence afin de permettre l'élaboration de stratégies adaptées de détection précoce.
En 2018, l'American Cancer Society a recommandé que le dépistage du cancer colorectal commence dès l'âge de 45 ans pour tous les adultes. Une telle approche est nécessaire, mais l'âge le plus bas pour le dépistage ne devrait pas être le même pour tous, et les antécédents familiaux devraient certainement être pris en compte, selon les auteurs.
Le cancer colorectal est le troisième cancer le plus répandu dans le monde, avec environ 1,8 million de nouveaux cas diagnostiqués et 881 000 décès associés à cette maladie en 2018.








