Carence en vitamine C : le scorbut avec saignement des gencives est de retour

Publié le 03.05.2022
Mise à jour 13.11.2023
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Carence en vitamine C : le scorbut avec saignement des gencives est de retour
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Dans les pays industrialisés, la carence en vitamine C, à l’origine du scorbut, est rare, mais le déficit lié à un régime pauvre est fréquent et probablement sous-estimé. Des apports quotidiens de 110 mg/jour sont conseillés pour éviter fatigue, faiblesse, irritabilité et éviter les complications à long terme.

Carence en vitamine C : COMPRENDRE

Des mots pour les maux

Acide ascorbique est le mot scientifique de la vitamine C.

Une vitamine est un composé essentiel au bon fonctionnement du corps qui ne peut pas être sécrétée par l’organisme.

Le scorbut est une carence importante en vitamine C chez un adulte.

La maladie de Möller-Barlow est le nom de la carence en vitamine C chez les enfants.

Qu’est-ce que la vitamine C ?

La vitamine C (ou acide ascorbique) est indispensable à la formation, la croissance et la réparation de l’os, de la peau et du tissu conjonctif (le tissu qui lie les différents composants des organes et qui constitue les tendons et les ligaments). 

La vitamine C protège les cellules du corps contre les dégâts provoqués par les « radicaux libres », des composés chimiques issus du fonctionnement normal des cellules et qui peuvent causer des dégâts cumulatifs au cours de la vie.

Elle est également essentielle à la protection de la paroi interne des vaisseaux sanguins

Elle participe à l’absorption du fer, indispensable à la fabrication des globules rouges. Elle aide aussi à la cicatrisation des blessures et à conserver garder des dents et des gencives saines.

Si la carence en vitamine C est rare dans les pays industrialisés, le déficit en acide ascorbique est plus fréquent, en particulier dans certaines populations à risque : celles qui ne consomment pas de légumes frais.

Qu'est-ce qu’une carence en vitamine C ?

Le scorbut est craint des marins depuis l’Antiquité, car il a décimé des équipages entiers qui étaient partis pour des navigations au long cours. 

Le scorbut survient généralement après trois mois de carence totale d’apport en acide ascorbique, ou vitamine C, une vitamine qui provient essentiellement des fruits et des légumes frais

Les symptômes comprennent une fatigue, une dépression, des anomalies du tissu conjonctif avec saignement des gencives qui sont gonflées (= gingivite), défauts de cicatrisation… et un syndrome hémorragique (pétéchies, hémorragie interne…). 

Quelles sont les causes d’une carence en vitamine C ?

Le corps ne peut pas synthétiser la vitamine C, comme les autres vitamines, et il est indispensable que celle-ci soit apportée par l’alimentation en dose suffisante. Cela se fait habituellement en consommant des légumes et des fruits frais. Les réserves de l’organisme sont faibles, limitées à 1500 mg, ce qui explique l’installation des troubles en 3 mois. 

La carence en vitamine C peut être liée à une carence d’apport en raison d’une absence d’apport de fruits et légumes frais ou d’une dénutrition plus globale. Dans nos sociétés occidentales, la carence d’apport est liée à l’extrême pauvreté (SDF ou alimentation en conserve) ou à un trouble psychiatrique.

Un déficit en vitamine C est le plus souvent secondaire à une alimentation incorrecte ou déséquilibrée (« scorbut du célibataire » qui ne mange que des conserves, éthylisme, troubles psychiatriques, grande pauvreté…), à une défaillance de l’absorption au niveau des intestins (gastrite, maladie de Crohn avec atteinte de l’intestin grêle proximal et malabsorption digestive), après une intervention chirurgicale durant laquelle on a retiré une partie des intestins, à une nutrition parentérale non supplémentée, à une hémodialyse mal équilibrée. Un déficit en vitamine C peut être observé dans les périodes de besoin accru en vitamine C : pendant la grossesse ou l’allaitement, après une intervention chirurgicale (cicatrisation), en cas d’infections, lors de certains traitements (chimiothérapie, radiothérapie...), et chez les fumeurs (la nicotine diminue l’absorption de vitamine C).

Le scorbut est rare dans les pays développés chez le nourrisson, car le lait maternel apporte normalement une quantité suffisante de vitamine C et les formules de laits en poudre pour bébés sont enrichies en vitamine C, mais des troubles de la croissance peuvent apparaître en cas de carence. 

Quels sont les signes du scorbut ?

Lorsque l’alimentation est simplement pauvre en vitamine C, il peut exister un déficit en acide ascorbique, les personnes adultes se sentent d’abord fatiguées, et irritables avec éventuellement une perte de poids et ressentir de vagues douleurs musculaires et articulaires.

Après 3 mois de carence complète d’apports en vitamine C, lorsque les réserves totales de l’organisme sont inférieures à 300 mg et que le taux d’acide ascorbique dans le sang (« ascorbémie ») s’abaisse en dessous de 2 milligrammes par litre, les symptômes du scorbut se développent. 

A des signes généraux peu spécifiques (asthénie, anorexie, amaigrissement) s’associent alors des douleurs articulaires (douleurs des genoux, des chevilles des poignets et des épaules), accompagnées de douleurs musculaires

Le syndrome hémorragique apparaît ensuite et se traduit par des saignements spontanés sous la peau avec taches violacées (« purpura pétéchial ») des membres et du tronc centré sur les follicules pileux ou sous forme de bleus (« ecchymoses »), des hématomes, des saignements des gencives et, éventuellement, des épanchements de sang dans les articulations (« hémarthrose »). Il a été observé des hémorragies dans la gaine des nerfs (« paralysie douloureuse du scorbut ») et des hématomes à l’intérieur des muscles pouvant être à l’origine de compressions des vaisseaux sanguins car l’enveloppe des muscles est peu extensible, ce qui conduit à un « syndrome des loges ». On peut aussi observer des hémorragies digestives, voire gynécologiques ou cérébrales. Ce syndrome hémorragique serait surtout secondaire à une altération de la synthèse du collagène, plutôt qu’une anomalie de la coagulation. 

De façon plus caractéristique, les gencives gonflent, deviennent pourpres et saignent (« gingivite hypertrophique et hémorragique ») et les dents peuvent par se déchausser et tomber. 

Les cheveux deviennent secs, friables et s’enroulent (« comme un tire-bouchon ») et tombent (« alopécie »). La peau devient sèche, rugueuse et squameuse (« hyperkératose »). Des œdèmes peuvent se produire au niveau des jambes. Une anémie peut apparaître, ainsi que des infections et les plaies ont tendance à ne pas cicatriser.

Quelles sont les complications du scorbut ?

Le scorbut est une maladie grave avec impotence douloureuse et maladie des gencives avec saignement et déchaussage des dents. C’était une maladie autrefois mortelle chez les équipages des navires au long cours (la « peste des marins ») avec en particulier un syndrome hémorragique généralisé, une anémie et des complications liées à des hématomes diffus.

À côté de ces carences aiguës en vitamine C, des déficits chroniques en vitamine C (avec une ascorbémie comprise entre 2 à 5 mg/l) seraient à l'origine de complications sur le long terme avec une augmentation du risque cardiovasculaire, du risque de cancers et du risque de cataracte.

Carence en vitamine C : DIAGNOSTIC

Quand faut-il évoquer une carence en vitamine C ?

Une carence en vitamine C peut être évoquée en cas de douleurs musculaires et articulaires mal systématisées, en cas de syndrome hémorragique mal compris ou en cas de maladie des gencives avec saignements de gencives rouges et gonflées, et en particulier dans certaines populations à risque : hommes seuls, personnes âgées, personnes alcoolo-dépendantes, personnes souffrant de troubles psychiatriques.

Avec quoi peut-on confondre la carence en vitamine C ?

L’association de douleurs articulaires (« arthralgies »), d’un syndrome sec, d’un purpura peut faire évoquer un syndrome de Gougerot-Sjögren ou une vascularite

Le syndrome hémorragique peut faire évoquer une maladie du sang (« hémopathie ») telle qu’une leucémie.

Comment diagnostiquer une carence en vitamine C ?

Le diagnostic d’une carence en vitamine C peut être évoqué à l’interrogatoire de la personne à risque et de la personne souffrant des troubles évocateurs et confirmé par l’examen physique et une prise de sang.

Un interrogatoire détaillé sur les habitudes alimentaires de la personne suspecte de carence en vitamine C livre rapidement des premiers indices concernant une éventuelle carence en vitamine C due, entre autres, à une alimentation déséquilibrée.

Lors de l’examen physique, le médecin examine l’état de santé général de la personne et s’intéresse tout particulièrement aux signes d’une éventuelle carence en vitamine C : fatigue, douleurs articulaires et musculaires, saignement des gencives, hémorragies de la peau à type de taches violacées et bleues sur tout le corps, pâleur de la peau et des muqueuses évocatrices d’anémie, déchaussement des dents, mauvaise cicatrisation des plaies….

Les signes biologiques sont non spécifiques : anémie fréquente, hypochrome et normo- ou macrocytaire car de causes multiples (hémorragies, carence en fer et hémolyse intravasculaire), hypocholestérolémie, hypoalbuminémie, syndrome inflammatoire avec CRP élevée. Les folates sont abaissés car ils ont la même provenance alimentaire et sont absorbés également dans l’intestin grêle proximal. Les réserves de fer sont basses. 

La suspicion clinique est confirmée par les dosages sanguins d’acide ascorbique avec la baisse de l'ascorbémie qui est inférieure à 2,5 milligrammes par litre (contre une normale comprise entre 5 et 16 mg/l). Elle doit être interprétée en fonction de l'existence d'un syndrome inflammatoire, celui-ci favorisant le transfert de la vitamine C du sérum vers les leucocytes. Le dosage de l'acide ascorbique leucocytaire, témoin des réserves de l'organisme, est plus fiable.

Chez l’enfant, une carence en vitamine C se manifeste également lors d’une radiographie au niveau de la région des os voisine des articulations (« métaphyse ») : bandes horizontales condensées alternant avec des bandes radio-transparentes. En IRM, les images sont plus nettes avec un « hypersignal » en séquence T2 des métaphyses des fémurs et des tibias (fémur distal et tibia proximal et distal.

Carence en vitamine C : TRAITEMENT

Quels sont les principes du traitement d’une carence en vitamine C ?

Dans le scorbut de l'adulte, le traitement consiste en l'administration de 1 gramme de vitamine C par jour, réparti en plusieurs prises quotidiennes (100 à 500 mg par voie orale 3 fois/jour), pendant 15 jours. En effet, l’absorption intestinale de vitamine C est saturable à partir de 100 mg d’apport et l’excès est éliminé dans les urines). 

La vitamine C peut être administrée par voie orale le plus souvent, ou par voie intraveineuse (perfusion) en cas de troubles digestifs avec malabsorption, en pratique jusqu’à disparition des signes cliniques (douleurs, saignements des gencives, pétéchies…). Le syndrome hémorragique disparaît en 48 heures et l’amélioration globale se fait en une quinzaine de jours. 

Cette supplémentation en vitamine C sera relayée par un régime alimentaire fournissant une à deux fois les apports alimentaires recommandés pendant plusieurs semaines. L’alimentation doit toujours être rééquilibrée.

Carence en vitamine C : PREVENIR

Comment prévenir une récidive de carence en vitamine C ?

Les aliments-sources de vitamine C incluent les fruits agrumes (citrons, oranges…), les fraises, les tomates, les pommes de terre, les brocolis, les poivrons…

La vitamine C est cependant la plus fragile de toutes les vitamines : elle est sensible à l'eau, à la chaleur à l'air et à la lumière : à température ambiante, la moitié de la teneur en vitamine C d'un aliment peut être perdue en 24 heures. Les modes de cuisson et de stockage doivent donc être adaptés de manière à limiter sa dégradation.

Carence en vitamine C : PLUS D’INFOS

La carence en vitamine C en France

Selon différentes études en France, près de 20 % des adultes consommeraient moins de 2/3 des apports conseillés en vitamine C et des taux d’acide ascorbique inférieurs à 2 mg/l dans le sang seraient retrouvés chez près de 5 % des femmes et 10 % des hommes. Ces chiffres seraient même plus élevés après 65 ans. 

Les liens de la carence ne vitamine C

Le site de la HAS liste les indications du dosage de la vitamine C

Les liens Pourquoi Docteur

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JDF