Pneumologie

Dyspnée sous ventilation mécanique : une expérience très traumatisante

Une prévalence importante de la dyspnée chez les patients sous ventilation mécanique est associée à une prévalence plus élevée de stress post-traumatique à 3 mois. Une sensibilisation des professionnels à la détection de la dyspnée et une prise en charge adaptée limiterait les conséquences de cette expérience traumatisante. D’après un entretien avec Jonathan MESSIKA.

  • 24 Fév 2022
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    Une étude française, dont les résultats sont parus en janvier 2022 dans l’American Journal of Respiratory Critical Care Medicine, a fait le point sur le caractère iatrogène de la ventilation assistée chez des patients dyspnéiques en réanimation, compte tenu du caractère traumatisant de la dyspnée. Il s’agit d’une étude prospective de cohorte, réalisée dans 10 unités de soins intensifs françaises. La dyspnée a été quantifiée chez des patients intubés depuis plus de 24 heures, grâce à une échelle visuelle analogique. Les auteurs ont également défini le score de stress post-traumatique par un score révisé de l’échelle d’impact de l’évènement. Le stress post-traumatique était présent en cas de score supérieur ou égal à 22. Au total, 612 patients ont été évalués et un tiers d’entre eux était dyspnéique.

    Sensibiliser les professionnels à la dyspnée

    Le Professeur Jonathan MESSIKA, pneumologue et réanimateur à l’hôpital Louis Mourier de Colombes, insiste sur le fait que ce travail a surtout été réalisé à l’initiative de son premier auteur, le Professeur Alexandre DEMOULE. Il rappelle que l’interrogation sur es conséquences de la dyspnée chez les patients sous ventilation assistée est toujours d’actualité et souligne également que si les professionnels ne sont pas sensibilisés à la détection de la dyspnée, ils peuvent facilement passer à côté. Les auteurs ont donc côté la dyspnée de patients sous ventilation assistée ou en cours de sevrage. Un résultat intéressant a été que les patients dyspnéiques n’ont pas été ventilés plus longtemps ni eu une mortalité plus élevée que les autres. En revanche, le syndrome de stress post-traumatique était significativement plus important chez les patients dyspnéiques. Jonathan MESSIKA explique qu’il s’agit d’un vrai levier car après un séjour en réanimation, les séquelles, notamment psychologiques sont sous évaluées.

    La « soif d’air », une sensation traumatisante

    Jonathan MESSIKA précise que la forme de dyspnée la plus fréquente est la « soif d’air » et que celle-ci représente la sensation d’étouffement la plus désagréable et est extrêmement traumatisante et source de grande anxiété. Pour lutter contre ces conséquences, il existe différents leviers : une formation des médecins à la détection de la dyspnée , chez les patients réveillés, une évaluation de cette dyspnée pour la traiter efficacement, avec par exemple, un changement de réglage du ventilateur et une prise en charge sérieuse des séquelles psychologiques des patients ayant séjourné en réanimation, séquelles qui doivent être reconnues et suivies sur le long terme.

    En conclusion, la dyspnée lors d’un séjour en réanimation est une expérience traumatisante psychologiquement et ce stress post-traumatique est largement sous-évalué. Et donc sous traité.

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    JDF