Pneumologie

Dépistage du cancer bronchique : optimiser les populations à risque

Une méta-analyse apporte des arguments scientifiques forts sur le dépistage du cancer du poumon par scanner à basse dose d’irradiation, à condition d’avoir bien ciblé les populations à haut risque d’aller chercher les populations précaires. D’après un entretien avec Marie DARRASON.

  • 16 Déc 2021
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    Un éditorial, paru dans le LANCET Regional health-Europeen en novembre 2021, a reporté les résultats d’une étude parue dans cette même revue. Cette étude est l’essai UKLS, un essai britannique réalisé entre 2011 et 2013, dont l’objectif était la réduction de la mortalité par cancer bronchique des patients à risque de développer un cancer pulmonaire, ayant été dépistés en une seule fois par scanner thoracique basse dose. Au total, 4000 sujets ont été inclus. Un bras a bénéficié d’un scanner low-dose et l’autre bras d’un suivi normal. Les patients ont été suivis jusqu’en 2020.Si un nodule était dépisté, un algorithme de suivi de nodule était alors proposé aux patients.

    L’objectif de réduction de la mortalité n’est pas atteint

    Le docteur Marie DARRASON, chef de clinique dans le service de pneumologie du Centre Hospitalier Lyon-Sud, et auteur de cet éditorial, précise que cette étude est le dernier essai européen sur le dépistage du cancer du poumon, sachant qu’il n’existe pas de dépistage de masse en France, les recommandations étant le dépistage individuel, en fonction des antécédents de tabagisme du patient. Elle rappelle que plusieurs essais ont déjà été réalisés aux USA (essai NLST) et en Europe, avec notamment l’essai NELSON. Marie DARRASON explique que ce nouvel essai utilise une stratégie de dépistage en une fois, qui n’est ni utilisée ni recommandée à l’heure actuelle, même si l’idée du suivi à long terme est intéressante. Les résultats n’ont pas montré de réduction de la mortalité par cancer bronchique, mais il est difficile d’en tirer une conclusion. En effet, cette étude manque de puissance, d’autant qu’elle était prévue pour inclure 7000 sujets et qu’elle n’a pas été menée à son terme. En revanche, la méta-analyse qui intègre les résultats de cet essai avec les résultats des autres essais européens et américains de dépistage (9 essais au total) montre une réduction de la mortalité par cancer bronchique et une réduction de la mortalité globale.

    Un point fort : l’utilisation d’un score de risque

    Marie DARRASON souligne, cependant, qu’il est important de remettre cette étude dans son contexte et d’insister sur son point fort qui est d’avoir réalisé le dépistage chez des individus sélectionnés comme étant à haut risque. En effet, elle précise que c’est le seul essai qui a utilisé un score de risque, le score LLPv2, à l’inclusion des sujets, afin d’améliorer la spécificité de la population à risque, ce qui est le point capital à améliorer pour le dépistage de masse des cancers bronchiques. Ce score a été réalisé à l’aide d’un questionnaire en ligne. Les patients qui obtenaient un score supérieur ou égal à 4,5% présentaient un risque élevé de développer un cancer bronchique dans les cinq années à venir. Marie DARRASON explique qu’en utilisant un score de risque, on augmente la proportion de cancers dépistés plus tôt, mais que ce type de score, qui fait appel à un questionnaire d’auto-évaluation en ligne, n’est probablement pas le plus adapté pour atteindre les populations les plus précaires qui aussi sont les plus à risque de développer un cancer bronchique. Elle rappelle que les recommandations françaises préconisent d’utiliser les critères de l’étude NELSON, qui consistent en une évaluation par le médecin, en fonction de l’âge et du tabagisme, calculé en paquets-années, sevré ou non. Le dépistage est alors individuel avec un scanner low-dose initial puis un second scanner optionnel.

    En conclusion, le dépistage du cancer bronchique est un sujet « chaud » qui nécessite d’optimiser les populations à risque et d’aller chercher les populations précaires. Plusieurs initiatives sont en cours, notamment le dépistage par scanner mobile, projet déjà évoqué dans les hôpitaux Lyonnais.

     

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    JDF