Grossesse
Les perturbateurs endocriniens influencent-ils le comportement des enfants à naître ?
Une étude française alerte sur une possible association entre l'exposition à des perturbateurs endocriniens durant la grossesse, comme le bisphénol S présent dans les cosmétiques, les aliments ou les plastiques, et des troubles du comportement chez les jeunes enfants.
- Michael Lutz / istock
Nos flacons de gel douche ou les emballages plastiques de notre quotidien pourraient-ils influencer le comportement de nos enfants à naître ? Une nouvelle étude française, publiée dans The Lancet Planetary Health, met en lumière une possible association entre l'exposition prénatale à certains perturbateurs endocriniens et l'apparition de troubles du comportement chez les tout-petits, comme des difficultés d’attention, des tendances anxieuses et dépressives, ou encore de l'agressivité.
Un possible lien entre pollution chimique et comportement
L’étude, menée par des chercheurs de l'Inserm, en collaboration avec le CNRS, l'Université et le CHU Grenoble Alpes, ainsi que l'ISGlobal de Barcelone (Espagne), met en cause deux substances bien connues : le bisphénol S, un plastifiant, et le méthylparabène, un conservateur. Ces composés, présents dans des produits cosmétiques, alimentaires et plastiques, sont depuis longtemps suspectés d'être des perturbateurs endocriniens. Or, leur exposition au troisième trimestre de la grossesse semble associée à des scores plus élevés issus d’un questionnaire comportemental utilisé chez les enfants âgés de 18 à 24 mois.
Ces résultats reposent sur deux cohortes : l'une à Barcelone (1.080 mères-enfants) et l'autre à Grenoble (484 mères-enfants). La force de cette étude réside dans la méthode de recueil : jusqu'à 42 échantillons d'urine ont été prélevés pendant la grossesse, une fréquence bien plus élevée que dans les travaux antérieurs. Les comportements des enfants ont ensuite été évalués grâce au Child Behaviour Checklist (CBCL), un questionnaire rempli par l'un des parents. Dans le détail, il apparaît que le méthylparabène est associé à des scores plus élevés chez tous les enfants, tandis que le bisphénol S montre un effet uniquement chez les garçons, selon un communiqué de l'Inserm.
Un substitut au bisphénol A pas si inoffensif ?
"C'est particulièrement préoccupant, car le bisphénol S est utilisé comme un substitut du bisphénol A, dont l'utilisation a été interdite pour certains usages, tels que les contenants alimentaires", alerte Claire Philippat, chercheuse à l'Inserm, qui a participé aux travaux. Malgré la recherche de mécanismes biologiques via l'analyse d'hormones du stress dans les cheveux maternels, aucun lien direct n'a pu être confirmé.Mais les chercheurs n'excluent pas d'autres pistes, comme l'axe thyroïdien ou œstrogénique. Car si les résultats ne permettent pas encore d'établir une causalité formelle, ils soulèvent une interrogation majeure sur l'innocuité des produits chimiques présents dans notre environnement quotidien, en particulier pendant la grossesse. "Il est essentiel de continuer à mener des études sur de larges cohortes, avec des mesures rigoureuses de l'exposition aux polluants, afin de mieux comprendre ces effets", conclut la chercheuse.








