Endocrinologie

Lévothyroxine : pas de différence clinique entre les différents génériques

Le changement d'un générique de lévothyroxine pour une autre formulation n’entrainerait pas de modifications cliniquement significatives du taux de TSH, dans une vaste étude portant sur 15 829 patients.

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  • 06 Avr 2022
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    La lévothyroxine sodique est l'un des médicaments les plus couramment prescrits et est disponible en tant que produit générique ou de marque. Les préparations de lévothyroxine générique sont moins coûteuses et ont été jugées bioéquivalentes au médicament de référence par les autorités de santé. Cependant, la lévothyroxine générique est moins largement prescrite que d'autres génériques, ce qui pourrait s'expliquer par les inquiétudes persistantes quant à l'existence d'un lien entre le changement de produits à base de lévothyroxine provenant de différents fabricants et la stabilité des taux d'hormones thyroïdiennes.

    Compte tenu de ces préoccupations, une équipe de recherche américaine a étudié les implications du passage d'un produit générique à l'autre sur les niveaux de TSH. En utilisant les données nationales d'une grande base de données administratives, l’équipe a comparé l'efficacité et la sécurité de la lévothyroxine générique entre les patients qui ont changé de fabricant et ceux qui ne l'ont pas fait.

    Les résultats de cette étude de recherche d'efficacité comparative suggèrent que le switch entre différents produits génériques de lévothyroxine n’est pas associé à des changements cliniquement significatifs du niveau de TSH. L’étude est publiée dans JAMA Internal Medicine.

    Le switch ne change pas grand-chose

    Un total de 15 829 patients avec un dossier de lévothyroxine générique et, parmi ces patients, 56,3% ont reçu une dose quotidienne de lévothyroxine de 50 μg ou moins. Au total, 13 049 patients (82,4%) ont continué à prendre le même générique initial, et 2780 (17,6%) ont changé de générique de lévothyroxine.

    Parmi les 2 780 paires de patients appariées par le score de propension, la proportion de patients qui ont un taux de TSH normal lors de l’évaluation à 3 ou 6 mois est de 82,7% chez les patients n'ayant pas changé de générique (n=2 298) et de 84,5% chez les patients qui en ont changé (n=2 348) (différence de risque, -0,018 ; IC à 95%, -0,038 à 0,002 ; p = 0,07).

    La proportion de patients qui ont un taux de TSH nettement anormal après la date d’inclusion est de 3,1% chez ceux qui n’ont pas changé (87) et de 2,5% chez ceux qui ont switché (69) (différence de risque, 0,007 ; IC à 95%, -0,002 à 0,015 ; p = 0,14).

    Les taux moyens de TSH après la date d’inclusion sont de 2,7 mUI/L chez les personnes n'ayant pas changé de générique et de 2,7 mUI/L chez les personnes qui en ont changé (p = 0,94).

    Une large étude en vie réelle

    À l'aide de données nationales provenant d'une importante base de données administratives sur les demandes de remboursement, les chercheurs constatent que la proportion de patients qui ont des taux normaux de TSH ne diffère pas entre les patients qui continuaient à utiliser le même produit générique de lévothyroxine et les patients qui ont changé de formulation.

    De plus, ils n’ont trouvé aucune différence significative dans la proportion de patients qui ont des niveaux de TSH nettement anormaux ou dans la variation moyenne des niveaux de TSH entre les patients qui ont continué à prendre le même produit générique de lévothyroxine et ceux qui en ont changé.

    Ces résultats sont rassurants quant à l'efficacité des produits génériques de lévothyroxine, même lorsque les changements se produisent entre des préparations provenant de fabricants différents.

    Une analyse par score de propension

    Cette étude de recherche d'efficacité comparative avec appariement par scores de propension a utilisé les données d'OptumLabs Data Warehouse, une base de données nationale de réclamations administratives liée aux résultats des tests de laboratoire. Les adultes âgés de 18 ans ou plus ont été inclus s'ils avaient suivi une ordonnance de lévothyroxine générique entre le 1er janvier 2008 et le 30 juin 2019 et s'ils avaient une dose de médicament stable, le même fabricant de médicaments et un niveau de TSH normal (0,3-4,4 mUI/L) pendant au moins 3 mois avant de continuer à prendre le même produit ou de changer de produit générique de lévothyroxine (date d'inclusion).

    Les patients ont été exclus en cas de grossesse, s'ils avaient reçu un diagnostic d'hypopituitarisme ou d'hyperthyroïdie, s'ils souffraient d'une maladie ou s'ils prenaient des médicaments susceptibles d'affecter les taux de thyrotropine. Ils étaient également exclus s'ils avaient rempli une ordonnance pour d'autres formes de traitement de substitution en hormones thyroïdienne entre 6 mois avant la date de switch et lorsque le premier dosage de TSH a été obtenu 6 semaines à 12 mois après la date de switch.

    En pratique

    Il s’agit d’une observationnelle et des biais résiduels peuvent exister malgré l'utilisation de l'appariement par score de propension. Mais, étant donné que l'exposition (non-changement ou changement) est probablement un événement aléatoire, avec peu d'influence du patient ou du clinicien, les facteurs de risque résiduels de confusion et de biais de sélection sont probablement faibles.

    Ces résultats sont en contradiction avec les recommandations actuelles qui avertissent les cliniciens de changements potentiels du niveau de la TSH associés au switch d'un produit à base de lévothyroxine entre différents fabricants.  Mais, tels qu’ils apparaissent, ils peuvent rassurer les patients et les cliniciens sur le fait qu'il est peu probable que le switch d'un générique de la lévothyroxine ait des répercussions importantes sur les effets cliniques du traitement.

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    JDF