Psychiatrie

Covid-19 : risque accru de problèmes psychiatriques directement liés à l’infection

Dans l'année suivant une infection à SARS-CoV-2, les malades rétablis seraient beaucoup plus à risque de troubles psychiatriques. Un risque indépendant de la gravité de l’infection, des antécédents des malades et des conditions de vie.

  • Boris Jovanovic/istock
  • 17 Fév 2022
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    Des études antérieures ont évoqué le fait que les personnes atteintes de la Covid-19 pourraient avoir un risque accru de troubles psychiatriques.

    Une très large étude, publiée dans The BMJ, confirme cette hypothèse : elle a analysé les dossiers de près de 154 000 patients après Covid-19 dans le Veterans Health Administration System des Etats-Unis et a comparé leur état psychique au cours de l'année qui a suivi leur guérison de l'infection avec celle d'un groupe similaire de personnes qui n'ont pas contracté le coronavirus ou de celles qui ont eu une grippe les années précédents.

    Selon cette étude, les personnes sans antécédents psychiatriques récents et qui se sont rétablies de la Covid-19 seraient 39% plus à risque de dépression et 35% plus à risque d'anxiété au cours des mois suivant l’infection à SARS-CoV-2, par rapport aux personnes n'ayant pas eu la Covid-19 au cours de la même période ou par rapport aux personnes qui ont eu une grippe les autres années (il n’y a pas eu assez de cas de grippe pendant la Covid-19).

    Les patients Covid-19 seraient également 38% plus à risque de stress avec troubles de l'adaptation et 41% plus à risque de troubles du sommeil que les personnes non infectées. Ils auraient au final une augmentation de 55% du risque de prendre des antidépresseurs et de 65% du risque de prendre des anxiolytiques.

    Des résultats cohérents avec la littérature existante

    Ces résultats font écho à ce qui se dégage d'autres études et renforcent l'idée qu'il y a quelque chose qui se produit dans le cerveau lors de la Covid-19 qui expose les malades et les convalescents à un risque plus élevé de troubles psychiatriques.

    L'isolement social, le stress économique, la deuil et d'autres difficultés rencontrées pendant la pandémie ont certes contribué à l'augmentation des problèmes psychiatriques, comme l'anxiété et la dépression. Mais le fait d'avoir une infection Covid-19 elle-même semble augmenter le risque de développer ces problèmes selon cette très large étude qui n'a porté que sur des malades qui n'avaient reçu aucun diagnostic ou traitement psychiatrique pendant au moins deux ans avant d'être infectés par le coronavirus lui-même.

    Le mécanismes de l’apparition de ces troubles psychiatrique reste incertain, même si les auteurs et les commentateurs font état de problèmes cérébraux induits par la Covid-19 tels qu’une dérégulation de la réponse immunitaire du système nerveux central, une neuroinflammation cérébrale persistante et des microthrombi cérébraux.

    Une très large étude

    L'étude a porté sur les dossiers médicaux électroniques de 153 848 adultes du Veterans Health Administration System qui ont été testés positifs au coronavirus entre le 1er mars 2020 et le 15 janvier 2021, et qui ont survécu pendant au moins 30 jours. Comme il s'agissait du début de la pandémie, très peu ont été vaccinés avant l'infection. Les patients ont été suivis jusqu'au 30 novembre 2021.

    Les patients de Covid ont été comparés à plus de 5,6 millions autres patients du Veterans Health Administration System qui n'ont pas été testés positifs pour le coronavirus et à plus de 5,8 millions de patients avant la pandémie, au cours de la période allant de mars 2018 à janvier 2019. Pour tenter d'évaluer l'impact de Covid-19 sur la santé mentale par rapport à celui d'un autre virus, les patients ont également été comparés à environ 72 000 patients qui ont eu la grippe pendant les deux ans et demi précédant la pandémie. Des ajustements ont porté sur le mode de vie et les paramètres de santés des personnes analysées.

    Un sur-risque psychiatrique qui touche tous les malades

    Dans l'ensemble, plus de 18% des patients sous Covid ont reçu un diagnostic ou une ordonnance pour un problème neuropsychiatrique au cours de l'année suivante, contre moins de 12% dans le groupe non-Covid, ce qui correspond à une augmentation de 60% du risque par rapport aux personnes n'ayant pas eu la Covid-19.

    L'étude révèle également que le sur-risque psychiatrique ne concerne pas que les patients hospitalisés pour Covid-19 : certes, ces derniers sont plus à risque de problème psychiatrique que ceux atteints d'infections moins graves au SARS-CoV-2. Mais les personnes qui ont eu une forme symptomatique légère de la Covid-19 sont tout de même plus à risque que les personnes n'ayant pas eu la Covid-19.

    Le pire de la pandémie est peut-être derrière nous en termes de mortalité et de restrictions sociales et il ne s'agit pas d'une « épidémie d'anxiété et de dépressions », mais il semble y avoir un net excès de diagnostics de troubles psychiatriques dans les mois qui suivent l'administration de Covid-19, et ce sur-risque ne semble pas pouvoir être expliqué par les antécédents des personnes ou leur mode de vie. Ce constat ne peut pas être négligé.

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    JDF