Gastroentérologie

Rectocolite hémorragique : le tofacitinib prometteur en induction et en entretien

Chez les patients souffrant de rectocolite hémorragique modérée à sévère, le tofacitinib est plus efficace que le placebo en induction et en entretien.

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  • 09 Mai 2017
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    Le tofacitinib, un inhibiteur oral de Janus kinase 1 et 3, avait montré en phase 2 un intérêt potentiel en induction dans la rectocolite hémorragique. Dans 3 essais cliniques randomisés internationaux publiés dans le New England Journal of Medicine, l'efficacité du tofacitinib a été évaluée en traitement d'induction et d'entretien.

    Chez les patients souffrant de rectocolite hémorragique modérée à sévère, le tofacitinib 10 mg deux fois par jour est plus efficace que le placebo pour induire une rémission et la cicatrisation des muqueuses coliques. En traitement d'entretien, le tofacitinib, 5 ou 10 mg, deux fois par jour, est plus efficace que le placebo dans le maintien d’une rémission et la cicatrisation des muqueuses.

    Une série d’essais randomisés

    Trois essais randomisés, en double aveugle, versus placebo ont été mis en place pour valider l’efficacité du tofacitinib chez des adultes souffrant de rectocolite hémorragique modérée à sévère.

    Dans les essais OCTAVE Induction 1 et 2, 598 et 541 patients, respectivement, qui avaient une rectocolite hémorragique modérée à sévère malgré un traitement conventionnel ou un anti-TNF, ont été randomisés entre : un traitement d’induction par du tofacitinib (10 mg deux fois par jour) ou un placebo pendant 8 semaines. Le critère principal était la rémission à 8 semaines.

    Dans l'essai OCTAVE Sustain, 593 patients ayant une réponse clinique au traitement par induction ont été randomisés entre : soit un traitement d'entretien par tofacitinib (5 ou 10 mg deux fois par jour), soit un placebo, pendant 52 semaines. Le critère principal était la rémission à 52 semaines.

    Des résultats significatifs en induction

    Dans l'essai OCTAVE Induction 1, la rémission à 8 semaines est obtenue chez 18,5% des patients du groupe tofacitinib versus 8,2% dans le groupe placebo (P = 0,007). Dans l'essai OCTAVE Induction 2, la rémission est obtenue chez 16,6% des malades contre 3,6% dans le groupe placebo (P <0,001).

    Dans les essais OCTAVE Induction 1 et 2, les taux d'infections globales et d'infections graves sont plus élevés avec le tofacitinib qu'avec le placebo.

    Sur les trois essais, un cancer de la peau non mélanome, de même que des événements cardiovasculaires, sont diagnostiqués chez cinq malades qui ont reçu du tofacitinib, contre aucun chez ceux qui ont reçu un placebo. Par rapport au placebo, le tofacitinib est associé à une augmentation des taux de lipides (LDL et HDL).

    Des résultats intéressants en entretien sur 52 semaines

    Dans l'essai OCTAVE Sustain, une rémission à 52 semaines est observée chez 34,3% des malades dans le groupe 5 mg de tofacitinib et 40,6% dans le groupe de 10 mg de tofacitinib contre 11,1% dans le groupe placebo (P <0,001 pour les deux comparaisons avec le placebo ).

    Sur 52 semaines, le taux d'infections graves est similaire dans les trois groupes de traitement, et les taux d'infections globales et d'infections à herpès zooster sont plus élevés avec le tofacitinib que avec le placebo.

    Le taux de sortie d’étude en raison d’un manque d'efficacité, d'un effet indésirable ou d'une aggravation de la rectocolite hémorragique est de 43,9%, 35,7% et 73,2% dans les groupes tofacitinib 5 mg et 10 mg et placebo respectivement.

    En pratique

    Les traitements actuels de la rectocolite hémorragique comprennent la mésalamine, les glucocorticoïdes, les thiopurines, les anti-TNF et les antagonistes de l'intégrine α4β7. Cependant, près de 30% malades n'ont pas de réponse complète avec ces traitements ou ils ont une réponse qui ne se maintient pas durablement : ceci aboutit encore aujourd’hui à 20 à 30% de colectomies complètes.

    La famille Janus kinase (JAK) comprend quatre tyrosine kinases intracellulaires - JAK1, JAK2, JAK3 et « non-receptor tyrosine-protein kinase 2 », qui activent les transcripteurs de signaux et les activateurs de transcription (STAT) de différents récepteurs aux cytokines : interféron de type I, interféron-γ et interleukines 2, 4, 6, 7, 9, 12, 15, 21, 23 et 27, tous impliqués dans la pathogenèse de la rectocolite hémorragique. Le tofacitinib inhibe toutes les JAK mais préférentiellement JAK1 et JAK3. Cette étude rapporte les résultats de trois essais de phase 3 dans la rectocolite hémorragique : deux sur le tofacitinib en traitement d’induction (OCTAVE Induction 1 et 2) et une sur le tofacitinib en traitement d’entretien (OCTAVE Sustain).

    Ce programme OCTAVE a des critères de qualité méthodologiques qui sont bons avec des malades inclus qui correspondent à ceux que les gastroentérologues voient en consultation et des critères cliniques d’efficacité et de tolérance bien définis et bien analysés. En tenant compte de la dose, la concentration moyenne plasmatique de tofacitinib est identique chez les patients en rémission et chez ceux qui ne le sont pas : ainsi, un manque d'efficacité ne peut être en rapport avec une mauvaise absorption.

    Sur la base de ces résultats, est-ce que le tofacitinib est un traitement qui va changer la stratégie dans la prise en charge de la rectocolite hémorragique ? Il est un peu tôt pour le dire, en partie du fait des effets secondaires non négligeables, en partie du fait des taux de réponse qui restent limités. Cependant, le tofacitinib est intéressant, car assez simple à fabriquer, administrable par voie orale et avec un dossier de tolérance dans d’autres maladies très important.

    Le tofacitinib pourrait donc intervenir en alternative à d’autres molécules, molécules qui s’accompagnent également d’effets secondaires sévères. Il s’agit donc d’un traitement prometteur dont la place exacte reste à définir par les recommandations.

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