On connaît l'âge « chronologique » de tous nos patients, mais dans la pratique, on sait que c'est l'âge physiologique, vrai marqueur du vieillissement biologique qui doit être pris en compte pour les prises en charge médicales. Une équipe INSERM vient de mettre au point un outil innovant utilisant l'intelligence artificielle pour l'estimer facilement.

L'âge physiologique est un paramètre important en pratique clinique pour adapter les prises en charge de manière plus personnalisée que sur le « simple » âge chronologique. De plus, le vieillissement biologique et donc l'âge physiologique est un facteur de risque majeur dans nombre de pathologies. Pouvoir estimer de manière fiable et facile cet âge physiologique est donc un enjeu actuel de la recherche. Et une solution efficace émerge.

Une équipe de chercheurs de l'université de Toulouse et de l'INSERM vient de développer un outil innovant utilisant l'intelligence artificielle (IA) pour discerner l'âge physiologique de l'âge chronologique explique un communiqué INSERM dédié. L'approche a aussi fait l'objet d'une publication dans la revue Aging Cell. Comment est construit l'outil ? Quelle future utilisation en pratique clinique ? On vous explique. 

26 variables biologiques de routine pour prédire l'âge physiologique

Des méthodes biostatistiques existent déjà pour estimer ce vieillissement biologique, mais intégraient un nombre réduit de variables et « ne saisissaient pas toute la complexité des interactions entre les paramètres » expliquent les auteurs dans l'article. Ce qui n'est pas le cas de ce nouvel outil d'intelligence artificielle, dénommé PPA pour « personnalized physiological age » ou âge physiologique personnalisé. Il a été créé grâce à un algorithme spécifique ayant analysé un vaste ensemble de données de la population américaine comprenant 26 variables biologiques de routine tels que l'hémoglobine glyquée, la glycémie ou encore l'urémie.

Le PPA permet une estimation précise de l'âge physiologique et peut prédire à la fois les maladies chroniques et la mortalité indépendamment de l'âge chronologique expliquent les auteurs. Et fait supplémentaire intéressant en pratique, ils notent que parmi les variables prises en compte l'hémoglobine glyquée a un poids relatif important dans l'estimation de l'âge physiologique.  

Un « outil pratique et puissant » pour les médecins

Pour les auteurs de l'étude, ce travail, qui a fait objet d'un dépôt de brevet fournit « un outil pratique et puissant prêt à être utilisé dans les soins médicaux », tout en étant aussi évolutif puisqu'il pourra, précisent-ils, intégrer d'autres biomarqueurs selon l'évolution de la science.

« Le PPA permettra au professionnel de santé d'identifier précocement la déviation de son patient par rapport à sa trajectoire de vieillissement normal et de mettre ainsi en place les stratégies pour prévenir l'apparition des maladies chroniques ou diminuer leur gravité » rajoutent les auteurs interviewés par l'INSERM.

Un défi sous-jacent : obtenir la confiance des médecins

La volonté des chercheurs était aussi de proposer un cadre rassurant autour de l'outil, l'IA pouvant, précisent-ils par « sa nature boite noire [qui] échappe à une compréhension directe [limiter] considérablement la confiance des médecins et l'utilisation clinique ». Avec cet outil innovant, l'IA est selon eux plus « transparente » puisqu'elle « définit à l'échelle de l'individu le poids des paramètres utilisés dans le résultat donné, un point crucial pour sa future acceptabilité clinique » souligne le communiqué INSERM dédié.