Rhumatologie

Gougerot-Sjögren : le risque de lymphome associé à une hyperactivité B particulière

Les cytokines BTK et APRIL, témoignant de l'activation des lymphocytes B, sont surexprimées dans le sang périphérique des patients atteints de syndrome de Gougerot-Sjögren primitif avant l'apparition d'un lymphome.

  • Srisakorn/istock
  • 09 Mai 2023
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    Une analyse transcriptomique séquentielle du sang périphérique chez les patients atteints du syndrome de Gougerot-Sjögren primitif indique que la Bruton's tyrosine kinase (BTK) et APRIL, une cytokine qui stimule l'expansion des lymphocytes B, seraient surexprimées chez ceux qui ont ensuite développé un lymphome, selon une étude de chercheurs français publiée dans Arthritis & Rheumatology.

    Cette hyperactivité B a cependant un profil particulier car d'autre maqueurs transcriptionnels de l'hyperactivation B ne sont pas significativement élevés.

    Une analyse transcriptomique séquentielle

    Des analyses séquentielles de l'expression génétique dans le sang total d'une cohorte de 345 patients atteints du syndrome de Gougerot-Sjögren primitif ont montré que, chez 21 d'entre eux ayant développé ultérieurement un lymphome, la BTK serait exprimée à des niveaux 20% plus élevés en moyenne que chez les patients n'ayant pas développé de lymphome. `

    Bien que cette différence puisse sembler modeste, une analyse multivariée prenant en compte d'autres facteurs de risque de lymphome donne un rapport de cotes de 47,6 (IC à 95 ; 5,5-411,9) selon lequel une expression élevée de BTK au moment de l'inclusion dans la cohorte permettrait de prédire l'apparition ultérieure d'un lymphome.

    Une association au lymphome non-hodgkinien

    Le lymphome non hodgkinien (LNH) est relativement fréquent dans le syndrome de Gougerot-Sjögren primitif. Une méta-analyse a montré que le risque était 14 fois plus élevé chez ces patients que dans la population générale. La plupart des cas de LNH sont des tumeurs malignes à lymphocytes B de la zone marginale provenant des mêmes tissus que ceux impliqués dans le Gougerot-Sjögren primitif, comme les glandes salivaires et lacrymales.

    Ces éléments suggèrent une pathogénie commune, centrée sur l'activité des lymphocytes B, ce qui, à son tour, pointe du doigt les facteurs d'activation et de prolifération des lymphocytes B.

    Une cohorte prospective sur le Gougerot-Sjögren

    Des échantillons de sang total périphérique ont été prélevés chez 345 patients atteints de Gougerot-Sjögren primitif (pSS) bien phénotypés et inscrits dans la cohorte prospective ASSESS. L'analyse transcriptomique a été réalisée à l'aide des puces Clariom S Human Arrays (Affymetrix).

    L'analyse primaire a considéré les patients Gougerot-Sjögren primitif atteints d'un lymphome incident (i-pSS-NHL) comme le groupe de cas et tous les patients sans lymphome comme le groupe de comparaison.

    Dans les analyses de sensibilité, tous les patients atteints de pSS-NHL, y compris ceux ayant des antécédents de lymphome (h-pSS-NHL), ont été considérés comme le groupe de cas et les patients sans lymphome ont été analysés en fonction de leurs facteurs de risque de lymphome.

    Des différences statistiques sur BTK et APRIL

    Au total, 21 patients atteints de Gougerot-Sjögren primitif avec lymphome ou pSS-NHL (dont 8 i-pSS-NHL et 13 h-pSS-NHL) ont pu faire l'objet d'une analyse transcriptomique et ont été comparés à 324 témoins Gougerot-Sjögren primitif sans lymphome, dont 110 présentant une activité modérée à sévère de la maladie et 61 ne présentant aucun facteur de risque de lymphome.

    Les analyses de regroupement fonctionnel révèlent un enrichissement des gènes liés à l'immunité innée et adaptative, notamment des gènes liés aux lymphocytes B. Les gènes de la tyrosine kinase de Bruton (BTK) et d'un ligand induisant la prolifération (APRIL) sont surexprimés avant la survenue du lymphome chez les patients présentant un lymphome incident par rapport aux patients sans lymphome.

    Dans les analyses de sensibilité, le gène BTK est systématiquement régulé à la hausse dans toutes les comparaisons effectuées. L'expression de BTK est associée au risque de lymphome lors d'analyses multivariées prenant en compte 9 facteurs prédictifs validés de lymphome dans le SSP.

    Quelques surprises concernant BAFF et BCMA

    Au-delà de BTK et APRIL, les chercheurs ont analysé les niveaux d'expression de huit gènes au total, dont les produits sont connus pour leur implication dans l'activation des lymphocytes B. Parmi ceux-ci, BTK et APRIL sont apparus comme les plus étroitement associés au développement du lymphome mais à la surprise des chercheurs, d'autres gènes, tels que le B-cell activating factor (BAFF) et le B-cell maturation antigen (BCMA), n'étaient pas clairement surexprimés (augmentations simples par rapport aux patients atteints du syndrome de Gougerot-Sjögren primitif ne souffrant pas de lymphome, mais pas statistiquement significatives).

    L'étude comporte un certain nombre de limites, notamment la petite taille de l'échantillon avec les larges intervalles de confiance qui en résultent dans les analyses d'expression génique. En conséquence, les auteurs soulignent que l'association qu'ils ont trouvée entre BTK, APRIL et pSS-NHL edoit être confirmée dans d'autres cohortes prospectivese, avant de tester les inhibiteurs de BTK dans cette population.

     

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    JDF