Moustique tigre

Dengue : l’infection laisse une empreinte durable sur l’immunité

Des chercheurs ont découvert que le virus de la dengue laisse une empreinte génétique durable sur le système immunitaire. Cette découverte pourrait aider à mettre au point des vaccins plus efficaces.

  • Kitsawet Saethao/dengue
  • 09 Septembre 2025
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    Entre les fréquentes épidémies dans les zones tropicales et le nombre grandissant de cas autochtones chaque été dans l’Hexagone, la dengue fait partie des maladies qui inquiètent de plus en plus les autorités sanitaires. Les scientifiques s’attellent à mieux comprendre cette infection transmise par les moustiques tigres.

    Et, des chercheurs de Duke-NUS Medical School ont fait une découverte qui pourrait aider à mettre au point des vaccins plus efficaces. Le virus de la dengue peut “reprogrammer” le système immunitaire de l'organisme, laissant une empreinte génétique durable qui influence la façon dont les gens réagissent aux infections futures et à la vaccination.

    Dengue : le virus “reprogramme” le système immunitaire

    Un vaccin contre la dengue est disponible sur le marché. Toutefois, il est plus efficace lorsque le patient a déjà été infecté au préalable par l’un des quatre virus de la maladie. C’est pour comprendre ce phénomène que les scientifiques ont réuni 26 volontaires de 2018 à 2020. Certains avaient déjà eu la dengue, d’autres non.

    Les participants ont reçu deux doses de vaccin contre la dengue, administrées à 90 jours d'intervalle. Des échantillons sanguins ont été prélevés, analysés et comparés. "Afin d'assurer une plus large représentativité, une cinquantaine de volontaires de Singapour n'ayant pas été récemment infectés par le virus de la dengue ont également fourni des échantillons sanguins à analyser de 2022 à 2023", précisent les auteurs dans leur communiqué.

    Les chercheurs ont alors remarqué qu’avant même la vaccination, les personnes ayant déjà eu la dengue présentaient des schémas distincts d'activité génétique. De plus, ils n'étaient pas observés - comme attendus - dans les cellules mémoires qui produisent les anticorps, mais dans des types spécifiques de cellules immunitaires infectées par le virus.

    "Nos résultats montrent qu'une infection naturelle par la dengue peut laisser une empreinte génétique durable sur le système immunitaire. Au lieu de revenir à la normale, le système immunitaire se réinitialise à un nouveau niveau de référence. Ce qui pourrait expliquer pourquoi les secondes infections par la dengue sont souvent plus graves", explique la Dr Eugenia Ong, première auteure de l’étude.

    Une réponse immunitaire plus forte chez les sujets déjà infectés

    Après avoir observé ce phénomène, les travaux ont montré que chez les volontaires déjà infectés par la dengue, la première dose du vaccin déclenchait une réponse immunitaire plus forte que chez les personnes n’ayant jamais contracté la maladie. Les chercheurs ont également eu la confirmation que la vaccination seule ne laisse pas d’empreinte génétique durable. Ce qui pourrait expliquer pourquoi les vaccins sont moins efficaces chez les patients n’ayant jamais eu la dengue.

    "Pensez le comme un entraînement sportif : le système immunitaire ne s’entraîne réellement qu’en jouant un match complet, l’équivalent d’une infection naturelle. Un léger échauffement dû à la vaccination ne suffit pas à le reprogrammer. Il y a donc un seuil de réponse immunitaire nécessaire pour laisser une empreinte sur le système immunitaire", souligne Pr Ooi Eng Eong, auteur principal.

    Dengue : mieux comprendre l’infection pour améliorer les vaccins

    Ce n’est pas la première fois que des scientifiques remarquent que des infections laissent des traces persistantes dans le système immunitaire. Le paludisme présente un effet similaire ainsi que le BCG (après la vaccination). Ces nouveaux travaux, publiés dans la revue Med, permettent d'ajouter la dengue à cette liste et montrent que le type ainsi que l'intensité de l'infection ont tous deux leur importance.

    "Cette étude comble une lacune cruciale dans notre compréhension de la façon dont l'infection remodèle le système immunitaire. Ces informations sont essentielles non seulement pour développer de meilleurs vaccins, mais aussi pour orienter les politiques de santé mondiales et nationales", ajoute le professeur Patrick Tan, vice-doyen principal chargé de la recherche à la faculté de médecine de Duke-NUS

    L’équipe souligne qu'il est "peu probable qu'un vaccin parfait contre la dengue soit développé dans les dix prochaines années". Toutefois, elle rappelle que les produits actuellement disponibles montrent une efficacité interessante et aident à réduire le nombre de cas de dengue graves.

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