Pneumologie
Vapotage : même exposition à la nicotine qu’avec le tabagisme chez les adolescents
L’utilisation du vapotage chez les jeunes est une pratique qui comporte encore beaucoup d’inconnues. Les travaux sur le sujet se multiplient. Un travail a montré que la consommation de nicotine est similaire chez les adolescents qui fument et ceux qui vapotent. D’après un entretien avec Yiannis PSONKA.

Une étude, dont les résultats sont parus en avril 2025 dans le JAMA Network Open, a cherché à apporter des données supplémentaires sur les expositions liées au vapotage, chez les adolescents, notamment à la nicotine. Il s’agit d’une étude réalisée dans trois pays différents, le Canada, les USA et le Royaume-Uni, au cours de laquelle les auteurs ont créé quatre groupes de sujets, âgés de 16 à 19 ans : les vapoteurs exclusifs, les fumeurs exclusifs, les vapoteurs-fumeurs et les non-fumeurs/ non Vapoteurs. Au total, 720 sujets ont donc été inclus, dans cette étude qui s’est déroulée de septembre 2019 à janvier 2022. L’exposition totale à la nicotine a été évaluée par le dosage de la cotinine urinaire et de ses dérivés. Les sujets ont conjointement répondu à un questionnaire en ligne permettant de déterminer leur dernière prise de nicotine, de quelle manière elle a eu lieu, la dernière utilisation de la cigarette électronique, l’historique du tabagisme… Les auteurs ont ensuite pu déterminer 4 catégories de sujets en fonction de leur exposition à la nicotine sur les 7 jours précédents : pas d’exposition à la nicotine, exposition entre 1 et 20 mg par ml, exposition à plus de 20mg par ml , exposition inconnue. Ils ont ensuite fait une analyse de sensibilité en fonction de la consommation de tabac sans fumer, du tabagisme passif et de la consommation de substituts nicotiniques puis ont comparé l’exposition à la nicotine en fonction du statut tabagique de chaque sujet.
Une même exposition à la nicotine quel que soit le type de consommation
Le docteur Yiannis PSONKA, tabacologue et pneumologue au Centre Hospitalier Universitaire de Lille, rappelle qu’il existe peu de données sur l’exposition à la nicotine chez les vapoteurs exclusifs et il insiste sur la variété des dispositifs utilisables ainsi que des liquides consommés, contentant notamment soit des sels de nicotine soit de la nicotine base. Cette variété entraine des profils de tolérance différents. Il note un point de vigilance lié à l’impact du COVID, qui a modifié les habitudes, au moment du déroulement de cette étude, avec, de surcroît, la survenue conjointe des pneumonies aigues induites par le vapotage. Les résultats de ce travail ont montré que seulement 371 sujets sur les 720 inclus ont répondu au questionnaire. L’objectif de recrutement n’est donc pas atteint. Parmi les répondeurs, une majorité de femmes a été observée, et il y a deux fois plus de vapoteurs exclusifs outre-Atlantique, versus davantage de fumeurs exclusifs au Royaume-Uni, probablement pour des raisons culturelles. La majorité des sujets répondeurs étaient non consommateurs de cannabis. La consommation exclusive de cannabis était plus répandue au Canada et aux USA. Yiannis PSONKA relève surtout qu’il n’y avait pas de différence d’exposition à la nicotine entre les vapoteurs, les fumeurs-vapoteurs, et les fumeurs. Ils sont identiquement exposés et absorbent la nicotine de la même manière, sans qu’aucune différence ne soit observée en fonction des pays d’origine. Concernant l’exposition à la nicotine en fonction des caractéristiques du vapotage, il n’a été observée aucune variation. Les sels de nicotine favorisent une absorption plus profonde. L’historique du tabagisme n’a pas non plus montré de différence dans l’exposition à la nicotine.
Une nécessité de mieux connaitre les produits de vapotage
Yiannis PSONKA précise, qu’en tenant compte des autres travaux réalisés sur le vapotage, l’impression est que la plupart des utilisateurs ne savent pas ce qu’ils consomment en terme de nicotine, notamment le type de nicotine, sa quantité ou sa concentration. Le message à tirer est que le vapotage est utile pour aider au sevrage tabagique car les fumeurs auront leur dose de nicotine mais qu’il est dangereux chez les jeunes qui n’ont jamais fumé car il entraine une dépendance chez des sujets qui ne maitrisent pas leur exposition. Ce type de consommation est la pire situation car les jeunes s’exposent à un produit nocif, avec un potentiel de dépendance, sans maîtrise. Yiannis PSONKA souligne également que les pneumologues et tabacologues doivent, eux- aussi, bien connaitre les produits de vapotage, sans se contenter d’une comptabilisation du tabagisme, pour pouvoir être en mesure de répondre aux questions des usagers. Des progrès sont à faire, de toutes parts, dans la connaissance des produits de vapotage, qui doit rester un outil d’aide au sevrage tabagique en ayant à l’esprit le danger qu’il représente chez quelqu’un qui n’a jamais fumé. L’utilisation exclusive du vapotage chez un sujet qui n’a jamais fumé ou son utilisation conjointe avec le tabagisme n’ont aucun intérêt. La double consommation entraîne un cumul des risques. De plus l’utilisation du vapotage comme aide au sevrage tabagique doit être temporaire et suivie d’une décroissance progressive.
En conclusion, ce travail, même s’il ne bouleverse pas la vision du vapotage et du tabagisme, apporte des données intéressantes sur l’utilisation du vapotage chez les jeunes dans différents pays. Le rôle principal du vapotage doit rester une aide au sevrage tabagique, sinon : attention danger !