Pédiatrie
Accouchement à domicile : un risque accru pour le nouveau-né
A l’heure des fermetures de maternités dans l’Hexagone, peut-on accoucher sans danger à domicile ou dans des maisons de naissance ?
- StudioYummy/istock
Depuis plusieurs décennies, le débat autour de la place de l’accouchement — hôpital vs domicile / maison de naissance — suscite un intérêt croissant. Pour de nombreuses femmes, l’accouchement “en communauté” (domicile ou maison de naissance) est associé à un désir d’un accompagnement plus naturel, moins interventionniste, et à une naissance respectueuse de la physiologie. Plusieurs travaux — dont des méta-analyses et revues systématiques — ont cherché à comparer les conditions d’accouchements selon le lieu de naissance prévu
Toutefois, un problème méthodologique récurrent a limité la valeur des conclusions : la mauvaise classification des “transferts” vers l’hôpital. En effet, de nombreux enfants nés à l’hôpital après transfert d’un projet initialement domicilié sont comptabilisés comme des “naissances à l’hôpital”. Ce qui masque les risques potentiels liés au choix initial.
La planification du lieu de naissance
C’est dans ce contexte que l’étude récemment publiée dans JAMA Pediatrics — intitulée Planned Community Birth and Birth Outcomes — revêt un intérêt particulier : l’analyse se base sur la “planification du lieu de naissance” au moment du début du travail, et distingue clairement les accouchements “communautaires menés à terme” des naissances transférées vers un hôpital.
La méthodologie est particulièrement robuste. Elle a inclus 348 641 grossesses uniques sans présentation en siège, sans anomalies létales, à terme (37–44 semaines), sur la période 2012–2020 dans l’État de l’Oregon (Etats-Unis). 95,3 % des grossesses visaient un accouchement à l’hôpital (332 313), 4,7 % un accouchement au domicile ou dans les maisons de naissance. (16 328)
Près de 15% de transferts à l’hôpital
Parmi celles planifiées en “communautaire”, 14,7 % (2 402) ont fait l’objet d’un transfert à l’hôpital en cours de travail. L’accouchement communautaire planifié (globalement) était associé à une augmentation des risques néonatals : odds ratio (OR) ajustée pour un score APGAR à 5 min < 7 de 1,34 (IC 95 % 1,19–1,50) — soit une hausse significative du risque de souffrance néonatale. Le besoin de ventilation néonatale était également plus fréquent (aOR 1,14 ; IC 95 % 1,05–1,24) comparativement aux accouchements planifiés à l’hôpital. En revanche, les accouchements communautaires “achevés” — c’est-à-dire sans transfert — n’étaient pas associés à des résultats périnataux défavorables. De plus, ils présentaient moins d’interventions obstétricales de type césarienne, recours à des ventouse/forceps
À l’inverse, les accouchements initialement planifiés hors hôpital mais transférés vers l’hôpital montraient des taux plus élevés d’issues défavorables et d’interventions médicales. Ce qui souligne l’importance d’un conseil éclairé, d’une sélection rigoureuse des patientes, d’une préparation sérieuse du parcours de naissance (accès rapide à un hôpital, réseau de transfert efficace, personnel formé).
Distinction entre “lieu de naissance planifié” et “lieu de naissance effectif.”
L’étude de l’Oregon corrige une faiblesse méthodologique majeure des travaux antérieurs : la distinction entre “lieu de naissance planifié” et “lieu de naissance effectif.”
En distinguant les accouchements “achevés dans la communauté” des transferts, elle montre que le risque associé au domicile / maison de naissance est largement conditionné à la survenue d’un transfert en cours de travail. Autrement dit, ce n’est pas tant l’accouchement hors hôpital en soi, mais la nécessité d’un transfert qui semble être le vrai facteur de risque.
Les naissances à la maison menées à terme sans transfert ont non seulement des issues périnatales comparables à l’hôpital, mais aussi moins d’interventions obstétricales — ce qui peut répondre à un désir de “naissance physiologique” et moins médicalisée.
Moins de 1% des naissances en France
En France, une étude de cette dimension ne serait sans doute pas envisagée. L’accouchement à domicile demeure une pratique très minoritaire. Et représente moins de 1% du total des naissances, voire 0, 6% en 2024, selon les données provisoires.











