Rhumatologie

Syndrome de fatigue chronique : définitivement pas une maladie psychosomatique

Une nouvelle étude a réalisé l’ensemble de mesures biologiques le plus étendu chez des personnes souffrant de Syndrome de Fatigue Chronique post-infectieux (PI-ME/SFC) par rapport à toutes les études antérieures. Malgré un échantillon de taille réduite, cette étude met en lumière des altérations immunobiologiques et confirme certaines altérations précédemment rapportées.

  • Maridav/istock
  • 24 Fév 2024
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    L'encéphalomyélite myalgique post-infectieuse/syndrome de fatigue chronique (EM/SFC) est une maladie invalidante, dont le phénotype clinique est mal défini, la physiopathologie inconnue et pour laquelle il n'existe pas de traitement modificateur.

    Il y a sept ans, les National Institutes of Health ont lancé une étude sur 17 patients souffrant d'EM/SFC qui se sont soumis à une série de tests et d'évaluations de leur sang, de leur corps et de leur cerveau.

    La caractérisation du ME/SFC se heurte à la validité des manifestations attribuées à la dépression ou à l'anxiété. La cohorte a subi des tests de validité de performance conséquents, montrant une consistance des symptômes, indiquant une véritable représentation de leur maladie. Tous les patients ont témoigné d'une bonne santé antérieure, suivie d'une infection déclenchante des symptômes de ME/SFC. L'équipe d'étude a utilisé des critères rigoureux pour recruter des participants atteints d'EM/SFC et des témoins appariés afin de procéder à un phénotypage approfondi.

    Les résultats de l'étude, publiés mercredi dans la revue Nature Communications, montrent des différences physiologiques notables dans le système immunitaire, les fonctions cardiorespiratoires, le microbiote intestinal et l'activité cérébrale des patients atteints d'EM/SFC, par comparaison à un groupe de 21 témoins en bonne santé.

    Une altération des capacités à l’effort

    Parmi les nombreuses plaintes physiques et cognitives, l'un des traits caractéristiques de l'EM/SFC est une altération préférentiellement à l'effort, plutôt qu'une fatigue physique ou centrale. Ainsi, l’analyse révèle l'absence d'un état de faible énergie au repos chez les participants, mais des différences notables sont observées durant les tâches physiques, suggérant une dysfonction des régions cérébrales intégratives chez les participants malades. Cette observation, non décrite précédemment dans cette population, souligne la complexité de la fatigue ressentie, liée préférentiellement l'effort, plutôt qu'à une fatigue intrinsèque.

    Le profilage immunitaire suggère l’existence d’une stimulation antigénique chronique avec une augmentation des lymphocytes B naïfs et une diminution des lymphocytes B mémoires commutées.

    Les altérations des profils d'expression génique des cellules mononucléaires du sang périphérique et des voies métaboliques sont cohérentes avec les études phénotypiques cellulaires et montrent des différences en fonction du sexe. Ensemble, ces anomalies cliniques et ces différences de biomarqueurs donnent un aperçu unique de la physiopathologie sous-jacente du syndrome de fatigue chronique, ce qui peut guider les interventions futures.

    Une maladie médiée centralement

    Les résultats indiquent que le PI-ME/SFC pourrait être une maladie médiée centralement, avec des implications importantes pour la compréhension et le traitement du syndrome. Les résultats peuvent avoir des implications pour les patients souffrant d'un Covid long, qui comprend souvent des symptômes similaires ou identiques à ceux de l'EM/SFC. Bien que les participants à l'étude aient été recrutés avant la pandémie, ils souffraient tous d'un type d'EM/SFC précédé d'une infection, tout comme le Covid long est précédé d'une infection par le coronavirus.

    Les différences au niveau du système immunitaire ont été parmi les découvertes les plus claires, a déclaré le Dr Anthony Komaroff, professeur de médecine à la Harvard Medical School, au New York Times, qui n'a pas été impliqué dans l'étude mais a servi de reviewer de l'étude. « Ils ont constaté une activation chronique du système immunitaire, comme si celui-ci était engagé dans une longue guerre contre un microbe étranger, une guerre qu'il ne pouvait pas complètement gagner et qu'il devait donc continuer à mener », a-t-il déclaré.

    Le Dr Nath a expliqué que sa théorie est que, dans l'EM/SFC de longue durée et post-infectieux, « soit il reste des morceaux de l'agent pathogène qui alimentent la maladie, soit l'agent pathogène a disparu, mais quel que soit l'effet qu'il a eu sur le système immunitaire, celui-ci ne s'est jamais stabilisé à nouveau ».

    Une première étape mais une maladie immunitaire

    Les experts ont déclaré que l'étude, qui est la première analyse détailléé des National Institutes for Health sur l'EM/SFC, ne doit être considérée que comme une étape dans la compréhension de la pathologie, de sa gravité et des remèdes potentiels. Les résultats les plus importants sont que la pathologie est due à une dysrégulation du système immunitaire et que les chercheurs ont clairement indiqué qu'il s'agissait d'une pathologie physiologique et non d'une maladie psychosomatique.

    Mais l'étude n'a pas retrouvé certaines des signatures médicales de la pathologie qui ont été documentées dans d'autres études. Par exemple, elle n'a pas révélé que les patients obtenaient de moins bons résultats aux tests cognitifs ou qu'ils présentaient une neuro-inflammation. Certains experts ont expliqué ces manques par le fait que les chercheurs des NIH ont sélectionné des patients plutôt en bonne santé et qui pourraient ne pas être complètement représentatifs du syndrome de fatigue chronique.

    Cet article met en lumière l'importance d'une approche multidisciplinaire et personnalisée dans le diagnostic et le traitement du syndrome de fatigue chronique post-infectieux, en soulignant le rôle crucial de la recherche continue pour surmonter les défis diagnostiques et thérapeutiques associés à cette pathologie débilitante.

     

     

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    JDF