Pneumologie

Sevrage tabagique : proposer avant la demande

Proposer systématiquement un sevrage tabagique sans attendre la demande du patient est efficace et renforce son sentiment d'autonomie. Une étude randomisée a montré que l’incitation, si elle est précoce, augmentait les chances de sevrage tabagique, en faisant partie de la prise en charge globale. D’après un entretien avec Corinne VANNIMENUS.

  • 29 Jun 2023
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    Une étude américaine, dont les résultats sont parus en mars 2023 dans le JAMA International Medicine, a cherché à évaluer  l’efficacité de l’incitation au sevrage tabagique chez des patients consultant en pneumologie, cardiologie ou chirurgie cardiothoracique, avant qu’ils n’en ait eux-mêmes exprimé la demande, en incluant le sevrage comme un élément de prise en charge au même titre que les bilans et thérapeutiques. Les auteurs sont partis du  constat que le tabac est la cause de 7 millions de morts par an et que les conseils et les méthodes de sevrages sont encore insuffisamment proposés. Il s’agit d’une étude randomisée pour laquelle les auteurs ont inclus 1000 patients adultes , issus de l’hôpital de Kansas-City, entre septembre 2016 et septembre 2021. Ils ont été suivis jusqu’en mars 2021. Une consultation avec un tabacologue a été systématiquement proposée dans l’un des 2 deux groupes et les patients ont été suivis à 1 mois et à 6 mois.

     

    Une première étude randomisée

    Le docteur Corinne VANNIMENUS, pneumologue et responsale de l’unité de tabacologie du Centre Hospitalier Universitaire de Lille, explique que cette étude démontre l’intérêt de proposer une consultation avec un tabacologue sans attendre la demande du patient, alors que celui-ci se présente pour une consultation en pneumologie, cardiologie ou chirurgie cardiothoracique. Il s’agit d’un changement de vue, qui sans attendre l’expression de la motivation du patient, permet au praticien de proposer le sevrage tabagique d’emblée, au même titre que tout autre bilan paraclinique ou thérapeutique, appartenant à la prise en charge globale. Corinne VANNIMENUS souligne qu’il s’agit s’une première étude randomisée, même si quelques réflexions sur le sujet avaient déjà été proposées. Elle précise que la méthodologie de ce travail est particulière, compte tenu du volume du groupe s’étant vu proposé une consultation en tabacologie e manière systématique. Toutefois, les résultats ont montré que ceux qui ont adhéré immédiatement au projet de prise en charge, on été plus fréquemment sevrés que ceux qui ont attendu 6 mois. Elle remarque également que le dosage de la cotinine salivaire n’était pas systématique. Une incitation financière, non réalisée en France, chez les patients revenant en consultation avec un dosage de la cotinine salivaire était proposée.

     

    Un changement de paradigme

    Corinne VANNIMENUS estime que la démarche est intéressante et crée un changement de paradigme. Avec une nouvelle prise en charge qui renforce l’alliance avec le praticien. Cette technique est déjà utilisée en France lors des consultations en pneumologie, cardiologie ou chirurgie cardiothoracique mais que ce n’est pas aussi facile qu’il n’y parait. Pour Corinne VANNIMENUS, il est utile faire un premier « débrouillage » immédiat puis de revoir le patient 3 semaines à 1 mois plus tard, afin de ne pas alourdir la prise en charge. Le praticien doit y penser et y passer du temps et le patient doit comprendre que le sevrage sera plus simple s’il est pris en charge rapidement. En effet, 25 à 30% des patients  seront perdus de vue par le tabacologue s’ils tardent trop. Elle conclue qu’il est encore trop tôt pour affirmer que cette technique de prise en charge est efficace mais il semble, qu’à ce jour, elle apporterait un bénéfice aux patients la prenant en compte précocement.

    En conclusion, inciter les patients consultant en pneumologie au sevrage tabagique, en l’incluant dans le « package-bilan » sans attendre l’expression de leur motivation, en proposant immédiatement une consultation avec un tabacologue serait un moyen de sevrage efficace. Ces résultats sont encore à préciser et à évaluer mais toutes les nouvelles pistes  sont bonnes à prendre pour l’arrêt du tabac…

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    JDF