Justice

Royaume-Uni : l'alcool pendant la grossesse bientôt un délit ?

En Angleterre, boire durant sa grossesse pourrait être pénalisée. La justice du pays va se pencher sur le cas d'une fillette frappée du trouble de l'alcoolisation foetale, et statuer sur le cas de la mère.

  • Par la rédaction
  • DURAND FLORENCE/SIPA
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  • 06 Fév 2014
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    La consommation d'alcool par des femmes enceintes pourrait devenir un délit devant la loi britannique. L'histoire rapportée par le site web du l'hebdomadaire Le Point se déroule dans le comté anglais du Grand Manchester. Là-bas, le système de santé de la ville de Manchester a pris à sa charge depuis maintenant deux ans une fillette handicapée victime du syndrome d'alcoolisation fœtale, et placée en famille d'accueil. Mais désormais, la municipalité britannique demande une compensation financière à la mère biologique de l'enfant, responsable du handicap de sa fille. Elle doit participer aux nombreux frais médicaux.

    « Pas de préjudice possible pour un foetus »
    En 2011, les élus du Conseil municipal de Manchester ont saisi le tribunal régional du comté pour faire condamner cette mère, au titre de la loi de 1861 sur les préjudices physiques causés aux personnes. Cette compensation s'inscrirait, selon eux, dans un système d'indemnisation relatif aux victimes de crimes. Après jugement, cette première jurdiction a établi un lien direct entre les excès maternels et la maladie. Elle a condamné de facto la mère à une obligation d'indemnisation. Mais par la suite, une autre juridiction, la Chambre d'appel administrative, a cassé cette décision en décembre 2013 au motif que l'enfant « non-né » n'était pas une « personne » à part entière, et que donc qu'il ne pouvait y avoir de préjudice sur un foetus.

    La Cour d'appel d'Angleterre peut créer une nouvelle jurisprudence 

    Ainsi, c'est désormais à la Cour d'appel d'Angleterre, la deuxième plus haute autorité judiciaire du pays après la Cour suprême, de trancher ce débat. Si elle décidait d'abonder dans le sens du Conseil municipal de Manchester, elle créerait avec cette décision une nouvelle jurisprudence, un précédent qui aurait valeur de loi. De ce fait, toutes les atteintes physiques causées par l'abus d'alcool au fœtus deviendraient alors répréhensibles sur l'ensemble du territoire britannique, comme c'est le cas, par exemple, aux Etats-Unis, ou en Pologne.
    Et cette jurisprudence pourrait bien entraîner de nombreuses condamnations, car ce syndrome est loin d'être un phénomène anodin. Selon le ministère de la Santé, ce trouble du spectre de l'alcoolisation fœtale concernerait chaque année à des niveaux d'intensité variable environ 7000 naissances au Royaume-Uni. Ce chiffre se doit néanmoins d'être nuancé, selon des experts britanniques interrogés par Le Figaro, car « le lien entre infirmité et habitudes de consommations d'alcool reste encore difficile à évaluer. » De plus, avec l'alcool, il n'y a pas de dose dénuée de risques pour le foetus.

    Alcool : pas de dose dénuée de risques pour le foetus
    L’alcool est, en effet, une substance particulièrement tératogène, c’est-à-dire responsable de malformations chez le fœtus. Chaque verre expose donc potentiellement l’enfant à naître à un risque, sans qu’il soit possible de définir une dose ou une période moins dangereuse qu’une autre.
    Et les conséquences pour les 7500 à 8000 enfants concernés chaque année en France sont très variables. Différents organes peuvent être atteints, le coeur ou le palais par exemple, mais l'alcool reste particulièrement délétère pour le cerveau de l'enfant. Le syndrome d’alcoolisation fœtale est la 1e cause de retard mental non génétique en France. A des degrés moindres, les enfants présentent des troubles de l’attention, des difficultés de concentration, de mémorisation à court terme ou encore d’apprentissage du calcul. 

    Enfin, il y aussi un prix à payer pour la société : la prise en charge d'un enfant victime du syndrome d'alcoolisation foetale coûte 1,3 million d’euros, alors que son handicap était totalement évitable, s'inquiétait récemment dans pourquoidocteur le Dr Denis Lamblin, pédiatre à Saint-Denis de la Réunion, et président de l’association Syndrome d’alcoolisation foetale France (SAF).

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    JDF