Sécurité alimentaire

Risques liés aux nitrites dans la charcuterie: le vrai/faux

Un rapport parlementaire rendu le 13 janvier 2021 invite à retirer progressivement les sels nitratés de l’ensemble de la charcuterie d’ici à 2025. Si ces sels sont controversés, les industriels plaident pour leur conservation, notamment pour protéger du botulisme. Un faux problème pour les professionnels de santé.

  • Par David Ravier
  • iStockphoto.com/Casanisaphoto
  • 13 Jan 2021
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    Les sels nitrités présents dans la charcuterie pourraient vivre leurs derniers instants. Cet additif rajouté dans la viande de porc, afin de limiter son oxydation et qu’il conserve une couleur rosée plus longtemps, est dans le collimateur des parlementaires. Un rapport, présenté le 13 janvier 2021, plaide pour un bannissement progressif des sels nitrités d’ici à 2025. 


    Un additif massivement utilisé depuis 1964

    Le sel nitrité, également appelés nitrite de sodium, estampillé E250 dans l’industrie alimentaire, est un additif controversé. Autorisé dans l’alimentation en France depuis 1964, les industriels l’utilisent dans la composition de leurs produits pour limiter l’oxydation de la charcuterie. Grâce à ses propriétés, il est également reconnu comme étant un conservateur alimentaire, ce qui lui permet de “fixer” la couleur (notamment de la viande) plus longtemps. 


    Les nitrites, un agent cancérogène : VRAI

    Toutefois, l’utilisation des sels nitrités n’est pas sans danger pour la santé humaine. Au contact des amines produits naturellement par notre corps, les sels nitrités produisent des nitrosamines, un puissant agent cancérogène. Pour cette raison, les charcuteries composées de sels nitrités sont considérées par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) comme des “cancérogènes certains” depuis 2015 et entrent dans la catégorie des cancérogènes du groupe 1. En effet, manger de la charcuterie favoriserait l’apparition de cancers du côlon ou de l’intestin. Dans un rapport qu’il a émis en 2018, le CIRC estime qu’en France, 3 880 cancers colorectaux ont imputables à la consommation de charcuterie en 2015.


    Les nitrites protègent du botulisme: VRAI, mais ...

    En face, les industriels plaident la bonne foi. Depuis plusieurs années, des gammes “zéro nitrite” ont fait leur apparition sur les étals des grandes surfaces, à la demande de consommateurs de plus en plus soucieux des produits présents dans leurs assiettes. Néanmoins, la grande majorité des produits charcutiers contiennent encore des sels nitrités, même si les doses sont moins importantes. L’un des arguments avancés par les professionnels de la charcuterie en faveur de la préservation du nitrite de sodium dans les plats réside dans la protection que confère cet additif contre le botulisme.


    Le botulisme, un risque grave : VRAI

    Le botulisme est une maladie rare et grave qui, en France, se développe principalement avec la viande conservée. En raison de son développement dans les viandes qui se conservent longtemps, il est essentiellement présent chez nous dans le jambon, les saucisses et toutes les charcuteries. Le botulisme est dû à une neurotoxine bactérienne, la toxine botulique, qui paralyse progressivement le corps en 12 à 36 heures. Les premiers signes se manifestent par une paralysie des nerfs crâniens, notamment au niveau des yeux, ainsi que par des symptômes faisant penser à une gastro-entérite. Plus la prise en charge est tardive, plus la paralysie a le temps de s’installer dans le corps. En permettant une meilleure conservation des aliments, les sels nitrités limitent le développement de la bactérie. 


    Le risque de botulisme justifie l'utilisation des nitrites : FAUX

    Pour autant, chez les professionnels de santé, c’est un faux problème de penser que les sels nitrités devraient être conservés uniquement pour cette raison. D’une part, la balance bénéfice/risque plaide plus en faveur de l’incidence sur les cancers colorectaux que de la protection du botulisme.


    D'autres moyens existent pour se protéger du botulisme : VRAI

    D’autre part, d’autres techniques existent pour prévenir du botulisme sans pour autant avoir recours au nitrite de sodium. Un constat partagé par Axel Kahn, président de la Ligue contre le cancer: “si on veut sauver la charcuterie française, il faut la rendre moins cancérigène en sortant des nitrites. C’est tout à fait possible, car elles ne servent à rien pendant la salaison, et d’autres moyens existent pour limiter la germination des spores botuliques.

    Notons enfin que si les cas de botulisme sont toujours présents en France, ils surviennent majoritairement chez des personnes réalisant leur propre charcuterie, sans forcément respecter les bonnes normes ou techniques pour se protéger de la bactérie.  

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    JDF