Rhumatologie

Hyperparathyroïdie primaire : risque osseux, cardiovasculaire et rénal majeur

Dans une large cohorte prospective suédoise, une hyperparathyroïdie primaire ressort comme un facteur de risque majeur d’évènements cardiovasculaires, de fractures de tous types et de calculs rénaux. La parathyroïdectomie réduit très probablement ces risques chez les malades les plus sévères.

  • Shidlovski/istock
  • 08 Jul 2022
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    Dans la plus large étude prospective à ce jour, les patients atteints d'hyperparathyroïdie primaire (HPT1) non traitée ont une augmentation significative du risque de fracture de la hanche, d’événements cardiovasculaires, de problèmes rénaux et de décès par rapport à des témoins appariés. De plus, au moins chez les malades les plus sévères, ce risque serait réduit après une parathyroïdectomie.

    Ces résultats sont issus du suivi d’une large cohorte prospective suédoise sur plus de 16 000 malades, opérés ou non, et ils sont publiés dans JAMA Network Open. Ils suggèrent néanmoins un bénéfice clinique de la chirurgie.

    Augmentation nette des risques de complications

    Sur un suivi moyen de 1,2 an pour les patients atteints d'hyperparathyroïdie et de 4,6 ans pour les témoins, les patients atteints d'hyperparathyroïdie primaire ont une augmentation de 39% du risque de fracture de tous types, de 51% pour la fracture de hanche, de 45% pour les événements cardiovasculaires et un risque multiplié par presque 4 de calculs rénaux (RR = 3,65) (p< 0,001 pour toutes les comparaisons).

    Leur risque de décès toutes causes confondues et de décès d'origine cardiovasculaire est également plus élevé que celui des témoins (72% et 73%, respectivement ; p < 0,001). Après ajustement sur l'âge, le sexe, les comorbidités (indice de Charlson) et les fractures antérieures, la magnitude de ces réductions de risques baisse, mais reste cependant très significative (p <0,001 pour tous les risques sauf la fracture de hanche : p = 0,002).

    Effets de la parathyroïdectomie

    Parmi ces patients atteints d'hyperparathyroïdie primaire, 42,3% ont eu une parathyroïdectomie, environ 6 mois en moyenne après le diagnostic, sans que l’on sache précisément pourquoi ceux-là ont été opérés mais les patients opérés sont plus jeunes, ont moins de comorbidités et ont des risques plus faibles de fracture et d'événements cardiovasculaires.

    Par rapport à ceux qui n'ont pas été opérés, les patients qui ont eu une parathyroïdectomie ont des réductions significatives de tous les évènements après ajustement, y compris la fracture de la hanche qui baisse de 12% (p = 0,04), les fractures en général de 17% (p = 0,001), le risque d’évènements cardiovasculaires qui baisse de 16% et le risque de décès qui est réduit de 41% (p < 0,001) et le décès d'origine cardiovasculaire de 40% (p < 0,001).

    Un suivi sur 10 ans de plus de 16 000 malades

    Ces résultats sont issus de l’analyse du suivi d’une large cohorte en Suède, sur tous les malades hospitalisés pour hyperparathyroïdie primaire, entre juillet 2006 et décembre 2017, soit un total 16 374 patients diagnostiqués avec une hyperparathyroïdie primaire.

    Pour l’ajustement du risque dans l'étude, chaque patient a été apparié à 10 témoins sans HPT1, issus de la population générale en fonction du sexe, de l'année de naissance et du comté de résidence (n = 163 740 témoins). À l’inclusion, les patients avaient un âge moyen de 67,5 ans et 78,2% étaient des femmes, ce qui est cohérent avec le fait que l'hyperparathyroïdie touche plus souvent les femmes.

    Faut-il opérer ?

    L’hyperparathyroïdie primaire altère les propriétés osseuses de l'os trabéculaire et de l'os cortical et une méta-analyse récente avait confirmé cet effet délétère sur l’os avec une élévation du risque de fractures axiales et périphériques. Les résultats de ce suivi de cohorte, portant sur un nombre de patient beaucoup plus important, sont cohérents avec les analyses précédentes et valide ce sur-risque de fracture, y compris pour la hanche qui est une fracture à risque.

    Dans cette étude, le bénéfice est significatif en un temps très court (1,2 ans), ce qui est très favorable à la chirurgie. cependant, l'étude n'identifie pas les raisons qui ont conduit à l'indication ou à la non-indication de la parathyroïdectomie, avec des différences importantes entre les groupes sur l’âge et sur les maladies associées, ce qui complique l'interprétation du rôle de la parathyroïdectomie sur les évènements cardiovasculaires et fracturaires, même s’il est probable que les indications chirurgicales ont suivi les recommandations. Un essai prospectif randomisé récent sur le suivi à 10 ans de 191 malades après parathyroïdectomie n’avait pas montré de bénéfice de la chirurgie sur les fractures, le risque cardiovasculaire ou la mortalité.

    En pratique

    Dans la mesure où l’hyperthyroïdie primaire est assez fréquente dans la population des femmes ménopausée (3,4% dans une étude systématique suédoise) et le plus souvent asymptomatique, il n’est bien sûr pas question d’opérer tout le monde. Dans les formes modérées, le traitement médical (par ex. cinacalcet) peut suffire pour réduire le risque osseux, cardiovasculaire et rénal.

    Les recommandations américaines proposent une parathyroïdectomie en cas d’hyperparathyroïdie symptomatique, de calcémie supérieure à 1 mg/dl au-dessus de la normale, d’insuffisance rénale et de fracture de fragilité ou d’ostéoporose. À la lumière de cette très large étude observationnelle, cette chirurgie semble pouvoir améliorer les malades au plan cardiovasculaire et osseux, surtout si elle a été bien préparée par une exploration préalable détaillée.

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    JDF