Pneumologie

Asthme sévère : rôle délétère du RGO sur l’épithélium bronchique

La vulnérabilité de l'épithélium aérien au reflux acide dans l'asthme sévère est déjà connue mais ses mécanismes restent encore mystérieux. Une étude in vitro a cherché à les comprendre et a surtout défini le rôle de l’IL33, ce qui peut ouvrir des voies thérapeutiques intéressantes. D’après un entretien avec Laurent GUILLEMINAULT.

  • 10 Mar 2022
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    Une étude, dont les résultats sont parus en février 2022 dans l’European Respiratory Journal, a cherché à élucider les mécanismes par lesquels le reflux gastro-œsophagien a un rôle délétère sur l’épithélium bronchique, notamment chez les sujets asthmatiques sévères. Pour cela, les auteurs ont développé un modèle in vitro en utilisant des cellules épithéliales bronchiques issues de donneurs asthmatiques modérés à sévères et les ont exposées à une association de pepsine, d’acides biliaires et de solution à pH acide. D’autre part, ils ont analysé des biopsies bronchiques et séquencé l’ARN des brossages bronchiques, chez des sujets normaux et chez des sujets asthmatiques sévères, atteints ou non de reflux gastro-œsophagien.

    Des mécanismes impliqués peu connus

    Le professeur Laurent GUILLEMINAULT, pneumo-allergologue dans le service de Pneumologie de l’hôpital Purpan de Toulouse, rappelle que le reflux gastro-œsophagien est une com-morbidité fréquente de l’asthme sévère, qui pose des problèmes thérapeutiques parfois complexes. Des études in vivo et ex vivo se sont déjà penchées sur l’effet du reflux gastro-œsophagien sur l’épithélium bronchique mais les mécanismes impliqués sont encore peu connus. Laurent GUILLEMINAULT explique que, dans cette étude in vitro, les auteurs ont reproduit la réalité en cultivant les cellules issues du brossage bronchique avec une méthodologie utilisant une interface air/liquide : la surface apicale des cellules du brossage était en contact avec l’air et la surface basale avec le liquide. Les résultats ont montré que le reflux acide augmente la perméabilité cellulaire en provoquant une disjonction des liens intercellulaires, favorisant ainsi le passage des allergènes. Laurent GUILLEMINAULT souligne que l’inflammation provoquée au niveau des cellules épithéliales par le reflux acide a été observée chez tous les sujets, mais surtout chez les asthmatiques sévères.

    Le rôle principal pour l’IL33

    Laurent GUILLEMINAULT précise que certains gènes sont sur-exprimés chez les patients asthmatiques sévères. C’est notamment le cas du gène de l’IL1RL1, qui est le récepteur de l’IL33, qui n’est autre qu’une alarmine, c’est-à-dire une protéine sécrétée par l’épithélium bronchique lorsqu’il est agressé par le reflux acide. On observe donc une surexpression de lL 33 chez les patients asthmatiques sévères, avec une augmentation de 67% de l’expression de IL33, par rapport à des sujets normaux. Le rôle de l’IL33 dans l’atteinte inflammatoire de l’épithélium bronchique par le reflux acide est donc prépondérant.  Laurent GUILLEMINAULT explique que ces résultats ouvrent la voie thérapeutique avec l’utilisation d’anticorps dirigés contre l’IL33 et son récepteur.

    En conclusion, le rôle délétère du reflux gastro œsophagien sur l’épithélium bronchique des asthmatiques sévères est prouvé et la lumière faite sur ses mécanismes, notamment génétiques et immunologiques peuvent ouvrir des portes pour de nouvelles thérapies. Une belle avancée mais encore du travail...

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    JDF