Pneumologie

Asthme et ménopause : les THS probablement pas innocents

Les traitements hormonaux de substitution (THS) instaurés lors de la ménopause auraient un lien avec le développement d'un asthme et leur interruption diminuerait la symptomatologie asthmatique. D’après un entretien avec Annaïg OZIER.

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  • 15 Jul 2021
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    Une étude danoise, dont les résultats sont parus en mai 2021 dans Chest, a cherché à établir e lien entre traitement hormonal substitutif de la ménopause et apparition d’un asthme. Il s’agit d’une étude observationnelle cas-témoins, issue du registre danois, incluant des patientes suivies entre 1995 et 2018. Les femmes incluses dans cette étude avaient entre 40 et 65 ans et avaient toutes un diagnostic d’asthme récent. Elles ont été appariées avec un groupe contrôle de femmes non asthmatiques. Les analyses ont été réalisées à partir du recueil des prescriptions médicales. Le diagnostic d’asthme était posé lorsque deux prescriptions de corticoïdes inhalées sur 2 ans ont été observées. Le THS devait être renouvelé au moins deux fois. Les femmes atteintes de BPCO ont été exclues. Les auteurs ont utilisé un modèle de régression logistique en fonction du type de THS (oestrogènes seuls, progestatifs seuls ou association des deux), de l’âge, des revenus et du niveau d’éducation.

    Une étude de grande envergure

    Le docteur Annaïg OZIER, pneumologue au Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux, souligne qu’il s’agit d’une étude de grande envergure d’une part en raison du volume important de la cohorte et, d’autre part par la longue durée d’observation. En effet, plus de 34 000 femmes asthmatiques et 345 000 femmes non asthmatiques ont été incluses. Au total, 25% des patientes ont reçu un THS pendant environ 3 ans, principalement à base d’oestrogènes seuls. Les résultats ont montré que le risque de développer un asthme était significativement plus élevé chez les femmes ayant bénéficié d’un THS, avec un odds ration de 1,63. De plus, Annaïg OZIER relève que l’arrêt du THS entraîne une disparition de l’asthme dans un nombre de cas significatif puisque l’odds ratio est de 2.12. Elle précise également que le risque apparait rapidement après le début de la prise de THS, c’est-à-dire moins de 2 ans.

    Les THS sont susceptibles de jouer un rôle dans le développement de l’asthme

    Annaïg OZIER explique donc que les THS jouent potentiellement un rôle dans l’apparition d’un asthme chez la femme ménopausée. En effet, elle rappelle que toutes les données épidémiologiques montrent une augmentation de la prévalence de l’asthme à la ménopause et que de plus, cet asthme a un phénotype particulier : il est plus sévère et plus difficile à traiter. Le rôle des hormones sexuelles est donc évoqué, face à cette influence des THS, mais les données de la littérature sont contradictoires, notamment in vivo versus in vitro. Annaïg OZIER souligne qu’il existe un biais dans ce travail car il est réalisé à partir du recueil de prescriptions et l’on peut se demander si les corticoïdes inhalés sont prescrits correctement ou encore se dire que tous les asthmatiques ne prennent pas de corticoïdes inhalés. Il n’est donc pas si simple d’imputer directement l’apparition de l’asthme à la prise de THS. Pour Annaïg OZIER, un travail prospectif est à réaliser pour préciser les mécanismes physio-pathogéniques de cet asthme, le rôle complexe des hormones sexuelles et les modifications métaboliques et inflammatoires liées à la ménopause et à la prise de THS. Les interactions sont complexes.

    En conclusion, les THS sont susceptibles d’avoir un rôle dans l’apparition de l’asthme à la ménopause mais des études précises sont à réaliser pour en comprendre le mécanisme. La question de savoir s’il fout ou non arrêter un THS en cas d’apparition d’asthme reste encore posée…

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    JDF