Infectiologie

Covid-19 : cafés, restaurants et salles de sport, hauts lieux de contamination

Une étude utilisant les données de téléphones portables de 100 millions d'américains dans 10 villes au printemps dernier pourrait utilement améliorer les décisions gouvernementales concernant les restrictions instaurée lors de cette 2ème vague... et rouvrir les petits commerces et les librairies.

  • Antonio_Diaz/iStock
  • 13 Novembre 2020
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    Les restaurants, les salles de sport, les cafés et les autres lieux intérieurs bondés où les personnes ne sont pas masquées ont représenté environ 8 nouvelles infections sur 10 au cours des premiers mois de l'épidémie de coronavirus aux États-Unis, selon une nouvelle étude, parue dans Nature. Celle-ci qui a utilisé les données de mobilité des téléphones portables de 100 millions d’américains dans 10 villes aux Etats-Unis entre mars et mai 2020.

    Ce modèle prédit qu'une petite minorité de lieux, dits « superspreaders », représente la grande majorité des infections et qu'il serait plus efficace de limiter le taux occupation maximal uniquement dans ces lieux à risque que de réduire uniformément la mobilité du public.

    Cette analyse pourrait également expliquer pourquoi de nombreux quartiers défavorisés ont été les plus touchés. Les lieux publics de ces communautés étaient plus fréquentés que ceux des quartiers plus aisés, et les résidents étaient plus mobiles en moyenne, probablement en raison des exigences de leur profession qui ne pouvait pas être réalisé en télétravail.

    Des critères précis

    Les restaurants sont de loin les lieux les plus risqués, environ quatre fois plus que les salles de sport et les cafés, suivis par les hôtels en termes de nouvelles infections. Les chercheurs ont examiné de près les épiceries, afin de comprendre les différences entre les quartiers à revenus élevés et faibles. Dans huit des dix villes, les taux de transmission étaient deux fois plus élevés dans les zones à faibles revenus par rapport aux zones à revenus élevés. Les données sur la mobilité mettent en évidence une explication : les épiceries des quartiers à faibles revenus comptaient près de 60% de personnes en plus au mètre carré ; les acheteurs avaient également tendance à y rester plus longtemps.

    L'équipe des scientifiques de Stanford a donc pu identifier les principaux facteurs de risque de transmission de l’infection dans les différents types de commerces : le temps passé dans le magasin (plus il est long, et plus on s'expose au virus), la densité de personnes présentes (plus elles sont nombreuses, et plus le risque augmente), ainsi que le non-port du masque (comme dans les cafés ou les restaurants).

    Les lieux où le port du masque ne peut être respecté et où l’on s’installe durablement, à l'image des restaurants, des bars, des cafés ou des salles de sport figurent donc en haut du classement des lieux à risque. Les concessions automobiles, où l’on s’installe certe longtemps, mais où l’on porte un masque et où la densité de population est faible, figurent à l’inverse dans le bas du classement.

    Une étude originale

    Les chercheurs se sont appuyés sur les données de mobilité anonymisées, collectées grâce aux smartphones, pour suivre les mouvements des citoyens heure par heure. Leur objectif a été de comprendre l’évolution de l’épidémie pendant la première vague et de définir les lieux les plus à risque pour attraper le virus. Les résultats fournissent des liaisons entre les différents lieux et paramètres étudiés et des taux d'infections locaux, mais il n'est bien sûr pas possible d'affirmer une relation de cause à effet.

    Selon cette analyse, la réouverture des restaurants avec un service complet aurait entraîné 600 000 nouvelles infections supplémentaires à la fin du mois de mai à Chicago. En se concentrant sur les lieux publics clos, les chercheurs ont également pu modéliser l'impact des restrictions partielles. En limitant l'occupation des restaurants à un cinquième de leur capacité, par exemple, on pourrait y réduire les nouvelles infections de 80%, tout en préservant quelque 60% de la clientèle (en étalant les horaires de service qui sont déjà plus larges aux Etats-Unis qu'en France).

    Limiter les capacités d’accueil

    Limiter le nombre de personnes et les maintenir masquées dans les lieux à risque serait donc efficace pour lutter contre la propagation de l’épidémie. Ces recherches pourraient contribuer à influencer les décisions des autorités concernant les nouvelles restrictions, à mesure que les cas se multiplient dans les différents pays. Les chercheurs avancent qu’ouvrir les commerces avec seulement 20% de leur capacité d'accueil n'engendrerait qu'une croissance de 10% des cas, contre 39% sans limitations particulière.

    Réduire l'affluence dans les magasins et les lieux publiques, maintenir le port du masque et les mesures de désinfections permettrait de limiter la contamination et de rouvrir les petits commerces comme les lieux de cultes, certainement moins contaminants que les grandes surfaces. Pour les salles de sport et les restaurants, il y a manifestement une voie pour les maintenir ouvert avec une fréquentation plus faible et mieux plannifiée sur la journée. Après, il n'est pas interdit non plus d'abandonner notre philosophie française très jacobine pour avoir une approche régionale, déterminée en fonction d'indicateurs précis.... Sinon, attendre l'été prochain va devenir vraiment pénible dans les conditions actuelles.

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