Pneumologie
La toux chronique réfractaire inexpliquée : une entité à part entière
La toux chronique inexpliquée ou réfractaire nécessite d’être bien définie pour ne pas manquer une cause traitable. Toutefois, l’absence d’étiologie reste fréquente et, dans un tel cas, ce symptôme pourrait faire l’objet de nouvelles options thérapeutiques prometteuses. D’après un entretien avec Laurent GUILLMEINAULT.

Une étude, dont les résultats sont parus an avril 2025 dans le New England Journal of Medicine, a cherché à faire le point sur les causes possibles de la toux chronique réfractaire et inexpliquée. Il s’agit d’une revue de la littérature au cours de laquelle les auteurs ont notamment évoqué la prévalence de la toux chronique réfractaire, son impact sur la qualité de vies des patients et ses mécanismes physiopathologiques. Ils ont également recensé les causes les plus fréquentes de la toux chronique, ainsi que les prises en charge thérapeutiques possibles, en expliquant la nécessité de réaliser des investigations complètes et en insistant particulièrement sur la recherche du reflux gastro-œsophagien.
Une pathologie fréquente qui mérite d’être étudiée
Le professeur Laurent GUILLEMINAULT, pneumo-allergologue au sein du Pôle des voies Respiratoires, du Centre Hospitalier Universitaire de Toulouse, rappelle que la toux chronique réfractaire ou inexpliquée est une pathologie très fréquente et pourtant peu étudiée. Il précise que ce travail a fait un point intéressant sur la définition de la toux chronique réfractaire ou inexpliquée, sur ses effets désastreux sur la qualité de vie des patients, sur son retentissement et sa prévalence élevée, qui oscille entre 2 et 4,9% dans les pays industrialisés. Il souligne également que les auteurs ont abordé l’aspect physiologique de la toux chronique réfractaire, en évoquant les mécanismes neurologiques, qui sont de plus en plus mis en lumière. Pour Laurent GUILLEMINAULT, les causes de la toux chronique réfractaire évoquées par les auteurs de ce travail sont plus discutables. Les causes le plus fréquemment rencontrées sont l’asthme, la rhinosinusite chronique et le reflux gastro-œsophagien. Les auteurs ont éliminé la coqueluche, dont la toux ne persiste que quelques semaines et expliquent que, dans la grande majorité des cas, une cause est trouvée, si les explorations sont bien réalisées, incluant de bonnes investigations sur le reflux gastro-œsophagien et avancent , sans preuve solide, que la toux reste inexpliquée dans 10% des cas seulement. Or, Laurent GUILLEMINAULT précise, qu’en pratique quotidienne, 20 à 25% des toux chroniques réfractaires n’ont pas de cause réellement établie, que le reflux gastro-œsophagien n’en est pas la principale origine et que la toux d’hyper sensibilité est souvent transitoire, ce qui rend les résultats de ce travail discutables.
Un travail qui laisse sur sa faim…
Laurent GUILLEMINAULT estime que ce travail apporte une version ancienne à partir de données récentes, sans insister sur les nouveaux traitements neuromodulateurs, comme les antagonistes P2 X3, utiles pour traiter la toux chronique réfractaire inexpliquée. En effet les auteurs ayant conclu que la plupart du temps des causes étaient retrouvées, ils ne laissent qu’une faible place à l’utilisation de ces thérapeutique, ce qui, selon Laurent GUILLEMINAULT, ne correspond pas à la réalité de la pratique quotidienne. Selon lui, il s’agit d’un plaidoyer selon lequel la toux chronique réfractaire inexpliquée est anecdotique alors que l’intérêt pour ce symptôme et ces traitements est grandissant. Il évoque également le CANVAS (Cerebellar Ataxia, Neuropathy, Vestibular Areflexia Syndrome) qui est une pathologie identifiée chez environ 25% des patients qui présentent une toux chronique réfractaire, et qui n’est pas cité dans cette étude.
En conclusion, les pneumologues sont fréquemment confrontés à des cas de toux chronique réfractaire inexpliquée et mis en difficulté face à la prise en charge thérapeutique, ce qui ne devrait pas être le cas, si le reflux gastro-œsophagien était réellement la cause la plus fréquente. Un sujet qui mérite d’être dans le New England Journal of Medicine mais la qualité de l’étude laisse une amertume…