Oncologie

Tumeurs neuroendocrine métastatiques : intérêt démontré d’un inhibiteur de tyrosine kinase

Dans les phéochromocytomes et paragangliomes métastatiques avec mutation du gène SDBH, le premier essai randomisé jamais mené démontre l’intérêt d’un inhibiteur de tyrosine kinase, le sunitinib, comme nouveau standard de traitement avec un haut niveau de preuve d'efficacité.

  • Nemes Laszlo/istock
  • 13 Mar 2024
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    Les personnes touchées par une maladie ultra-rares ont difficilement accès aux innovations médicales, notamment car il est difficile de recruter un nombre suffisant de participants pour les essais cliniques. Dirigée par le Dr Éric Baudin, chef du comité des tumeurs endocrines de Gustave Roussy, l’étude européenne FIRSTMAPP est le premier essai clinique randomisé au monde portant sur les phéochromocytomes et les paragangliomes métastatiques, des tumeurs neuroendocrines rares.

    Le critère principal, la survie sans progression à 12 mois, a été atteint chez 36% des patients du groupe sunitinib, contre 19% dans le groupe placebo. Parmi les patients portant une mutation du gène SDHB, FIRSTMAPP donne un taux de réponse tumorale de 50%, le plus élevé dans la littérature des tumeurs endocrines traitées par sunitinib. L’étude est publiée dans The Lancet.

    1ères données randomisées dans les tumeurs neuroendocrines rares

    Au total, 78 patients souffrant de phéochromocytomes et de paragangliomes métastatiques en progression ont été recrutés (39 patients par groupe). 25 (32%) des 78 patients présentaient des variants germinaux de SDHx et 54 (69%) avaient eu recours à des traitements précédents. Le critère d'évaluation principal est atteint, avec une survie sans progression à 12 mois chez 14 des 39 patients (36% [IC à 90% 23-50]) dans le groupe sunitinib. Dans le groupe placebo, la survie sans progression à 12 mois chez sept des 39 patients est de 19% (IC à 90% 11-31), validant ainsi les hypothèses du plan d'étude.

    Les effets indésirables de grade 3 ou 4 les plus fréquents ont été une asthénie (sept [18 %] sur 39 et un [3 %] sur 39), une HTA (cinq [13 %] et quatre [10 %]) et des douleurs rachidiennes ou osseuses (un [3 %] et trois [8 %]) dans les groupes sunitinib et placebo, respectivement. Trois décès sont survenus dans le groupe sunitinib : ces décès étaient dus à une insuffisance respiratoire, à une sclérose latérale amyotrophique et à une hémorragie rectale. Seul ce dernier événement a été considéré comme lié au médicament. Deux décès sont survenus dans le groupe placebo en raison d'une pneumonie d'aspiration et d'un choc septique.

    Une étude multicentrique européenne

    L’étude FIRSTMAPP est un essai clinique de phase II multicentrique, européen, randomisé versus placebo, en double aveugle. Son objectif était d’évaluer la tolérance et l’efficacité du sunitinib, un inhibiteur de tyrosine kinase, chez les patients atteints de phéochromocytomes ou de paragangliomes métastatiques, après que de premières études précliniques aient montré un possible bénéfice de cette molécule, la tyrosine kinase étant une enzyme qui joue un rôle dans le développement et la division cellulaire.

    Les patients ont été randomisés (1:1) pour recevoir soit du sunitinib par voie orale (37,5 mg par jour), soit un placebo. La randomisation a été stratifiée en fonction du statut SDHB (mutation présente vs type sauvage) et du nombre de traitements systémiques précédents (0 vs ≥1). Le critère d'évaluation principal est le taux de survie sans progression à 12 mois selon l’évaluation centralisée en temps réel (Response Evaluation Criteria in Solid Tumours version 1.1).

    Un nouveau standard de traitement

    Avant l’étude FIRSTMAPP, aucun essai randomisé contrôlé n’avait été mené sur des patients porteurs de ce type de cancer. Les deux traitements historiques sont le traitement par MIBG, un analogue du transporteur de la norépinéphrine marqué à l’iode 131, et la chimiothérapie. Cependant, aucun traitement par voie systémique n’a jamais été standardisé, et le taux de réponse complète est extrêmement rare. Les réponses partielles ne concernent que 25% des patients.

    « FIRSTMAPP positionne le sunitinib comme le traitement dont le niveau de preuve est le plus élevé chez les patients porteurs d’un phéochromocytome/paragangliome métastatique progressif, et ceci d’autant plus chez les patients dont la tumeur porte une mutation du gène SDHB. Ce dernier résultat valide une approche personnalisée, basée sur les conséquences de la mutation de ce gène », conclut le Dr Éric Baudin dans un communiqué.

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    JDF