Oncologie
Cancer du pancréas : une aggravation rapide d’un diabète peut être un signe précoce
L'apparition ou l’aggravation rapide d’un diabète peut être le signe d’un cancer du pancréas à un stade précoce. Une « causalité inverse » à l’éventuelle responsabilité des incrétines dans l’apparition d’un cancer du pancréas.
- AndreyPopov/epictura
Une analyse sur près d'un million de patients atteints de diabète de type 2 en Lombardie (Italie) et en Belgique révèle que 50% des cancers pancréatiques dans les deux régions ont été diagnostiqués dans l'année suivant le diagnostic ou l’aggravation d’un diabète de type 2 et la modification du traitement antidiabétique.Ce sont les résultats d'une étude présentée au congrès européen de cancérologie, l'ECCO.
En Belgique, 25% des cas de cancer du pancréas ont été diagnostiqués dans les 90 jours suivant cette modification et, en Lombardie, 18% des cancers du pancréas. Après la première année de modification du traitement antidiabétique, le nombre de diagnostics de cancers du pancréas a chuté de façon spectaculaire, ce qui remet en cause le rôle des incrétines dans l’apparition du cancer.
Un risque élevé si l’apparition ou l’aggravation sont rapides
Comparativement aux patients qui ont été équilibrés avec les premiers antidiabétiques oraux prescrits, ceux qui ne le pouvaient pas ont un risque 3,5 fois plus élevé d’avoir un cancer pancréatique dans les trois premiers mois suivant leur première prescription d’incrétine. Ce risque chute à 2,3 fois au cours des trois à six mois suivants, puis à 2 fois pour les six à douze mois suivants et à 1,7 fois au-delà de la première année.
Parmi les patients qui avaient déjà un diabète de type 2 équilibré avec un premier antidiabétique oral, la nécessité d’une intensification du traitement, ou le passage à l'insuline, est plus précoce chez les patients diabétiques qui ont eu ensuite un diagnostic de cancer du pancréas.
En outre, une aggravation importante du diabète les obligeant à passer à un traitement antidiabétique plus agressif avec des injections d'insuline est associée à un risque sept fois plus élevé d’avoir un diagnostic de cancer du pancréas ultérieurement.
Une grande étude de registre avec diagnostic croisé
Des chercheurs en Belgique et en Italie ont utilisé les données de prescription de 2 registres pour identifier 368 377 patients atteints de diabète de type 2 en Belgique entre 2008 et 2013 et 456 311 patients en Lombardie entre 2008 et 2012.
Les données ont ensuite été reliées aux diagnostics de cancer du pancréas dans les 2 registres. En Belgique et en Lombardie, 885 cas et 1 872 cas de cancer du pancréas ont été diagnostiqués respectivement.
L’apparition ou la détérioration rapide d’un diabète pourrait être le premier signe d’un cancer du pancréas occulte. Cette étude montre également que le diagnostic d’un cancer du pancréas dans les mois suivant l’instauration d’une incrétine, l’est également pour d'autres traitements antidiabétiques, et en particulier l'insuline.
Une causalité inverse de l’effet délétère des incrétines
Bien qu'il soit connu qu'il existe une association entre diabète de type 2 et cancer du pancréas, la relation entre les deux maladies est complexe.
Les traitements antidiabétiques de type incrétine réduisent l'hyperglycémie en stimulant la libération de l'insuline par le pancréas et ils sont habituellement prescrits lorsque les premiers antidiabétiques initiaux ne peuvent plus contrôler la glycémie. En raison de leurs effets stimulants sur le pancréas, il a longtemps été craint que les incrétines soient à même de favoriser l'apparition d’un cancer du pancréas, surtout si celui-ci est diagnostiqué ensuite rapidement.
En réalité dans cette étude où le risque baisse au but de 3 mois après la prescription, c'est plutôt le cancer du pancréas qui semble pouvoir provoquer une détérioration du diabète, qui serait elle-même suivie de la prescription d'incrétines ou d’insuline. Ce phénomène est appelé « causalité inverse ».
En pratique
L’apparition ou la détérioration rapide d’un diabète pourrait être le premier signe d’un cancer du pancréas occulte, et des mesures devraient être prises pour le diagnostiquer comme une échoendoscopie.
Le cancer du pancréas est l'un des cancers les plus létaux, en partie parce qu'il est difficile à détecter à un stade précoce. En raison de la gravité de ce cancer et parce que seulement une minorité des cas sont détectés à un stade curable, il est nécessaire de trouver des moyens de détection précoce.
L'étude d'Autier et collègues ouvre la possibilité de combiner le diagnostic d'une maladie associée, le diabète de type 2, avec un biomarqueur sanguin, le déséquilibre glycémique rapide.








